Sarkozy perd une manche

Pourra-t-il se présenter ? (Photo AFP)

Pourra-t-il se présenter ?
(Photo AFP)

Les attentats de Bruxelles ont occulté une décision de la cour de Cassation qui a validé hier les écoutes téléphoniques dont Nicolas Sarkozy et son avocat ont fait l’objet. Les juges Claire Thépaut et Patricia Simon peuvent maintenant décider un non-lieu ou un renvoi en correctionnelle de l’ancien président, accusé d’avoir voulu se renseigner sur l’évolution d’un autre dossier.

M. SARKOZY peut avoir quelques raisons d’en vouloir à la justice de son pays. Pour la majorité des juristes, il semble tout à fait incongru que les conversations, fussent-elles téléphoniques, entre un justiciable et son avocat, soient écoutées. C’est une violation des droits élémentaires des citoyens et une atteinte à la profession d’avocat. M. Sarkozy envisagerait d’aller devant la Cour européenne de justice. En attendant, une nouvelle menace judiciaire pèse sur lui, après sa mise en examen dans l’affaire Bygmalion, sur le financement de la campagne de 2012, qui apparaît comme beaucoup plus sérieuse que ce que reprochent les juges Thépault et Simon à M. Sarkozy. L’imbroglio dans lequel se débat l’ex-président, qui doit répondre de ses actes dans plusieurs affaires, par exemple celle des sondages de l’Élysée, complique énormément sa campagne pour l’élection présidentielle en 2017. Un procès qui aurait lieu dans les mois qui viennent compromettrait ses chances s’il ne les détruisait pas.

Une candidature mal partie.

On ne sait pas trop si Nicolas Sarkozy veut se faire élire pour échapper à la justice ou pour effacer son échec de 2012. Mais dans tous les cas de figure, sa candidature est mal partie. Non seulement un procès ou, pire, une condamnation, la rendrait illégitime et l’obligerait à se retirer de la course, mais, même s’il parvient à s’extirper des multiples poursuites dont il fait l’objet, il n’est plus du tout le candidat naturel de la droite. À mesure que l’on se rapproche des échéances électorales, on constate que sa popularité diminue face à Alain Juppé, y compris dans le noyau dur des militants des Républicains. Les sondages montrent en outre qu’il ne battrait les candidats de gauche ou de l’extrême droite qu’avec une marge plus étroite que celle de M. Juppé. En tant que président des Républicains, M. Sarkozy a laissé l’UDI, parti regroupant des mouvements centristes, prendre le large et envisager de présenter son propre candidat, alors que le président de l’UDI, Jean-Christophe Lagarde, demandait que soient définies les conditions d’une candidature unique (qu’il entendait monnayer en obtenant un maximum d’investitures aux législatives, ce qui, certes, était prématuré).

Le soupçon du peuple.

Il pèse sur les élections de 2017 un soupçon populaire dont tous les partis doivent tenir compte : les Français sont allergiques à l’idée d’une élection présidentielle où ils auraient à choisir entre les mêmes candidats qu’en 2012. Une bataille Hollande-Sarkozy-Marine Le Pen serait un remake du film joué il y a quatre ans et c’est valable pour le président en exercice (un peu moins que pour la présidente du FN, seule à incarner son parti d’une manière indiscutable). En même temps, les candidatures de François Hollande et de Nicolas Sarkozy ne sont pas certaines. Le président de la République s’est engagé à ne pas se présenter s’il ne parvient pas à inverser la courbe du chômage. M. Sarkozy ne s’est pas encore déclaré, un peu comme s’il se donnait l’occasion de se retirer de la course si la conjonction de sa popularité insuffisante et de ses démêlés avec la justice rendait sa campagne impossible. Mais il n’abandonnera jamais la course sous le prétexte qu’on l’a déjà vu deux fois en lice.
Si M. Sarkozy ne souhaitait que la victoire de son camp, il se démettrait immédiatement et donnerait son soutien à Alain Juppé, dont la popularité devance, et de loin, celle des autres candidats de la droite. L’ex-président part en effet avec trop de handicaps : il n’est plus le héros qu’il fut de la droite, il est mêlé à plusieurs affaires judiciaires qui font de lui un candidat très fragile, il a visiblement des difficultés à s’imposer comme le chef des Républicains et son discours a moins de portée sur les militants que naguère. On n’ose trop lui recommander de renoncer, sachant ce qu’il fait des conseils.

RICHARD LISCIA

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