Alstom : la bonne affaire

Démissionnaire chronique
(Photo S. Toubon)

L’intervention du gouvernement dans la vente d’Alstom aura été en définitive bénéfique. Les conditions de la transaction ont été très améliorées sur plusieurs plans, financier, industriel et en termes de souveraineté nucléaire. Le ministre de l’Économie, Arnaud Montebourg, a présenté l’accord comme un grand succès diplomatique. Il demeure qu’il a finalement entériné la première offre, celle de General Electric.

LA VENTE d’Alstom à General Electric (GE) s’accompagne d’une nationalisation partielle puisque l’État va racheter les parts de Bouygues à hauteur de 20 % du capital. M. Montebourg a réussi à imposer à ses interlocuteurs ses conditions : Patrick Kron, le PDG d’Alstom, ne joue plus, depuis quelques semaines, qu’un rôle de figuration ; GE a accepté de porter son offre (au départ, de 10 milliards d’euros) à 12,35 milliards et prend des engagements sur la création de 1 000 emplois (la société américaine paiera une pénalité de 50 000 euros par emploi non créé) ; surtout, GE n’a pas rechigné devant la perspective d’un partenariat avec l’État, ce qui n’est pas courant (peut-être sans précédent) pour une entreprise américaine.  Enfin, l’État n’achètera les actions de Bouygues qu’au moment le plus opportun pour lui, c’est-à-dire quand leur prix aura baissé. Ce qui n’empêche pas l’État d’obtenir immédiatement une présence au conseil d’administration.

Le « désir » de GE.

On comprend donc que M. Montebourg se félicite d’une transaction bonne pour Alstom et bonne pour le pays. Cependant, le ministre avait commencé la partie en fustigeant M. Kron (qui ne l’aurait pas informé de ses tractations avec GE) et en cherchant une alternative européenne qui, selon lui, aurait mieux assuré les intérêts souverains de la France dans une industrie d’importance stratégique. M. Montebourg rêvait d’un « Airbus énergétique » et de conclure un accord avec l’Allemand Siemens. Mais Siemens, plus concurrent que complémentaire d’Alstom a fait une offre qui incluait le Japonais Mitsubishi parmi les acheteurs. Adieu, le rêve européen. Depuis le début de la négociation, rien n’a changé : alors que Siemens apparaissait comme une pièce rapportée, la volonté manifeste de GE d’acheter Alstom était flagrante.

M. Montebourg s’est habilement servi du « désir » de GE pour faire monter les enchères en sollicitant Siemens, manifestement moins enthousiaste. Il n’a pas empêché la transaction conçue par M. Kron d’aboutir. Il a fixé durablement Alstom sur le territoire français en entrant dans le capital. Et sans doute n’avait-il pas tort à propos de Florange : là où c’est absolument indispensable, il ne faut pas écarter de façon dogmatique le principe de la nationalisation partielle. Il s’est publiquement félicité du soutien total que Manuel Valls lui a apporté, mais il n’est pas le seul à avoir négocié : tout ce qu’il a fait au sujet d’Alstom, il l’a fait sous la houlette de François Hollande et de ses conseillers. La différence antre Jean-Marc Ayrault et Manuel Valls est là : le Premier ministre actuel ne se dresse pas contre M. Montebourg, mais il le contrôle ou le fait contrôler.

Un démenti.

Pendant toute la semaine dernière, à la suite d’un article du « Nouvel Observateur », la rumeur a couru d’une démission possible de M. Montebourg. Sur France 2, dimanche soir, le ministre de l’Économie, ravi de son opération sur Alstom, l’a démentie. M. Montebourg est très souvent démissionnaire, c’est même chez lui un état permanent, mais jamais suivi jusqu’à présent du passage à l’acte. Il vaut mieux le prendre au sérieux pour ce qu’il fait dans sa lutte contre le chômage (et qui n’est pas négligeable) que pour des incartades politiques sans effet.

RICHARD LISCIA

 

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Une réponse à Alstom : la bonne affaire

  1. Dr Jérôme Lefrançois dit :

    Je ne suis pas du tout aussi optimiste que vous, car M. Montebourg est un prestidigitateur très imbu de lui-même, et qui « roule » exclusivement pour lui-même.

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