Cazeneuve l’indispensable

Un homme pour une seule saison (Photo AFP)

Un homme pour une seule saison
(Photo AFP)

Bernard Cazeneuve prononce cet après-midi son discours de politique générale à l’Assemblée nationale. De partout, des voix s’élèvent pour tourner en dérision la brièveté du temps qu’il a pour gouverner et l’immobilité forcée de son équipe.

UN BON démocrate ne saurait rejoindre le concert des critiques. Le ferveur partisane ne doit pas conduire à une mise en cause systématique du pouvoir. Car le pays, quoi qu’en disent les spécialistes de l’opposition forcenée, a bel et bien besoin d’être dirigé. Il est faux
de présenter le gouvernement Cazeneuve comme celui qui expédiera les affaires courantes. Certes, il n’a plus de réformes à proposer, mais c’est préférable parce que, à cinq mois des élections générales, il ne doit pas prétendre engager des changements qui ne représenteraient pas la majorité. Mais, plus que jamais, face aux menaces de toutes sortes qui pèsent sur la France, il nous faut un chef du gouvernement capable de gérer les crises. Personne ne peut nier que M. Cazeneuve, ex-ministre de l’Intérieur, populaire et inébranlable, est taillé pour la tâche.

Un désir stérile.

Le désir, à l’extrême droite et à l’extrême gauche, d’enfoncer un peu plus une gauche divisée, dotée d’une pléthore de candidats, déboussolée au point de tenir des discours contradictoires ou incohérents, est stérile. Nous disposons d’institutions solides qui ne permettent pas que l’on s’empare du pouvoir avant l’heure. Cette éventualité serait-elle prévue que les partis d’opposition seraient bien embarrassés. Ils ne souhaitent pas occuper l’Élysée ou Matignon car ils ne sont pas prêts. Dans ces conditions, pourquoi poursuivre inutilement la guérilla contre le gouvernement ? Si l’action politique était enfin libérée de ses hypocrisies et de ses propos de façade, la formation du gouvernement Cazeneuve serait largement approuvée, car elle est indispensable à la bonne marche du pays, fût-ce pendant cinq mois seulement, mais, comme le dit le nouveau Premier ministre, cinq mois qui peuvent compter triple, cinq mois pendant lesquels nous ne pouvons pas nous payer le luxe d’une vacance du pouvoir, cinq mois où se produiront encore des événements que nul ne peut prévoir.

Jusqu’au dernier jour.

Avec la décision du président de la République de renoncer à son second mandat, nous avons assisté à un acte qui n’a pas de précédent dans la Vè République et à une sortie dans la dignité. Ce qui ne veut pas dire que le temps électoral, déjà bien long dans le cadre d’un mandat de cinq ans seulement, doive supprimer le temps gouvernemental. M. Hollande, qui pourrait être amer, las, écoeuré, entend gouverner jusqu’au dernier jour. Personne n’a le droit de l’en priver, et encore moins la légitimité pour le faire. La France, dans les mois qui viennent, doit être vigilante face à un terrorisme dont chacun sait qu’il n’a pas désarmé ; à une Europe divisée qui doit engager des négociations sur le Brexit ; à des guerres au Proche-Orient ; au rôle parfois pervers que joue la Russie ; à une Amérique plongée dans un changement bien plus profond et complexe que ses électeurs l’imaginaient ; aux besoins d’une population française qui, en attendant les changements promis, lutte contre les difficultés économiques et sociales.
La bonne attitude électorale ne consiste pas à attaquer un gouvernement qui a pour unique ambition de servir l’intérêt général et ne saurait imprimer durablement sa marque, compte tenu du temps qui lui est imparti. Elle consiste à défendre des programmes capables d’écarter les aventures auxquelles nous convient les extrêmes.

RICHARD LISCIA

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2 réponses à Cazeneuve l’indispensable

  1. Elie Arié dit :

    On peut se demander pourquoi Hollande ne profite pas des cinq mois qui lui restent pour faire un référendum sur tout ce que les parlementaires ne voteront jamais : non-cumul absolu des mandats, suppression de la réserve parlementaire, fin de l’irresponsabilité judiciaire absolue du président de la République, limitation à deux mandats à la présidence de la République consécutifs ou pas, réforme (ou suppression?) du Sénat et du Conseil Economique et Social, etc.
    Pour une fois, un référendum ne se transformerait pas, comme c’est l’usage, en vote pro ou anti celui qui le propose (« Moi ou le chaos ») , puisque Hollande quittera le pouvoir dans cinq mois.quel qu’en soit le résultat.

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