Une neige politisée

 

Carence publique ou fatalité ?
(Photo AFP)

Les intempéries qui paralysent le nord du pays depuis hier ont déclenché une polémique entre le gouvernement et l’opposition, celle-ci assurant que celui-là n’a pas pris les dispositions qui convenaient, ce qui aurait aggravé la désorganisation des transports. Foyers sans électricité, passagers bloqués pendant des heures sur le rail ou la route, on ne niera pas que les effets du coup de froid au terme d’un hiver particulièrement rigoureux ont exaspéré nombre de citoyens. Mais il s’agit d’un cas classique où le pouvoir ne peut rien, ou pas grand-chose, contre les caprices de la nature.

LES VIFS DÉSAGRÉMENTS occasionnés par un climat détestable sont pain bénit pour l’opposition, souvent oublieuse de ses propres carences face à la neige quand elle était aux affaires. L’indulgence n’étant pas à l’ordre du jour, Nathalie Kosciusko-Morizet a vivement critiqué les manquements de la mairie de Paris ; à quoi Bertrand Delanoë a répondu : « Il neige ». Argument qui se veut sans appel, mais qui ne convainc pas les usagers du train, du métro, du bus ou de la route. L’ancien ministre des Transports, Dominique Bussereau, a rendu un jugement de Salomon. « Il y a du bon et du pas bon », a-t-il constaté, fustigeant notamment la SNCF. En effet, ce n’est qu’à 8h20, mardi matin qu’elle engagé les franciliens à ne pas prendre le RER. C’était trop tard, ils y étaient déjà. Mais M. Bussereau trouve que la RATP a mieux fonctionné.Son successeur, Frédéric Cuvillier, est plus laconique. « Ce qui était prévisible, a-t-il dit, a été prévu ».

Le climat a changé en France.

L’évolution du climat devrait engager les pouvoirs publics dans une saine réflexion. Il fait plus chaud en été et plus froid en hiver. Les dispositifs adaptés à un climat tempéré devraient donc être améliorés sur le long terme, et non au cas par cas. En même temps, le public, gavé d’impôts et de mauvaises nouvelles, cherche toujours le responsable de ses tourments ; il le trouve infailliblement chez ceux qui nous gouvernent et dont il estime que c’est le rôle d’atténuer les difficultés de leurs administrés. Il y a belle lurette que la notion de fatalité n’existe plus. Si François Hollande appuyait sa défense sur l’idée que, la crise étant mondiale, la France ne dispose pas seule des moyens de la combattre, il serait aussitôt disqualifié. Ce qui est peut-être vrai pour le climat, à savoir qu’il est plus fort que l’homme, ne l’est pas en tout cas pour l’économie.

Un combat de trop.

Cependant, on voit bien que tous les sujets sont bons pour alimenter le combat politique. Est-il vraiment nécessaire de compter les défaillances qui n’aggravent que marginalement  la détresse des usagers quand se produit un phénomène climatique de cette ampleur ? N’y a-t-il pas, dans les choix stratégiques du gouvernement, assez de dossiers où nous avons tous notre mot à dire et à exprimer notre contestation ? Lundi, une chaîne de télévision demandait à des passants ce qu’ils pensaient de François Hollande, qui se trouvait à Dijon pour défendre son programme. Ils ont tous exprimé leur déception. Mardi, nouveau micro-trottoir sur les intempéries, et là, c’est l’exaspération générale : « Trois centimètres de neige et il n’y a plus personne pour nous protéger ». Pas trois, mais dix ;  ou trente dans la Manche. Des chasse-neige en veux-tu, en voilà, des milliers d’employés d’EDF occupés à réparer les câbles, des policiers et des gendarmes qui volent au secours des naufragés de la route. Il y a un temps pour la neige, il y a un temps pour déneiger. Il y a un temps pour le verglas, il y a un temps pour qu’il fonde. Il y a l’hiver, il y a le printemps. Vérités transcendantales ou tautologies ? On ne sait pas si M. Delanoë  cite M. de La Palisse où s’il a lu l’Ecclésiaste.

RICHARD LISCIA

 

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