Le mal est fait

Une réunion sur les transports à Matignon samedi dernier (Photo AFP)

Une réunion sur les transports à Matignon samedi dernier
(Photo AFP)

Personne ne peut dire comment cette crise sociale si aiguë va se terminer, mais une chose est sûre : elle a déjà des conséquences très négatives pour l’économie et la réputation de la France.

PENDANT qu’argumentent ceux qui, dans les syndicats et à la gauche du PS, sont opposés à la loi El Khomri, la presse étrangère déverse sur nous des tombereaux de quolibets. En Europe et ailleurs, l’incapacité de la France à adopter les réformes économiques et sociales qui sont appliquées depuis déjà des années partout ailleurs est incompréhensible. Les commentateurs étrangers découvrent la spécificité du caractère national français, frondeur, râleur, intolérant au changement. S’il ne s’agissait que de railleries, ce ne serait pas grave. Nous pourrions adresser aux autres peuples nos propres sarcasmes et ils ne seraient pas moins justifiés. Mais c’est la réputation française qui est en cause ; elle n’est pas bonne, ce qui explique que les investisseurs viennent chez nous moins volontiers qu’ailleurs, comme le démontre une étude relative à l’année 2015.

Une crise interminable.

De la même manière, la crise n’est pas seulement violente, elle est interminable. Elle provoque des difficultés qui se retrouvent dans tous les secteurs de l’activité, industrie, distribution, tourisme, commerce. Il fallait se hâter de réparer les dommages causés par le terrorisme, nous avons fait exactement l’inverse, en donnant du conflit déclenché par la loi travail une image désastreuse. Le désordre n’est pas le meilleur vecteur de l’économie, surtout quand il dure. Les annulations de séjour en France sont nombreuses. L’approvisionnement des commerçants est aléatoire. Les livraisons de carburant se sont améliorées, mais les nouvelles grèves, parfois indépendantes de la loi El Khomri, à la SNCF, à la RATP, et dans le transport aérien vont finir par amputer le produit intérieur brut et créer un chômage supplémentaire.

Erreurs tactiques.

La logique qui a conduit à cette énorme bataille entre les pouvoirs publics d’une part, les syndicats et les opposants au projet d’autre part, restera un mystère aux yeux des historiens. Beaucoup des jeunes qui se sont insurgés contre le projet devaient en être les principaux bénéficiaires, ce que, à ce jour, ils n’ont toujours pas compris. Si la CGT avait des intentions plus politiques que sociales, comment se fait-il que le gouvernement n’en ait rien su et pourquoi, s’il l’a su, n’a-t-il pas manoeuvré avec plus de souplesse ? Si l’exécutif était au pied du mur et ne pouvait plus reculer parce qu’il avait déjà cédé sur la déchéance de nationalité, pourquoi la CGT a-t-elle cru nécessaire de placer le gouvernement dans une situation telle qu’il ne pouvait s’en sortir qu’en étant humilié ?
Nous pouvons rebondir si le gouvernement réussit à mettre un terme rapide à la crise. Nous pouvons compenser une baisse du PIB au deuxième trimestre par une activité plus forte au troisième trimestre. Mais offrons de notre pays un tableau où le désordre le dispute à l’incohérence. Nous n’avons pas craint de sombrer dans le ridicule en faisant d’une loi mal expliquée, rédigée avec une concertation insuffisante, remaniée de manière à ce qu’elle perde une grande partie de son efficacité une pomme de discorde nationale qui plonge dans la stupéfaction ceux qui nous observent depuis l’étranger. Il n’y vraiment pas de quoi se réjouir.

RICHARD LISCIA

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Une réponse à Le mal est fait

  1. Justy dit :

    Retrait de la loi travail et tout rentrera dans l’ordre. Ce que pensent les médias étrangers ne nous intéresse pas. Bien sûr qu’ils ne feront pas de cadeau car, avec les puissants, c’est marche ou crève. Mais le peuple français n’est pas le seul peuple à en avoir ras-le-bol.

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