Ah, ces salaires de patron !

Tavares a sauvé des emplois (Photo AFP)

Tavares a sauvé des emplois
(Photo AFP)

Le P-DG de PSA, Carlos Tavares, a obtenu pour 2015 un salaire composite d’un montant de 5,24 millions d’euros, ce qui fait hurler les syndicats et l’État, actionnaire minoritaire qui n’a pu s’opposer à ce montant. En 2014, M. Tavares avait reçu 2,75 millions d’euros.

M. TAVARES n’est pas à plaindre ; pour leur part, les ouvriers de Peugeot-Citroën ont reçu une prime individuelle de 2000 euros. Mais cette prime n’a été rendue possible que par le redressement de PSA qui, l’an dernier, a engrangé un bénéfice de 1,2 milliard alors que, deux ans auparavant, la société était pratiquement en faillite et n’a pu être sauvée que par un investissement chinois et une participation de l’État. On se souvient que Peugeot a dû faire des économies drastiques, notamment avec la fermeture du site d’Aulnay. Mais il faut reconnaître que le P-DG de PSA a réussi à redresser la société et que, sans les efforts qu’il a fournis, c’est la totalité de l’emploi chez Peugeot-Citroën qui était menacée.

Levée de boucliers.

Les syndicats ne sont pas prêts à lui reconnaître ce mérite, qui réclament une réduction de sa compensation financière. Laquelle est énorme pour un seul homme mais minime par rapport aux emplois sauvés et aux bénéfices de l’entreprise. Bref, M. Tavares a du talent et le talent n’a pas de prix. Et tant qu’on ne se convaincra pas en France qu’il faut le rémunérer, on risquera de placer la médiocrité à la tête des entreprises avec toutes les conséquences dommageables que l’on peut imaginer. M. Tavares, au demeurant, n’est pas le patron le mieux payé de France et il est largement distancé par Carlos Ghosn, P-DG de Renault, dont la rémunération totale pour 2015 a atteint 7,22 millions d’euros. Il est vrai que l’automobile a connu une conjoncture exceptionnelle l’année dernière et qu’il est bien difficile de faire la part de la qualité du management et celle du cycle économique dans le brillant redressement de l’automobile française, naguère sinistrée.

Pas de morale dans le business.

L’État était hostile au montant accordé à Carlos Tavares, mais il n’a pas réussi à influencer la décision du conseil d’administration de PSA. De la même manière, il s’est opposé à la rémunération totale accordée à Carlos Ghosn, mais le CA a voté à 58 % en faveur du P-DG de Renault. Les 5 millions de M. Tavares ne pèsent pas lourd dans le 1,2 milliard de bénéfice et, après tout, il y a des artistes et des sportifs qui gagnent plus que lui, bien que leur activité n’entraîne pas le maintien ou la création d’emplois. Il demeure que PSA ne s’en serait pas sorti s’il n’avait licencié les ouvriers d’Aulnay et que, en donnant un salaire plus modeste à M. Tavares, on pouvait peut-être créer quelques nouveaux emplois. Mais il s’agit de savoir si l’économie d’entreprise obéit à des critères moraux ou à des cycles successifs de licenciements et d’embauches. Le patronat n’hésite jamais à faire valoir que si une entreprise veut un homme ou une femme de talent, elle doit en payer le prix. Il est vrai que si M. Tavares n’est pas satisfait de la récompense donnée à ses efforts, il peut toujours aller voir ailleurs dans un monde où les redressements aussi spectaculaires que celui de PSA sont rares. La différence entre un P-DG et un ouvrier, c’est la vision de l’entreprise, sans laquelle les progrès n’existent pas. Le P-DG qui réussit est lui aussi un agent social dans la mesure où, dans l’économie de marché, le recrutement dépend des résultats de la société.

RICHARD LISCIA

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