Le chômage et l’héritage


François Hollande
(Photo AFP)

Le cap des trois millions de chômeurs a été franchi en août, ce qui contribue à la déprime générale. Arcelor-Mittal a décidé de fermer le site de Florange et le ministre du Redressement productif, Arnaud Montebourg, espère maintenant trouver un repreneur, Mittal se montrant prêt à vendre l’aciérie pour un euro symbolique. Le désarroi du gouvernement, qui ne semble pas pouvoir faire mieux que la majorité précédente, accroît l’inquiétude des salariés.

LA CRISE a rattrapé François Hollande au siège des Nations-unies à New York, où il s’est penché sur la Syrie et le Mali. Non sans un agacement apparent, le chef de l’État a souligné que la poussée irrésistible du chômage ne date pas d’aujourd’hui et l’a implicitement attribuée à son prédécesseur. Il y a près de quatre mois que M. Hollande est à l’Élysée. C’est peu, et cela lui permet de creuser le filon politique de l’héritage maudit. Mais c’est trop pour n’adopter que cette posture. Car sa réponse est fausse. Ni la droite ni la gauche n’ont de remède à une crise qui a déjà porté, en quatre ans, deux coups de boutoir à l’économie française. Nicolas Sarkozy n’est pas responsable de l’ascension du taux de chômage, c’est la crise. Droite ou gauche aux affaires, elle dure.

Une expérience intrépide. 

 

M. Hollande serait plus crédible s’il avait indiqué que les mesures qu’il compte mettre en place, emplois d’avenir et contrats de génération, ne seront pas opérationnelles avant l’année prochaine, même si elles ne créent que des emplois aidés qui jetteront seulement un masque sur la pénible réalité. Il serait plus crédible s’il n’avait pas commencé par s’attaquer au pouvoir d’achat de ses concitoyens en taxant les heures supplémentaires et en adoptant des mesures fiscales dont l’ensemble représente un matraquage. Il serait plus crédible si, au lieu de demander de l’argent aux ménages et aux entreprises, il avait arrêté l’hémorragie des dépenses publiques. Il serait plus crédible s’il avait conçu le « choc de compétitivité » qui exige au moins une partie du transfert des charges sociales vers la TVA.

Malheureusement, il n’a été élu que parce qu’il a pris le parti, très tôt dans la campagne électorale, d’appliquer le programme socialiste comprenant ses 60 promesses. Aussi bien, sa fidélité à ces 60 engagements le rend forcément vulnérable aux critiques, même si elles sont fondées sur une détérioration de l’économie nationale. Élu pour cinq ans, il se sent contraint de parvenir à des résultats positifs par la voie qu’il a choisie. Si l’on oublie le combat politique intérieur, on prie pour qu’il réussisse, l’intérêt général, si souvent cité par Nicolas Sarkozy, primant sur celui des partis ou des idéologies. Il n’empêche. On ne voit pas comment, dans un environnement européen et international qui rend la France totalement dépendante de ses partenaires commerciaux en Europe et ailleurs, le gouvernement sera en mesure de se lancer dans une méthode intrépide, pour ne pas dire téméraire, qui se résumera à une expérience pleine de dangers.

Certes, il arrive souvent que M. Hollande mette de l’eau dans son vin et, depuis quatre mois, il l’a fait plusieurs fois.  Tout dépendra du contenu du projet de budget 2013 que le gouvernement adoptera demain. Mais, à part quelques précisions sur les catégories de victimes qui encaisseront le choc d’une hausse de la fiscalité, l’opinion est déjà avertie de ce que compte faire le président. On craint que la baisse du pouvoir d’achat qui s’ensuivra achève le résidu de croissance ou, pis, nous entraîne dans la récession. Étant entendu que, alors, l’espoir ne pourra plus venir que d’un rebond de la croissance mondiale, par un effet du libéralisme économique si décrié par le pouvoir. Cette perspective est peu vraisemblable pour l’année prochaine.

RICHARD LISCIA

 

 

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2 réponses à Le chômage et l’héritage

  1. Michel Cornié dit :

    Merci de cette très juste analyse

  2. bourriez dit :

    C’est une analyse claire de la situation et François Hollande a raison de dire qu’il n’y peut rien. Il n’a pas fait grand chose et, si ses 60 propositions avaient été connues de tout le monde, il n’aurait pas été élu. L’adage « élections piège à cons  » se vérifie encore une fois. Les malheureux Arcelor qui se battent pour leur survie se sentent floués. C’est la triste loi du genre. Je voudrais me tromper.

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