In Amenas : le bain de sang

Le site gazier
(Photo AFP)

À In Amenas, la prise d’otages a tourné au bain de sang. On pouvait le craindre dès lors que le gouvernement algérien refuse de négocier avec les terroristes, quel que soit le prix à payer. L’aviation algérienne a bombardé le site gazier, tuant de nombreux terroristes, mais aussi, malheureusement, beaucoup d’otages, dont des Américains et des Français. D’autres étrangers et la plupart des Algériens, qui étaient libres de leurs mouvements, ont réussi à s’échapper.

LA POSITION  des Algériens a toujours été claire et simple : les preneurs d’otages doivent savoir qu’ils ne sortiront jamais vivants de leurs actions. Hier encore, François Hollande soulignait qu’il faisait « entièrement confiance » au gouvernement algérien pour résoudre le problème, mais, face au carnage, il va être conduit soit à nuancer son point de vue, soit à en changer : jeudi soir, il annonçait que la prise d’otages « se dénouait dans des conditions dramatiques ». L’Algérie, en effet, ne devait pas seulement, dans cette affaire, protéger ses intérêts et ses ressortissants, mais aussi sauver les employés français, norvégiens, allemands, américains, japonais, philippins, qui travaillaient sur le site. En maintenant une attitude inébranlable, elle a provoqué une crise internationale de forte ampleur.

Du coup, le consensus français autour de l’intervention au Mali, cause de la prise d’otages au Sahara, risque de s’effriter. Cependant, si François Hollande pouvait peser diplomatiquement sur le pouvoir algérien pour qu’il adapte sa tactique aux craintes soulevées par le sort des otages, il n’était en mesure ni d’ouvrir une négociation sur place ni de lancer contre le site une autre opération militaire. Tout au plus peut-il exprimer son étonnement devant la violence de l’action militaire algérienne qui succède à des négligences considérables, puisque le site gazier était mal protégé.

Cette terrible affaire montre la dimension du danger qu’il y a, pour des Occidentaux, à travailler dans des pays étrangers où la vie humaine n’est pas le premier souci d’un gouvernement. Les Algériens, en effet, n’ont pas perdu beaucoup de temps à réfléchir à une stratégie plus subtile. Il leur importait avant tout d’administrer la preuve que toute prise d’otages dans leur pays, même quand il s’agit de dizaines de personnes, conduit inévitablement à la mort des terroristes. Il est en outre probable que le site gazier, qui produit un cinquième du gaz algérien, aura été détruit ou gravement endommagé pendant les combats.

Cette différence culturelle entre la France et l’Algérie ne manquera pas d’alimenter chez nous de vives polémiques où la bataille d’In Amenas comptera plus que l’offensive au Mali. Il est logique que le nombre élevé des victimes, françaises et étrangères, pose de nouvelles questions et contribue à un débat politique. Le pouvoir, forcément, devra en acquitter le prix.

RICHARD LISCIA

 

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3 réponses à In Amenas : le bain de sang

  1. Dr DE MEDRANO dit :

    Rien ne permet d’affirmer que l’intervention française au Mali soit la cause de la prise d’otages au Sahara.

    • decraene dit :

      il n’est pas obligatoire d’avaliser les avis amers de l’UMP et on peut patienter un peu pour juger un comportement vis-à-vis de terroristes qui nous obligent à réfléchir sur le long terme. La majorité précédente nous a entraînés dans une spirale en Libye où les populations souffrent et pour longtemps.

      • admin dit :

        La contradiction est portée par l’extrême gauche beaucoup plus que par la droite, que je n’ai pas mentionnée. L’UMP, à cette heure, n’a pas exprimé d' »avis amer ». Le rapport entre la guerre en Libye, qui souffrait bien plus sous Kadhafi qu’aujourd’hui et les crimes terroristes en Algérie et au Mali n’est pas décisif. Cet argument n’est présenté que par le Front national. Quant à la revendication du groupe terroriste d’In Amenas qui expliquait son assaut contre le site gazier par la présence française au Mali, elle a eu certes une courte durée mais mon article a été publié jeudi au milieu de l’après-midi avant que les experts de toutes sortes en démontrent l’invraisemblance.

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