De l’usage de la transparence

Brochant se déclare innocent
(Photo AFP)

La Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) a saisi le parquet du cas de trois parlementaires UMP qui auraient omis de signaler des avoirs détenus à l’étranger dans leurs déclaration de patrimoine. Parmi les trois élus, Bernard Brochant, député des Alpes-Maritimes et ancien maire de Cannes, se défend comme un beau diable : il affirme n’avoir jamais caché au fisc un compte contenant un million  d’euros qu’il a en Suisse.

ON NE REVIENDRA PAS  sur l’idée que tout élu doit payer ses impôts comme n’importe quel citoyen. Ni sur le fait que l’évasion fiscale a des effets destructeurs sur la confiance des gouvernés envers leurs gouvernants. Ni sur la création d’un organisme (la HATVP) chargé de remettre les élus dans le droit chemin s’ils s’en sont écartés. On déplorera en revanche l’usage partisan qui est fait de cette entreprise d’assainissement de la vie politique. Le PS a cru bon de publier un communiqué ce matin qui réclame la démission des trois parlementaires. Il a cru bon de rappeler son attachement à l’éthique. On est en droit de craindre que sa ferveur morale lui serve aussi d’arme contre l’opposition parce qu’il se trouve que les trois élus épinglés (les députés Lucien Degauchy et Bernard Brochant et le sénateur Bruno Sido) appartiennent à l’UMP.

Chasse aux sorcières ?

Il ne s’agit pas de les exonérer et ils auront, avec la justice, les démêlés qu’on n’a aucun mal à imaginer. Il serait simplement préférable de se souvenir que les socialistes eux-mêmes ne sont pas à l’abri de tout soupçon, l’affaire Cahuzac et le scandale qu’elle a déclenché en témoignent. Il est piquant que les socialistes, drapés dans leur éblouissante vertu, réclament la démission des trois élus quand on sait qu’ils n’ont pas réussi à obliger Thomas Thévenoud, ex-secrétaire d’État au Commerce extérieur, qui, lui, avait « oublié » de payer ses impôts, à démissionner de son poste électif. Avec son inutile communiqué, le PS a donc créé ex nihilo une chasse aux sorcières dont le pays n’a absolument pas besoin.

Pour au moins deux raisons : la première est que, tant que la justice n’a pas tranché, il n’est pas sain de clouer au pilori des hommes qui ont peut-être quelque chose à dire pour leur défense. Il se trouve que Bernard Brochant aurait déclaré son compte en Suisse, ce qui aurait échappé à la Haute Autorité et qui suffirait à le blanchir. Personne n’ignore l’effet désastreux de l’association d’un nom avec un délit. Tant que celui-ci n’est pas définitivement prouvé, les accusations infamantes, ou simplement hâtives, correspondent à l’inverse exact de la justice.  La deuxième raison, c’est que personne n’est dupe des déclarations de principe faites par les partis politiques. Dans ce cas précis, le PS veut faire oublier les affaires Cahuzac et Thévenoud, accabler l’opposition, et contribuer par tous les moyens à orienter les médias vers la droite pour qu’elle pense moins à la majorité. Ce jeu est tellement clair qu’il en devient confondant.

Il en dit long en outre sur la sincérité des partis quand ils sombrent dans la politique politicienne en réactivant cette sorte de « guerre civile » qui oppose perpétuellement la majorité et l’opposition. Divisée, conspuée, démoralisée, la gauche a certes besoin d’une revanche, fût-elle minable. Mais elle la trouvera plus sûrement dans une amélioration de la situation économique et sociale du pays.

RICHARD LISCIA

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Une réponse à De l’usage de la transparence

  1. Oj dit :

    Tout à fait d’accord !
    Ce que veut le citoyen dépasse l’entendement du politique « type » de notre pays qui ne vit, par essence, que dans l’opposition droite-gauche. Seuls quelques iconoclastes, comme Hubert Vedrine, proposent la notion de « pacte de collaboration » de l’ensemble ou du moins des principaux partis politiques de la majorité et de l’opposition sur des réformes de fonds. Ce qui se pratique manifestement en Allemagne et dont on pourrait s’inspirer. Sur cette base concernant l’échange Jouyet-Fillon si l’on est imaginatif on peut construire le scénario suivant : Jouyet et Fillon auraient parlé de cela, mais ils préfèrent se taire et paraître ridicules plutôt que de tenir une position politiquement incorrecte aux yeux de la classe politique.

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