Retraites : la voie facile

Dans le feu de la négociation
(Photo AFP)

Au terme de négociations ardues, les « partenaires » sociaux sont parvenus hier à un accord sur le financement des retraites complémentaires (régimes AGIRC et ARRCO). Les pensions seront désindexées  à partir du Ier avril, c’est-à-dire qu’elles seront revalorisées chaque année, en gros, de la moitié de l’inflation seulement. Les cotisations des actifs seront augmentées d’environ 0,10%. 

LA RETRAITE complémentaire concerne tous ceux dont le salaire est supérieur à un plafond de la Sécurité sociale revalorisé chaque année. Les cotisations permettent d’accumuler des points qui, au moment où le salarié prend sa retraite, représentent une valeur annuelle en euros qui lui est versée. Contrairement au régime de base, les actifs relevant des complémentaires paient non pas pour les générations précédentes mais pour eux-mêmes. De sorte que le niveau de leurs émoluments et la durée de leur carrière ont une influence primordiale sur le montant de leur pension ultérieure.

Des décisions hors du contexte.

Dans la crise actuelle, il n’est ni cruel ni inconcevable d’entamer le pouvoir d’achat des retraités les mieux lotis (les anciens cadres touchent plus d’argent de leurs complémentaires que de leur pension de base). Ce qui est gênant, c’est que le gouvernement a laissé les syndicats et le patronat trouver une solution au problème spécifique de la retraite des cadres, en dehors du contexte général. Or, si tous les régimes ne se ressemblent pas, ils sont associés par le nombre obligatoire de trimestres pendant lesquels les actifs doivent cotiser. Un cadre ne peut pas toucher sa pension complémentaire s’il n’a pas travaillé pendant la durée complète de sa carrière. Il est donc indispensable de traiter la question des retraites dans son ensemble.

AGIRC et ARRCO risquaient de devenir insolvables à l’horizon 2017. La désindexation retarde l’échéance fatale. Dire, comme l’a fait Michel Sapin, ministre du Travail, que les partenaires sociaux ont « sauvé » nos retraites, c’est se livrer à une extrapolation douteuse. Le régime de base de la Sécurité sociale est lui aussi menacé de faillite. Il faut donc réformer le système dans sa globalité. Les retraités doivent sans doute faire un effort de solidarité. Celui-ci devra néanmoins s’inscrire dans une panoplie de mesures d’économies. Il est d’ailleurs curieux que le gouvernement favorise, une fois de plus, une baisse du pouvoir d’achat. Depuis dix mois, impôts, prélèvements, taxation des heures supplémentaires représentent la quasi totalité des instruments du redressement des comptes nationaux. Ces mesures affaiblissent le pouvoir d’achat alors que les pouvoirs publics affirment tous les jours qu’ils veulent favoriser la croissance, donc les dépenses privées.

Une réforme permanente.

On a beaucoup de mal à comprendre que le report de l’âge de la retraite soit encore un tabou en France. C’est pourtant un puissant facteur d’économies qui n’ôte rien au pouvoir d’achat. On nous dit: les réformes précédentes n’ont pas empêché le déséquilibre du système. Mais, sans elles, ce serait pire. Et le système doit être révisé à périodes fixes (tous les trois ans par exemple) en fonction des paramètres démographiques et économiques. En d’autres termes, la réforme des régimes de retraite doit être permanente si on veut qu’ils restent solvables.

Tout le monde sait que la vraie bonne solution, c’est l’allongement des carrières, mais personne n’ose, pour des raisons purement politiques, y recourir. On nous dit encore : s’il n’y a plus de places pour les seniors, on va faire autant de chômeurs. Ce n’est pas vrai : la retraite à 60 ans a favorisé les préretraites à 57, 58 ou 59 ans. Les entreprises se sont engouffrées dans la brèche ouverte par la baisse de l’âge du départ pour se débarrasser d’employés plus âgés, donc plus chers, et reporter les charges qu’ils représentaient pour elles sur les organismes publics, de Pôle emploi à l’assurance vieillesse. Il suffit de leur signifier qu’elles ne peuvent plus le faire. Et le concept sinistre de préretraite ne sera pas appliqué avant 62 ans.

RICHARD LISCIA

 

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Une réponse à Retraites : la voie facile

  1. Wolga dit :

    La diminution du montant des retraites ou même la désindexation totale ou partielle par rapport à l’inflation semblent inacceptables. Et pourtant, nous les médecins, nous avons subi les deux depuis 2012, en ce qui concerne l’ASV qui représente 40% de la retraite servie par la CARMF, et personne n’en parle ! Nous sommes à ma connaissance la seule profession à avoir subi cela.
    Je suis retraité depuis le 1er janvier 2011, et d’un seul coup au 1er juillet 2012 la valeur du point ASV est passée de 15,55 € à 13,00 €, avec stagnation de la valeur du point au moins jusqu’au 1er janvier 2015, faisant diminuer ma retraite de 162,25 € par mois, ce qui est énorme !
    Je voudrais que cela soit connu davantage de nos concitoyens.
    Bien cordialement
    Dr Jean Wolga

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