La dernière chance

Fillon sonne la charge
(Photo AFP)

Ce gouvernement Valls-bis remanié est celui de la dernière chance. Il mérite donc d’être protégé. En allant dire aux patrons « J’aime l’entreprise », Manuel Valls n’a pas commis un crime mais il s’est offert le luxe de gifler ses adversaires de gauche. Là-dessus, les déclarations d’Emmanuel Macron au « Point », certes recueillies avant qu’il fût nommé  ministre et dans lesquelles le nouveau ministre de l’Économie envisage un assouplissement de la semaine de 35 heures, risquent d’apparaître comme une provocation aux yeux des « frondeurs ».

LE MÉRITE des propos tenus par MM. Valls et Macron est néanmoins le suivant : non seulement il confirme que le cap est fixé, mais il décrit le cap. Il s’agit d’en finir avec tous les conservatismes qui sont en train de tuer le pays à petit feu, la démondialisation, les 35 heures, la politique de la demande, les seuils sociaux, l’excessive pression fiscale, l’obésité de l’État. Mais il est préférable d’agir, et non d’exposer un credo qui va enflammer les officines idéologiques de la gauche. Manuel Valls avance sur un fil : à gauche, on a les moyens institutionnels de le faire chuter, à droite s’organise une opposition nouvelle, celle que souhaite diriger François Fillon et qui cherche à pousser le gouvernement à la faute politique. L’ancien Premier ministre exige que le deuxième gouvernement Valls engage sa responsabilité devant l’Assemblée immédiatement, alors que le Premier ministre voulait attendre la discussion budgétaire. Pourquoi M. Fillon a-t-il choisi cette approche périlleuse qui risque d’aboutir à une crise de régime ?

Un jeu dangereux.

Sans doute parce qu’il souhaite se présenter comme le candidat de l’UMP à la présidence de la République le plus acharné contre le pouvoir actuel. Mais l’enjeu va au-delà de ses ambitions personnelles : pour jouer ce jeu délétère, M. Fillon devrait nous démontrer que la droite est en mesure d’assumer tout de suite des responsabilités gouvernementales, ce qui n’est pas le cas, puisqu’elle n’a pas choisi son homme-lige. Bien que la tâche soit pratiquement impossible à accomplir, il ne faut pas tirer un trait sur Manuel Valls avant qu’il n’ait commencé à appliquer un programme susceptible de contenir des réformes efficaces et, d’ailleurs, souhaitées par la droite. Franchement, on ne voit pas du tout comment le déclenchement d’une crise de régime, qui retarderait toute action de plusieurs mois, pourrait contribuer à la lutte contre le chômage ou à la croissance.

Ce que Valls peut faire.

D’autant que M. Valls, si menacé qu’il soit par les frondeurs, le PC, les Verts, les mélenchonistes, par une droite qui refuse (pour le moment) de cohabiter et par le scepticisme de l’électorat, a quand même un atout : maintenant que le président de la République a clarifié sa politique, le Premier ministre est en mesure de balayer littéralement les obstacles structurels à la croissance française. Il peut annoncer des économies nouvelles sur la dépense publique,  baisser les charges et augmenter la TVA, assouplir ou même abolir les 35 heures. Il peut devenir le « monstre » anti-social que, dans ses excès, la gauche de la gauche n’a cessé de décrire. Porter le fer dans la plaie, aller au fond des choses, casser la vraie pensée unique, celle qui s’appuie sur la compassion et sur des notions d’économie qui relèvent du paranormal pour préserver des rentes de situation au détriment de l’emploi, voilà ce qu’il est urgent de faire. Qu’est-ce que cette première moitié de mandat de François Hollande nous a démontré  ? Que les demi-mesures, les demi-réformes (comme celle des retraites, totalement insuffisante), les dispositions du genre douche écossaise, un coup j’augmente les impôts, un coup je les baisse, un coup je fais des économies, un coup j’engage des dépenses, se traduisent par une croissance zéro.

L’homéopathie, c’est fini. L’heure de la chirurgie a sonné.

RICHARD LISCIA

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3 réponses à La dernière chance

  1. Chambouleyron dit :

    D’accord, M. Liscia. J’ai rêvé que l’Assemblée votait la confiance au Premier ministre avec les voix de la droite.Ce n’est pas la ligne de M. Fillon, trés politicienne. Quel marigot ! Avec un seul but : le désastre pour la France pourvu qu’il serve mon ego et mes intérêts.

  2. CLOVIS DE MORAIS dit :

    Ce que dit vraiment Macron sur les 35 heures. Il ne s’était jamais exprimé publiquement. Vingt-quatre heures avant d’être nommé à Bercy, il s’est confié au « Point ».

  3. Robert SAINT-JACQUES dit :

    Le gouvernent « Valls 2 » est, certes et, à l’évidence, celui de la dernière chance pour la mise en œuvre des nécessaires et basiques mesures annoncées par le président de la République, lors de sa conversion affichée à la démocratie sociale. Les résultats des réformes structurelles attendues par ceux qui réfléchissent, au lieu de penser et qui sont nombreux, devront être lisibles, perceptibles et palpables à très court terme. A défaut, M. Hollande et les démocrates sociaux, peu nombreux – mais il n’y a pas, en la matière, de génération spontanée – qui l’entourent aujourd’hui, seront mis en minorité par les officines vertes, roses, rouges et amères qui les ont portés au pouvoir et par les officines bleues de génération quasi-spontanée.

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