Un coup contre la culture

Aurélie Filipetti
(Photo AFP)

Rassemblement des socialistes à la Rochelle, qui célèbrent leur arrivée au pouvoir plus que l’usage qu’ils vont en faire, réunion des amis de Nicolas Sarkozy à Nice, dont la démarche n’est pas cohérente avec le choix prochain d’un nouveau président de l’UMP, droite et gauche ne chôment pas. La rentrée aura été précoce. La cote de popularité de François Hollande commence à baisser. Quoi de surprenant, dès lors que sa gestion ne semble pas rassurer les Français ?

AU CHOIX principal du gouvernement, qui consiste à nettoyer la société de toutes les réformes entreprises par le précédent, répond, chez ceux qui ne souhaitent pas se livrer à une critique systématique, le désir de trouver des éléments positifs dans l’action gouvernementale : peut-être, après tout, que confisquer une partie de revenus excessifs n’est pas contre nature et introduit un peu de cette justice à laquelle nos gouvernants ne cessent de se référer ; qu’il est logique, même en ces temps de disette, d’augmenter les allocations de rentrée scolaire ; qu’il est bon, quoi qu’il en coûte, de donner aux Roms le droit au logement et au travail ; que, de toute façon, et même si la réduction des dépenses   doit primer sur tous les autres efforts de diminution des déficits, le salut passe par une hausse des impôts et donc des sacrifices.

Mais la ligne tracée par le pouvoir n’est pas claire. Au point de commencer à nourrir des désillusions qui se manifestent déjà la Rochelle. Modeste assurément, et pourtant extraordinairement sûr de lui, M. Hollande ne convainc pas nombre des militants socialistes, soit à cause de la surenchère de gauche, que la présence affirmée des Verts et du Parti de gauche rend inévitable, soit parce que certaines mesures ne résistent pas à l’analyse. Effacer le sarkozysme ? C’est se borner à voir tout en blanc ou en noir et à ignorer l’utilité de la plupart des réformes précédentes.

La taxe et la pub à la fois.

On en en prendra pour preuve la moins importante : la suppression de la publicité sur les télévisions publiques après 20 heures trente. Le ministre du Budget, Jérôme Cahuzac, a indiqué jeudi que, compte tenu des pertes financières enregistrées par les chaînes publiques, la publicité pourrait être être restaurée. On présente M. Cahuzac comme un homme pragmatique et sans doute mérite-t-il pleinement ce qualificatif. Mais quoi ?  Un socialiste qui adopte le modèle de la télévision commerciale, instrument numéro un de l’abrutissement des masses ? Qui, ne sachant où trouver les quelque 500 millions d’euros qui font défaut, n’a pas d’autre idée que le retour au statu quo ante ? Qui ne se concerte guère avec la ministre de la Culture, Aurélie Filipetti, aimable et simple jeune femme ? Mme Filipetti n’ose pas se comparer à Jack Lang et encore moins à André Malraux. Elle ne s’en élève pas moins contre un projet en contradiction avec toutes les idées du PS et avec la réforme de la loi HADOPI. D’un côté, on veut livrer gratuitement au peuple, au nom de la liberté de communiquer, la création artistique sans trop se demander si, ce faisant, on ne va pas l’étouffer ; de l’autre, on remet le doigt dans un engrenage qui finira, comme dans les télévisions privées, par des coupes publicitaires dans les programmes.

Ce n’est pas la fin du monde ? La France a des soucis bien plus graves ? Certes. Cependant, à ne ressasser que nos drames, nous finissons par déprimer. Ils ne doivent nous empêcher d’exercer notre droit d’inventaire. Pourquoi les chaînes publiques ont-elles besoin, pour survivre, de la taxe audiovisuelle et des recettes publicitaires à la fois ? Qui a jamais posé cette simple question de bon sens ? Qu’est-ce que ce pays dont la dette s’élève à 1 700 milliards mais qui ne sait pas trouver un demi-milliard pour diffuser des émissions décentes ?

RICHARD LISCIA

PS – Aurélie Filipetti a annoncé vendredi soir que, en accord avec le président et le Premier ministre, il n’y aurait pas de retour à la publicité après 20 heures sur les chaînes de télévision publiques. L’épisode est donc clos, mais symbolise le manque de cohésion du gouvernement.

 

 

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