Emploi : trop tard pour Hollande

L'embellie de dernière minute (Photo AFP)

L’embellie de dernière minute
(Photo AFP)

Ce n’est pas la moindre des ironies que la baisse du chômage en France se confirme pour le troisième mois consécutif alors que François Hollande, qui en avait fait la condition unique de sa présence aux élections de 2017, a déjà renoncé à se présenter.

IL EST VRAI que, dans ce domaine, les apparences sont trompeuses, la réalité insaisissable. La situation ne s’est pas améliorée pour les seniors sans emploi, dont le nombre a augmenté, ni pour ceux qui disposent d’un travail à temps partiel mais ne parviennent pas à le transformer en travail à plein temps. En outre, le bilan du quinquennat est accablant pour le président : au moins 600 000 chômeurs de plus depuis qu’il a été élu. Admettons néanmoins que la tendance à la décrue du chômage est indéniable, même si trois mois sont insuffisants pour que nous soyons définitivement rassurés. Le chef de l’État attribue l’amélioration à la croissance, elle est pourtant fragile. Elle ne dépassera pas 1,2 % cette année et celle de l’an prochain risque d’être réduite par diverses inconnues géopolitiques comme le Brexit et le programme en zigzags de Donald Trump.

Traduction politique improbable.

L’embellie, qui peut être durable, suffira-t-elle à donner à la gauche assez de tonus pour lui permettre de gagner les élections ? Personne ne prendra ce pari. M. Hollande a dit lui-même qu’il ne regrettait pas d’avoir renoncé à un second mandat. Manuel Valls, qui est candidat, devrait donc profiter de la diminution du chômage pour la revendiquer dans le cadre du bilan du gouvernement. Il semble néanmoins que les meilleures nouvelles de l’emploi n’empêcheront pas les Français de tourner une page historique. L’exaspération que leur inspire le gouvernement n’est pas seulement motivée par les statistiques. Quant à l’opposition, elle est dans le déni absolu des chiffres, comme s’il n’était pas possible de reconnaître les faits sans perdre les élections. C’est le traitement de la crise par les emplois aidés qui explique au moins une partie de la diminution du chômage. Il suffisait que la droite le souligne en montrant qu’une telle politique, si elle est généralisée, est affreusement coûteuse et peuple le monde du travail de salariés assistés par l’État. Ce ne sont pas du tout les orientations qui conduisent à terme au retour au plein emploi.

Nous n’avons rien prouvé.

M. Hollande, au demeurant, doit se souvenir qu’il attendait il y a trois ans les résultats dont il bénéficie seulement aujourd’hui. Observateur attentif des cycles économiques, il croyait dur comme fer que la crise de 2008 devait logiquement aboutir, tôt ou tard, à un renversement de la tendance. Son attitude était obsolète, elle reposait sur des notions que divers changements, comme la mondialisation, a balayées. Elle indique en outre qu’il ne croit pas beaucoup au rôle de l’intervention des pouvoirs publics dans le comportement de l’économie, ce qui est surprenant pour un socialiste. Il n’aurait pas eu tout à fait tort dans un cycle normal. Mais il n’y a plus de cycles normaux et le défi consiste justement à inventer de nouvelles techniques de gestion capables d’atténuer les conséquences de la concurrence effrénée de l’étranger. Enfin, l’état de la France est mauvais parce qu’il faut le comparer à celui de divers pays, notamment européens, qui vont bien mieux que nous. Nous n’avons rien prouvé, ni que nous maîtrisons notre dette nationale, ni que nos budgets sont à l’équilibre, ni que nous avons une croissance égale à celle de nos voisins, ni que nous allons vivement résorber l’énorme volet de chômage qui paralyse notre économie.

RICHARD LISCIA

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Une réponse à Emploi : trop tard pour Hollande

  1. Elie Arié dit :

    Un système de protection sociale élevé, comme celui que nous avons, a un double effet contraire:
    -il amortit les effets des grandes crises financières (comme celle de 2008), que nous avons mieux supportée que d’autres, car il maintient un pouvoir d’achat élevé dans la population,
    -il ralentit les effets de la reprise économique lorsque la crise est presque terminée, et nous avons moins profité que d’autres pays de  » l’alignement favorable des planètes » (euro faible, prix du pétrole bas, taux d’intérêt quasi-nuls, voire négatifs.)

    Mais il reste très fragile, car il est financé par les emprunts: et le jour où les taux d’intérêt redeviendront élevés, ce qui semble être la nouvelle politique de la FED….

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