Obama a failli perdre !

Deux millions de voix de plus
(Photo AFP)

On trouve de tout dans les commentaires français sur la victoire électorale de Barack Obama : elle n’est pas aussi large que celle de 2008, le président est si peu satisfait de son succès qu’il n’a réuni que 15 000 personnes à Chicago, au lieu du raout énorme de 2008, et la tâche qui l’attend est si lourde qu’il aura bien du mal à l’accomplir. Quant à Mitt Romney, dès lors qu’il a perdu, il n’apparaît plus comme le républicain réactionnaire qu’il fut, il portait un espoir, alors qu’Obama a déçu.

LE PRÉSIDENT RÉÉLU aura, quand les comptes seront bouclés, deux millions de voix d’avance sur M. Romney. Kennedy avait été élu avec 118 000 voix de plus que Nixon. M. Obama peut encore gagner la Floride, où le comptage des voix n’est pas terminé. Sa majorité au Collège électoral est d’ores et déjà écrasante : 303 voix, soit 33 de plus que la majorité absolue. Les démocrates conservent leur majorité au Sénat. Il me semble que, si la victoire de M. Obama n’est pas bouleversante, elle est impressionnante pour un incumbent (président sortant) qui a été élu en 2008 dans un pays lui aussi « en situation de faillite », comme le disait fort bien François Fillon à propos de la France.

Le rôle de John Boehner.

Certes, le chef de l’exécutif ne soulève plus l’enthousiasme des foules américaines ; certes, il a déçu la gauche et la droite ; certes, il a encore un travail énorme à accomplir. Mais son adversaire républicain a-t-il proposé un meilleur programme que celui d’Obama ? M. Romney croit-il vraiment qu’on va diminuer la dette sans augmenter les impôts ? Croit-il vraiment qu’il peut accroître les dépenses militaires et supprimer des dispositions sociales qui apportent un peu de soulagement aux 45 millions de pauvres et à la classe moyenne ? Le candidat républicain nous a-t-il prouvé qu’il avait la moindre compétence en politique étrangère ? Son parti, en s’opposant de manière irréductible à tout impôt nouveau, n’a-t-il pas bloqué l’effort de M. Obama pour réduire la dette ?

La majorité républicaine à la Chambre des représentants, dirigée par John Boehner, a refusé pendant quatre ans de coopérer avec le président Obama. Son but n’était pas de servir l’intérêt de la nation américaine en diminuant sa dette (16 000 milliards de dollars, plus de 100% du PIB, sept fois la dette de la France), mais de faire en sorte que M. Obama, qui a perdu les midterm elections en 2010, ne fût pas réélu en 2012. M. Boehner se montre tout aussi coriace aujourd’hui, mais son projet ne peut plus être de s’opposer à une réélection de M. Obama qui vient d’avoir lieu.

Dans ces conditions, qu’est-ce qu’il lui reste à faire, sinon coopérer avec le président ? Les membres du Congrès ne s’offriront pas le luxe d’augmenter la terrible absence de crédibilité qu’ils ont auprès de l’opinion. Dans l’affaire de la dette, ou bien ils refusent tout compromis et le budget sera réduit automatiquement  de 600 milliards de dollars à partir du 1er janvier, par des coupes et des augmentations d’impôts forcément aveugles ; ou bien le législatif et l’exécutif travaillent ensemble pour que la réduction des dépenses et les nouvelles taxes fassent le moins de mal possible.

Les Américains, comme d’habitude, ont voté au centre. Ils ont voté pour la responsabilité et contre les formules magiques. Les commentateurs se ruent déjà sur la Chine où le pouvoir va changer d’acteurs, et ils insistent sur l’importance de cette évolution. Vraiment ? Un nouveau pouvoir désigné non pas par l’immense peuple chinois mais par les 25 membres du bureau politique du PC chinois ? Ce serait un événement planétaire ? La Chine, deuxième puissance économique mondiale, ne deviendra un leader du monde que quand elle adoptera un fonctionnement démocratique. On peut dire tout le mal que l’on pense des ratés de la démocratie américaine, la force du droit en fait toujours une nation exceptionnelle, qui allie la richesse au suffrage universel.

RICHARD LISCIA

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Une réponse à Obama a failli perdre !

  1. vultaggio-lucas dit :

    Mr Obama a-t-il failli perdre comme le président-candidat Sarkozy a failli gagner? Les médias vont- ils pouvoir faire durer le suspense pendant les quatre années à venir?

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