Sarkozy : le retour

Pas de problème avec les concombres (Photo AFP)

Pas de problème avec les concombres
(Photo AFP)

Nicolas Sarkozy bénéficie d’un phénomène qui se produit souvent dans les campagnes électorales : il a été à un niveau très bas dans les sondages, mais sa cote remonte rapidement depuis quelques semaines et il n’est plus qu’à sept points de son principal concurrent, Alain Juppé. Du coup, sa candidature, pas encore officiellement annoncée, devient très crédible.

ON NE SAURAIT nier à l’ancien président de la République un flair politique remarquable. Il ne s’est jamais laissé intimider par des sondages qui, jusqu’à il y a quelques semaines encore, ne lui accordaient aucune chance. Il a toujours cru à son étoile. Il s’est montré infatigable, en occupant le devant de la scène de toutes les manières médiatiques possibles, cumulant des discours sur le fond dans la presse écrite, radiodiffusée et télévisée. Sa stratégie n’est pas secrète : il continue à solliciter les électeurs du Front national, ce qui, par exemple, l’a conduit à proposer, au sujet du Brexit, une analyse qui insiste beaucoup plus sur les réformes structurelles à accomplir au sein de l’Union européenne que sur le mauvais coup que nous ont infligé les Anglais et qu’ils ont infligé à eux-mêmes. Il exige une réforme du traité de Schengen qui, de toute évidence, ne peut rester en l’état puisqu’il est incapable de régler la crise de l’immigration ; mais il le fait avec l’espoir, toujours tenace chez lui, de prendre des suffrages au Front national.

Des vues identitaires.

Sur tout ce qui concerne l’Europe, il expose des vues identitaires incompatibles avec celles d’Angela Merkel. Il est vrai que la chancelière a inauguré seule une politique généreuse à l’égard des immigrés, puis qu’elle a conclu seule un accord avec la Turquie pour endiguer une immigration qu’elle venait d’appeler de ses voeux ; il est vrai que les contradictions allemandes soulignent la nécessité d’une politique qui ne soit plus improvisée. Nicolas Sarkozy a donc fait de l’identité, celle-là même qui explique au moins en partie le Brexit, son cheval de bataille électoral, ce en quoi il ne diffère guère du Sarkozy de 2012. Je crois qu’il fait fausse route en essayant de singer le FN, mais le pire, c’est que le discours identitaire est incompatible avec l’intégration européenne, de sorte que le discours de M. Sarkozy, vaguement teinté d’euroscepticisme, devient dangereux. Il en est encore à critiquer les normes européennes sur la forme des concombres et des bananes, alors que ces normes ont été abandonnées.

L’Union européenne doit se réformer.

M. Sarkozy dira qu’il veut changer l’Europe, non la désintégrer. Il est indéniable que l’élargissement à 28 est excessif, mais ça, même Alain Juppé le reconnaît. Il est indéniable que trop de pays, notamment à l’Est, souhaitent n’être dans l’Union que pour des avantages financiers et commerciaux, mais pas pour respecter les règles démocratiques qu’ils sont tenus d’appliquer. Il est indéniable que la construction européenne n’a pas empêché l’aggravation des inégalités causée par la mondialisation, que les lobbies sont trop influents à Bruxelles, que la bureaucratie l’emporte sur la vision de l’avenir, que l’intégration fiscale et sociale est trop faible. Mais sur ces points, M. Sarkozy ne dit rien parce qu’il sait que tout discours technique est inaudible et que, à l’idéal européen, les europhobes opposent la dégradation de leur vie personnelle. Sans vouloir admettre que la baisse de leur niveau de vie n’est due ni à l’UE ni à l’euro, mais à la crise de 2008 que chacun des pays de l’UE ne peut vaincre qu’en adoptant des réformes économiques et sociales qui sont combattues parfois, et surtout en France, avec férocité.
Ou bien M. Sarkozy tient ce discours certes compliqué mais utile, ou bien M. Juppé qui dit les choses sans une once de démagogie, est un meilleur candidat que lui. Après quoi, les caprices de l’électorat décideront. Mais ceux qui voteront à droite l’an prochain doivent savoir si l’exposé sur les concombres peut remplacer celui qui concerne les réformes.

RICHARD LISCIA

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Une réponse à Sarkozy : le retour

  1. OLIVIER COMTE dit :

    L’ OTAN est le bras armé des Etats Unis. Elle a son utilité car elle nous permet d’espionner nos amis américains qui ont les moyens de nous espionner sans cette remarquable organisation, comme on dit dans INDISCREET. Vous avez peut être remarqué que l’UE est le bras économique des Etats Unis et que cette remarquable organisation économique n’a pu qu’amplifier la crise financière offerte par les mêmes amis Américains. Vos réformes économiques et sociales sont celles voulues par l’UE. Nous sommes vraiment en famille.

    Ce mois de juillet Liscia m’a fait vraiment plaisir. Je vous en remercie.

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