Chômage : baisse en trompe-l’oeil

Divine surprise en août
(Photo AFP)

Il y a eu au mois d’août 50 000 chômeurs de moins en France, soit une baisse d’1,5 % du taux de chômage. Le gouvernement se garde bien de triompher. Le ministre du Travail, Michel Sapin, ne voit pas dans cette baisse un signe certain de retournement de la tendance, celui-là même que François Hollande avait annoncé pour la fin de l’année.

UN NOMBRE ANORMAL de non réinscriptions au chômage en août, période de vacances, expliquerait cette réduction, inattendue et remarquable, du nombre de chômeurs. L’opposition se hâte de dénoncer un nouveau « mensonge » du pouvoir. Jean-François Copé parle de 540 000 emplois aidés, statistique astronomique qui n’est revendiquée par personne. Mais peu importe. Premièrement, une baisse sensible est préférable à une augmentation sensible. Deuxièmement, la petit rebond de croissance au deuxième trimestre, celui-là vigoureusement revendiqué par le gouvernement, ne saurait expliquer à lui seul cette soudaine effervescence de l’emploi, dès lors que le pays ne commence à créer des postes de travail qu’à partir de 1,5 % de croissance. Troisièmement, l’emploi n’est qu’une donnée parmi d’autres sur l’état de santé économique et social du pays.

2014 : mauvais budget.

Or le budget qui vient de nous être présenté pour 2014 ne laisse aucunement prévoir une forte activité économique l’année prochaine. La hausse de la pression fiscale entraînera probablement un mouvement de repli de la consommation. Le sentiment que l’effort demandé aux Français est énorme alors qu’ils ne perçoivent aucun résultat au niveau de l’emploi, de l’équilibre budgétaire, du désendettement et du pouvoir d’achat, accroît le pessimisme général. Le gouvernement s’enorgueillit de diminuer la dépense publique de 15 milliards d’euros l’année prochaine, ce qui n’a jamais été fait, mais le montant total du budget s’élève à 371 milliards, identique à celui de 2013. Il faut donc comprendre que nous allons faire des économies sur un budget qui, en 2014 aurait dû mécaniquement augmenter de 15 milliards. C’est à cette dérive qu’il est mis un terme.

Mais pour quel objectif ? La dette et le service de la dette (le remboursement annuel des intérêts) vont s’accroître. La dette nationale atteindra en 2014 95 % du produit intérieur brut (PIB). Malgré le CICE (crédit d’impôt compétitivité emploi), les entreprises françaises restent trop taxées, le coût du travail n’est pas allégé, les marges des entreprises sont très faibles, l’investissement recule et le recrutement de nouveaux salariés est au point mort. Les emplois aidés sont la méthode du désespoir. Ils sont financés par l’État dans leur majeure partie et, même s’ils sont capables d’inverser la courbe du chômage, ils ne sont pas durables et ils ne correspondent à aucune relance de l’économie. Seuls les emplois dits marchands représenteraient un progrès.

Ayrault « assume ».

Le Premier ministre, Jean-Marc Ayrault, qui déclare « assumer » les hausses d’impôts, comme s’il allait rendre des comptes plus tard et comme s’il atténuait ainsi l’inquiétude populaire, a au moins failli sur un point. Il a renoncé à réduire drastiquement le coût du travail. Il ne s’agit pas de diminuer les salaires, déjà beaucoup trop bas, mais de diminuer les charges et de les transférer sur un budget social (on parle des prestations familiales). Des réformes structurelles de type allemand sont indispensables pour le long terme. Pour le court terme, il n’y a pas d’autre solution que de donner une bouffée d’oxygène aux entreprises en les rendant plus concurrentielles par la baisse du coût du travail. Cette politique n’est pas prévue par le budget, elle ne fait pas l’objet d’un projet du gouvernement, elle sera un jour adoptée dans l’urgence et la panique.

RICHARD LISCIA

 

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