L’ANCIEN PRÉSIDENT a en outre l’art de compliquer les choses. Rien ne l’obligeait à entrer en conflit avec le PS à propos des « Républicains ». Mais il a cru bon de déclarer que les socialistes sont plus socialistes que républicains alors que, dans son parti, on est républicain avant d’être gaulliste ou autre chose. Ce qu’il veut en somme, c’est donner à croire qu’il y a une forme de sectarisme cher les socialistes, ce qui n’est pas tout à fait faux pour les frondeurs et devient tout à fait vrai pour l’extrême gauche. Mais je me demande à quoi sert la polémique. Le mot républicain a été utilisé par d’autres partis, par exemple les Républicains indépendants (RI) qui étaient des centristes. Et bien entendu, il y a l’exemple des Républicains aux États-Unis, le parti de Lincoln, puis de Reagan, puis celui de quelques extrêmes, comme le Tea Party, branche radicale du parti républicain. Il ne reste donc plus aux socialistes qu’à prendre le nom de parti démocrate pour que la France ressemble à l’Amérique.
Juppé n’est pas d’accord.
En d’autres termes, un parti peut prendre le nom qu’il veut. Dans ce monde dangereux et sanglant, nous ne manquons pas d’abjectes dictatures qui se donnent des noms extraordinairement avantageux, comme République démocratique et populaire, c’est-à-dire le lieu de toutes les libertés pour désigner un régime qui n’en respecte aucune. Quelques socialistes raillent d’ailleurs M. Sarkozy en lui contestant les vertus républicaines qu’il serait mal avisé de prôner. L’ancien président s’est créé un problème nouveau qu’il n’avait pas imaginé. Il constate en effet que sa proposition ne fait pas fureur au sein de l’UMP, dont les militants sont hostiles à 57 % à la nouvelle appellation. Alain Juppé, qui commence à entrer en campagne, se déclare hostile au nom de républicain.
Un pas facile à franchir.
On dirait que cette affaire n’a aucune importance si on ne devinait d’abord que M. Sarkozy risque de devoir imposer son idée à ceux qui lui sont le plus dévoués et si la polémique avec la gauche ne recouvrait ensuite quelques intentions politiques qui apparaissent clairement. Nicolas Sarkozy n’a pas pensé à ce nom en pensant au PS, mais pour bien distinguer l’UMP du Front national, lequel se moquerait du monde s’il se disait républicain. Il s’agit d’une alerte lancée à l’électorat, de moins en moins hésitant à choisir le Front et de plus en plus content de le faire savoir publiquement. Le message, en quelque sorte, est le suivant : vous pouvez être contre l’immigration, pour l’identité nationale et même contre l’euro, mais pouvez-vous vous couvrir de honte en renonçant aux principes républicains ? De là à ce que Marine Le Pen décide de dire que « plus républicaine que moi, tu meurs », le pas est facile à franchir.
Car on peut se déclarer républicain sans respecter aucun des principes fondamentaux qui sont directement liés à la République. On peut aussi se présenter comme démocrate et refuser d’accorder certaines libertés à ses compatriotes. On peut même se dire socialiste et mettre en oeuvre une politique de l’offre, remplacer un Montebourg étatiste par un Macron libéral, préférer la compétitivité des entreprises au travail aidé, coopérer avec la « finance » après s’est présenté comme son ennemi. La vérité est que les mots n’ont plus nécessairement le sens qu’ils avaient jadis et que, surtout dans les partis, ils peuvent servir de paravent à des projets troubles incompatibles avec la République et la démocratie.
RICHARD LISCIA
Est il possible que nous soyons depuis quelques années installés dans une société de pur simulacre?…Pas étonnant alors que ceux qui prétendent en prendre le contre-pied soient si bien considérés…Mais qui croire au fond?
Les Français veulent des faits et non des mots. Vouloir nous faire croire que tout va changer, en jouant sur la symbolique dont tout le monde se contrefiche, c’est de la politique à la papa. Je ne dirai pas de quel papa il s’agit bien sûr, car il n’est pas question de faire de l’humour sarcastique et désobligeant vis-à-vis de Nicolas Sarkozy. Mais tout de même, cette façon de rebaptiser le parti rappelle les idéologies totalitaires. On peut citer également les communistes des années 70-80 (cf l’UNEF-Renouveau, puis ex-Renouveau ou le PCF avec les refondateurs). Il ferait mieux d’élaborer une stratégie laborieuse de travail sur le fond, sur ce dont le pays a besoin car, à prendre les électeurs pour des benêts, il risque d’avoir des surprises. Comme cela a déjà été évoqué, les grands leaders charismatiques qui font avancer le monde sur des grandes idées ne peuvent plus exister dans un monde aussi complexe.
C’est vrai, les actes sont plus importants que les mots, sauf quand/si les mots sont eux-mêmes des actes. Dans cette optique, les symboles visuels et verbaux ont, je crois, un impact. Et il convient donc de dénoncer les actes symboliques quand ils sont malhonnêtes.
Pour ma part je me livre à une analyse des symboles politiques. Là:
https://texasmiles.wordpress.com/2015/04/27/logopol_ii/
Vous verrez qu’utiliser un symbole plutôt qu’un autre est loin d’être indifférent.