Liberté chérie

Lazarevic à son arrivée
(Photo AFP)

Serge Lazarevic était le dernier des otages français. Il a été libéré par ses ravisseurs au terme d’une négociation conduite par les présidents nigérien et malien. Il est rentré à Paris et François Hollande est allé l’accueillir à sa descente d’avion à Villacoublay. Le président de la République a insisté sur deux points : le premier est qu’il a réussi à obtenir la libération de la quinzaine d’otages français détenus dans le monde en 2013 ; le second est que tout citoyen doit se protéger lui-même contre le risque d’enlèvement.

LA LIBÉRATION de M. Lazarevic pose diverses questions, mais, pour le moment, l’opinion se réjouit de ce que l’otage, qui a passé trois ans aux mains de ses geôliers, ait enfin recouvré la liberté. On se demandait si le pouvoir ne l’avait pas oublié, et sa fille, à plusieurs reprises, a exprimé son désarroi devant la lenteur de la négociation. Parmi les otages, il fait partie, certes, de ceux qui ont eu la vie sauve, mais sa détention a été l’une des plus longues et des plus pénibles.  Son sort inspirait une vive inquiétude, d’autant que Philippe Verdon, un autre otage enlevé en même temps que lui, a été assassiné par ses ravisseurs. Dans ces conditions, on préfére ignorer les conditions dans lesquelles M. Lazarevic a été libéré, et ce qu’il en a coûté à la France.

Pas de pitié pour les otages anglo-saxons.

Là où sévit Daech, ou État islamique, les otages anglais et américains ont été systématiquement égorgés ou décapités. La libération des otages français ne s’explique donc que par un échange. Il peut s’agir d’argent, même si le gouvernement s’en défend, versé par d’autres gouvernements. Il peut s’agir aussi d’un échange de prisonniers aux mains de dirigeants africains. On affirme, dans les familles des citoyens français qui ont été tués, que des djihadistes spécialisés dans la prise d’otages ont été libérés à la suite d’un accord d’échange. La méthode choisie ne mérite aucun jugement. Ou bien on considère que la vie des otages vaut plus que tout autre considération et les moyens utilisés n’ont pas d’importance, ou bien on refuse de négocier et on abandonne les otages à leur sort. Mais c’est un peu comme si un gouvernement tuait ses propres ressortissants.

Inutile de dire que les familles se prononcent toujours en faveur de la négociation. Non seulement en France, mais en Grande-Bretagne ou aux États-Unis, dont les dirigeants invoquent la raison d’État en prenant le risque de l’impopularité. François Hollande n’a pas voulu s’y résigner, et pas seulement pour des raisons électoralistes, mais parce que son humanisme lui dicte la conduite à tenir. Est-il pour autant devenu un spécialiste de la libération des otages ? Il s’y entend fort bien pour aplanir les différends possibles avec les présidents africains qui, par exemple, pourraient refuser de libérer des djihadistes. Ses succès sont liés néanmoins à sa volonté de négocier et de payer le prix, toujours élevé, d’une libération.

La politique française des otages ne peut qu’être approuvée ; il serait indécent de leur faire porter la responsabilité des conséquences négatives de leur libération. Ces conséquences ne doivent pas pour autant être négligées : la remise en liberté d’assassins féroces, le versement d’une rançon renforcent l’ennemi que notre armée pourchasse en Afrique.

RICHARD LISCIA

 

 

 

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Une réponse à Liberté chérie

  1. a.da.prov@gmail.com dit :

    Ce que vais dire est extrêmement cynique, mais moi, je ne suis pas d’accord du tout.

    C’est précisément en versant des rançons qu’on encourage les preneurs d’otage à continuer, c’est parce que les armateurs payaient pour que leurs équipages et bateaux soit libérés que la piraterie continue en Somalie. Les nations qui ne payent pas de rançons – les Etats Unis, l’Angleterre – ont beaucoup moins d’otages que la France, même si leur sort final est généralement moins heureux.

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