Caracas : le pouvoir aux abois

Le triomphe de Maduro
(Photo AFP)

Il est difficile de sous-estimer la ténacité d’un homme, Nicolas Maduro, président du Venezuela, qui a réussi à inventer tous les stratagèmes pour rester accroché au pouvoir en dépit d’une opposition forte, permanente et au moins aussi tenace que lui.

M. MADURO a organisé des élections pour former une Assemblée constituante. Contrairement à celle qui est en place et a largement discrédité le successeur d’Hugo Chavez, mort il y a quatre ans, la constituante sera chargée, nul ne l’ignore, de placer le peuple vénézuélien sous le joug d’une dictature. L’impopularité de Maduro n’est pas à démontrer mais il garde à ses côtés une fraction non négligeable de la population. Quarante deux pour cent des Vénézuéliens ont participé au vote pour la constituante, ce qui permet à Maduro de crier victoire : sa présidence n’est faite que de vocables triomphalistes alors que son pays sombre dans une misère noire. Mais la vérité est que la moitié au moins des citoyens sont hostiles au président en place et réclament son départ. Ils n’ont pas voté. Ils ont manifesté, souvent de manière violente, et, depuis plusieurs mois, les émeutes et d’échauffourées avec un service d’ordre implacable se sont multipliées ; on ne compte plus les morts.

Une imposture.

La « révolution bolivarienne », tant voulue par Chavez et tant estimée par Jean-Luc Mélenchon, n’est donc qu’une imposture morale, politique, économique et institutionnelle. Au Venezuela, la seule recette de l’État, c’est le pétrole. Les structures du pays n’ont pas résisté à la baisse de l’or noir. Inflation galopante, paupérisation des classes déjà pauvres, régime autoritaire et violent, la prétendue révolution est surtout un prétexte pour refuser au peuple toute alternative politique. Il en va ainsi des gouvernements qui refusent de se soumettre au verdict des urnes à intervalles réguliers. M. Maduro a mis au point un système qui ne donne la parole qu’à ses affidés. Ce genre de tour de passe-passe est infailliblement le produit d’une situation désespérée. Mais les partisans de Maduro existent et ils lui accordent massivement leurs suffrages parce qu’ils sont tous les chouchous d’une révolution qui a financé les foyers les plus modestess en leur offrant un logement et des avantages sociaux.

Une faillite.

Ce qui explique la faillite économique du Venezuela : une dépense sociale que ne compensent plus les recettes du pétrole. Autant dire, si l’on note tout ce qui divise la population, qu’il existe là-bas cinquante nuances de gris et qu’il faut éviter les jugements manichéens. Mais au moins Chavez avait-il le souffle oratoire des démagogues. Maduro, lui, n’a rien pour plaire. Il n’est déterminé que par sa volonté de rester au pouvoir et, à la déréliction d’une nation qui aurait pu être riche, il ajoute le ridicule dans lequel le plonge son ignorance crasse des principes démocratiques et du fonctionnement des institutions.
Les opposants à Maduro ne peuvent nourrir d’espoir que dans une intervention internationale. Nombreux sont les pays, notamment les voisins latino-maéricains du Venezuela, qui ont condamné ces élections scélérates. Mais la pression morale ne semble pas suffire. Dans son lent retour à la guerre froide et en dépit de son abandon du marxisme, la Russie est pratiquement la seule à soutenir le gouvernement de Maduro, comme si la vision de Poutine se limitait au renforcement de tout ce qui, dans le monde, combat le modèle de la démocratie parlementaire. Les péripéties d’une relation très détériorée entre Vladimir Poutine et Donald Trump ne vont pas faciliter l’émergence d’une solution négociée au Venezuela. Cependant, la détermination des dissidents vénézuéliens est immense. La guerre civile est proche, et, malheureusement, aucune influence extérieure ne semble capable de ramener Maduro à la raison.

RICHARD LISCIA

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2 réponses à Caracas : le pouvoir aux abois

  1. Galex dit :

    « Comparaison n’est pas raison ». Mais les strates électorales vues en pourcentages et le débat parlementaire endeuillé par une majorité artificielle me laissent confus, ici et maintenant. Suivez mon regard.

  2. Eschyle 49 dit :

    Le cas du Venezuela est très complexe , car la monnaie de compte est encore le dollar , et il est impossible de trouver des informations fiables . Ce qui est certain , c’est que Chavez , qui voulait s’affranchir du dollar , a été éliminé , comme Margerie , Khadafi , Saddam Hussein , etc . Ce qui est aussi certain , c’est que si l’Etat profond transforme le Venezuela en dominion, Cuba, dont le solde émigration – immigration, ne restera pas inerte.

    Réponse
    L’avènement d’une dictature ne me semble « un cas complexe ».
    R.L.

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