Hollande taxe à tout-va

Hollande, dimanche, sur TF1
(Photo AFP)

Le président François Hollande a accordé en deux jours un entretien au « Monde » et une interview à TF1, à la fois pour préciser l’action fiscale qu’il va entreprendre immédiatement et revigorer l’action de l’exécutif qu’il avait confiée en grande partie à son Premier ministre. Il a annoncé une politique de rigueur qui ne souffrira aucune exception.

PLUS QUE LES interventions du président, c’est la décision de Bernard Arnault, P-DG du groupe LVMH, d’acquérir la nationalité belge, qui a provoqué la grande surprise du week end écoulé. M. Arnault affirme qu’il continuera de payer ses impôts en France, mais son communiqué, que personne n’attendait, résonne comme un avertissement au gouvernement de gauche. Il est en effet à la tête d’un groupe qui n’a pas souffert de la crise, assure des dizaines de milliers d’emplois et fait des bénéfices. M. Arnault, selon les gazettes, aurait besoin de 40 millions d’euros par an pour vivre. La taxe à 75% sur la part de revenus supérieure à un million d’euros devrait le conduire logiquement à multiplier cette somme par trois ou quatre. Pour un homme dont la fortune est la première de France, la quatrième mondiale, avec 32 milliards de dollars, les fameux 75 % ne devraient pas poser un problème insoluble et il ne viendra à l’idée de personne d’éprouver de la commisération pour le P-DG de LVMH. En revanche, il y a dans sa décision un début d’exil réel, sinon fiscal, qui pourrait servir d’exemple à bon nombre de capitaines d’industrie. Or le premier soin du gouvernement devrait être de protéger les affaires qui marchent.

Taxe à 75 % : pas d’exception.

M. Hollande ne s’en est pas laissé conter. Il maintient la taxe « exceptionnelle » sans faire la moindre exception pour les sportifs et les artistes. Il explique aussi qu’il y a quelque 30 milliards d’euros à trouver, pour atteindre, à la fin de 2013, les 3 % de déficit public, 10 milliards en économies sur les dépenses publiques, dix sur les entreprises, dix sur les ménages « les plus aisés ». Il ne faut pas s’y tromper : la hausse des impôts sera massive, elle atteindra les classes moyennes, ne serait-ce que parce le barème de l’impôt, comme en 2012, ne sera pas ajusté en fonction du taux d’inflation. M. Hollande agit comme il l’a toujours dit et, dans ces conditions, ses propos ne contiennent aucune nouveauté, à part un aveu : la croissance ne sera pas de 1,5 % en 2013 et le gouvernement a choisi, (arbitrairement ?), le taux plus réaliste de 0,8 %.

En revanche, on continuera de s’interroger sur une politique fiscale fondée aux deux tiers sur des hausses d’impôt et pour un tiers seulement sur la diminution des dépenses de l’État. On peut aussi se demander ce que le président va faire en matière de compétitivité industrielle, lui qui a rejeté la TVA sociale et ne peut donc réduire le coût du travail qu’en transférant une partie des cotisations patronales sur la CSG, payée par les salariés. Laquelle, ajoutée à tous les impôts déjà prévus, réduira le pouvoir d’achat sensiblement et étouffera une demande déjà affaiblie par une hausse mondiale des prix des matières premières.

Découragement des entreprises, seules créatrices d’emplois réels et non aidés, politique de l’offre très incertaine, diminution très sensible du pouvoir d’achat, nous  n’avançons guère sur le chemin de la croissance. M. Hollande dit plaisamment : « On m’a demandé d’accélérer, j’accélère ! » Mais dimanche, sur TF1, il n’a pas souri une seule fois et paraissait relativement tendu, sans doute parce qu’il ressent sa chute de popularité comme une injustice. Tout est injuste : la crise, le chômage, la précarité et, quoi qu’en dise le champion de la « justice sociale », les excès de la fiscalité.

RICHARD LISCIA

 

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4 réponses à Hollande taxe à tout-va

  1. DELTEIL CHRISTIAN dit :

    Franchement, on ne voit au nom de quoi il y aurait eu une exception pour les artistes et les footballeurs et pourquoi seuls les entrepreneurs qui créent des emplois et de la richesse, ce que ne font pas les premiers devraient payer plein pot.

  2. vultaggio-lucas dit :

    Certes, nous n’allons pas plaindre M. Arnault, M. Pinault et encore moins M. Arnaud Lagardère pour qui le taux exceptionnel et provisoire de 75% au delà de un million d’euros de revenus annuel par part doit être une douce plaisanterie, financièrement parlant.
    Mais que penser du sujet non abordé dans votre juste éditorial, à savoir la suppression des « cotisations sociales » qui seront remplacées par la CSG et peut-être, histoire de faire passer ou Pacé, les centrales qui ne seront pas fermées, une aumône écologique pour financer la couverture sociale. Elles vont peser sur le pouvoir d’achat de tous les contribuables ayant un tant soit peu de revenus.
    Que penser de cette étatisation de la Sécurité Sociale comme le propose le think tank Terra Nova proche du parti des socio-démocrates? Aurait-elle un rapport avec ce que prévoient le TSCG et le MES à savoir le contrôle et la gestion des couvertures sociales quasi directement par le Conseil de l’Europe, comme cela semble être le cas en Italie avec le SuperMario président du Conseil italien et technocrate hors pair?

  3. Herodote dit :

    La politique fiscale du gouvernement surprend désagréablement plus d’un économiste mais peut-il faire autrement dans la conjoncture actuelle sans tailler franchement dans les dépenses publiques ? Simplement dit, un gouvernant socialiste ira-t-il jusqu’à se tirer une balle dans le pied dans l’intérêt national ? L’ancien secrétaire général du PS devrait consentir ce sacrifice pour être le Président de tous les français.

  4. MOURIES dit :

    Je suis très étonnée que les niches fiscales concernant les oeuvres d’art ainsi que le restauration des monuments historiques ne soient même pas remises en question. M. Fabius y serait-il pour quelque chose ?

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