Une Italie sans Monti ?

 

 

Pierluigi Bersani
(Photo AFP)

Comme ses amis socialistes en France, le Parti démocrate (PD) italien a organisé des élections primaires exemplaires qui ont permis à l’ancien ministre Pierluigi Bersani, 61 ans, d’émerger comme le candidat de la gauche à la présidence du Conseil après les élections législatives qui auront lieu l’année prochaine. Par 60% des voix, il a battu un candidat pourtant redoutable, le jeune maire de Florence, Matteo Renzi, 37 ans. Trois millions de citoyens ont participé à ces primaires.

IL SE CONFIRME donc que les élections primaires, en Europe, sont utiles à la gauche car elles lui apportent une légitimité accrue, pendant que les droites européennes (et c’est le cas en France et en Italie) sont divisées et affaiblies (souvent au profit de l’extrême droite). Le centre gauche italien sort renforcé du scrutin, tandis que la droite,  contrainte à son tour d’organiser des primaires, fait face à une inconnue : personne ne sait si Silvio Berlusconi sera candidat. Son parti, le Peuple de la liberté, n’est plus crédité que de 15 % des suffrages (contre 38 % en 2008), le « Cavaliere » a perdu toute crédibilité politique et humaine,  le coeur n’y est vraiment plus. Pourtant, M. Berlusconi a désigné son dauphin, Angelino Alfano. La question de la célébrité des candidats ne se pose pas quand une primaire est organisée, car elle a précisément pour objectif de désigner un homme dont la notoriété sera assurée par la consultation.

Centre gauche : une force de proposition.

L’organisation, excellente, honnête, rondement menée des primaires de la gauche offre aux Italiens une force de proposition crédible qui, après les années folles et chaotiques de Berlusconi, arrive comme un soulagement et un retour à l’ordre. Mais elle ne parviendra pas à mettre entre parenthèses ce que l’actuel président du Conseil, Mario Monti, a fait pour son pays grâce à un effort de redressement sans précédent, qui a certes sonné les Italiens, mais pas au point qu’ils en contestent les modalités. Loué par les Allemands, assez proche de François Hollande qui s’appuie sur l’Europe du sud, M. Monti est aujourd’hui vénéré par une forte fraction de l’opinion italienne et par ses partenaires européens, notamment l’intraitable Angela Merkel, pourtant difficile à contenter.

D’un point de vue purement macro-économique, on ne voit pas pourquoi Mario Monti ne devrait pas continuer à diriger l’Italie au-delà du printemps 2013. Ce n’est pas faire injure à la gauche que de rappeler qu’elle a manqué de cohérence et de pragmatisme quand elle est était au pouvoir, notamment sous Romano Prodi qui a présidé deux fois le Conseil des ministres, en 1996 et en 2006. Certes, il faudrait essayer M. Bersani pour évaluer ses qualités, mais M. Monti bénéficie déjà d’une autorité que personne ne lui conteste ni en Italie ni ailleurs.

Un intérim.

Le problème vient de ce que M. Berlusconi a quitté le pouvoir sous la pression de l’ensemble de la classe politique à la fois parce qu’il avait trop de démêlés avec la justice et parce qu’il était incapable d’engager des réformes, ou ne voulait pas les faire parce qu’elles auraient nui à ses intérêts. Le vote par les députés italiens qui a mis au pouvoir un gouvernement entièrement composé de technocrates en novembre 2011 signait la déconfiture de la classe politique. Mais M. Monti occupe des fonctions intérimaires. Il n’est pas élu et, bien entendu, les politiciens professionnels sont tout prêts à reprendre leurs prérogatives dès lors que le pays est sur la bonne voie.

Ils peuvent encore gâcher les progrès fragiles accomplis par M. Monti qui n’a jamais caché qu’il se retirerait avant les élections de 2013. Bien qu’il soit âgé de 69 ans, rien n’empêche ce démocrate-chrétien de se présenter lui aussi, pour autant qu’il rejoigne un parti ou qu’il fonde le sien. Sa popularité est suffisante pour lui assurer un beau score et lui donner la légitimité qu’il n’a pas encore. On ne peut pas, toutefois, tirer de plan sur la comète. Il y a assez de rigueur, chez M. Monti, pour refuser d’entrer dans le labyrinthe de la politique après un an et demi de travail à l’abri de toutes les chamailleries.

RICHARD LISCIA

 

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