Trappes : le piège


Trappes, dans la nuit de samedi à dimanche
(Photo AFP)

Les violences de Trappes résultent d’un schéma désormais classique : la population déshéritée d’un quartier sensible s’insurge contre un contrôle de police qu’elle juge abusif. L’incident prend ensuite des proportions catastrophiques, avec voitures incendiées, violences sur les personnes, blessés, occupation des lieux par les CRS. Puis, et ce n’est pas forcément le moins grave, il se transforme en différend politique.

LES CONDITIONS dans lesquelles une femme portant un voile intégral interdit par la loi a été interpellée seront éclaircies par une enquête en cours. Le ministre de l’Intérieur, Manuel Valls, affirme que les agents de police n’ont fait que leur travail, qu’ils ont été agressés par des membres de la famille, notamment le mari de la femme voilée qui a tenté d’étrangler le fonctionnaire au moment il tentait de verbaliser. Les socialistes sont mal à l’aise avec la loi qu’ils ont été peu nombreux à approuver, sauf M. Valls, qui ne cesse de rappeler que le texte est en vigueur et qu’il doit être respecté.

Le fond du problème.

Les propos tenus par le gouvernement et par  l’opposition n’expliquent pas le fond du problème. Les femmes portant le voile intégral n’ignorent pas la loi. Quand elles sortent vêtues de cet accoutrement, elles savent exactement à quoi elles s’exposent. Parfois, les agents de police ferment les yeux pour ne pas déclencher une émeute. Parfois, ils verbalisent.

La loi étant adoptée depuis exactement trois ans, le port du voile intégral se résume à une provocation. Il teste la volonté des autorités de la faire respecter ; il tente de la rendre obsolète et inapplicable, compte tenu des violences et des dégâts qui s’ensuivent ; il relève du prosélytisme communautariste ; il se substitue, par l’usure, aux moeurs de la société française. Il est donc « inacceptable », comme n’a cessé de le répéter M. Valls, qui mérite de résoudre le problème à sa manière, fût-elle fondée sur le recours à la force. Car il a compris que Trappes est une épreuve que l’autorité républicaine doit passer avec succès.

Derrière le voile intégral, il y a des hommes qui utilisent leurs femmes pour affaiblir la république. Qui espèrent bien, à terme, la mâtiner d’un peu de salafisme. Qui se considèrent comme extérieurs et inaccessibles au fonctionnement de la démocratie parlementaire. Qui veulent remporter sur le droit une victoire dictée non par le Coran, mais par leur propre interprétation des préceptes de l’islam, qui ne mentionnent pas le voile intégral. Qui veulent que la religion, en l’occurrence la leur, remplace notre système. Il nous semble que le projet est assez dangereux pour que nous le combattions avec force et résolution (et pas en remettant en liberté l’homme qui a agressé le policier). Et c’est pourquoi nous devons soutenir M. Valls sans faire de cette histoire un champ de bataille entre le pouvoir et l’opposition.

Le terreau social.

Dans la foulée, apparaissent la désagrégation du tissu social, miné par le chômage, la délinquance et la drogue, le désarroi de familles qui ne parviennent pas à joindre les deux bouts et n’ont pas besoin, en plus, de subir une répression policière, la haine tenace des jeunes auxquels cette société dont nous exaltons les avantages est incapable de donner du travail. C’est le terreau où pousse l’adoption du voile intégral, qui devient l’instrument d’une insurrection. Le ministre de l’Intérieur essaie, pour le moment, de séparer le voile des émeutes. Il ne veut pas, et il a raison, que l’un serve de détonateur à l’explosion des autres. Mais il ne peut pas non plus laisser camper 250 CRS à Trappes pendant plusieurs mois, d’autant que des incidents similaires peuvent se produire à chaque instant de cet été accablant qui porte sur les nerfs.

La force publique doit donc effectuer un repli stratégique d’un kilomètre ou deux, pour rendre Trappes à sa routine. Puis, si tout se passe bien,  s’en aller définitivement. C’est risqué, surtout pour le commissariat de Trappes. Mais il faut bien qu’une affaire trouve son dénouement. Dans le même temps, la justice doit poursuivre les agresseurs du policier, la femme voilée, les incendiaires de voitures et d’immeubles. Il faut que la justice passe, que la loi ait le dernier mot, que les provocateurs sachent qu’ ils n’auront pas raison de ce qui reste essentiel aux yeux de l’immense majorité des Français.

RICHARD LISCIA

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2 réponses à Trappes : le piège

  1. geyl dit :

    Les commentaires pourraient s’avérer aussi explosifs que leur objet même.

  2. Je suis étonné que personne ne relève que le mari de cette femme a déclaré que les précédents contrôles s’était bien passés, c’est à dire qu’il s’agit d’une énième récidive de la part d’une femme ou plutôt d’un couple, ou peut-être d’un homme, qui a décidé de ne pas respecter la loi.
    Loi qui ne devient qu’une simple taxe sur l’incivilité de porter le voile intégral.
    Le problème est exactement ici : la loi, en sanctionnant par une simple amende très modérée, même en cas de récidive, fait du port du voile intégral une banale incivilité, que certains peuvent s’offrir, qu’une solidarité anti-républicaine peut prendre en charge.
    Or, comme le dit Richard Liscia, il ne s’agit pas d’une banale incivilité, mais de tester, de provoquer la République.
    Si le législateur avait voulu empêcher cette provocation, il aurait prévu
    des sanctions progressives en cas de récidive, suffisamment dissuasives pour que nul n’ait les moyens de provoquer la république.
    Eugène Neutrino

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