Une tragédie routière

La carcasse du bus
(Photo AFP)

Le bilan de la collision, sur un passage à niveau, entre un train et un bus scolaire près de Millas (Pyrénées orientales) indique cinq décès et 18 blessés, dont 14 enfants. Certains cas sont très graves. C’est une tragédie nationale. Le gouvernement a pris toutes les dispositions pour apporter son aide psychologique et morale aux familles. Plusieurs enquêtes sont en cours.

LE CHOC est insupportable pour les familles et pour tous nos concitoyens. Un enfant qui va à l’école ou en revient dans un bus scolaire est censé être protégé. L’éducation nationale, c’est aussi la sécurité. La conductrice du bus, elle-même sérieusement blessée, n’a pas encore pu  être interrogée, mais elle a fait l’objet de tests toxicologiques et son alcoolémie a été mesurée. Le conducteur du train en revanche a pu donner sa version des faits. Pour le moment, la survenue de l’accident est incompréhensible. Le passage à niveau n’était pas du type « accidentogène », c’est-à-dire qu’il répondait aux normes de sécurité les plus strictes, avec une approche aménagée du croisement, des barrières et des feux clignotants rouges. Une barrière a été retrouvée brisée, mais cela ne prouve rien. Elle a pu être démolie par l’accident, ce qui exclurait la thèse, improbable, du franchissement intempestif du passage à niveau.

De l’émotion à la colère.

La compassion nationale laissera bientôt la place à la colère. Les discours éplorés du gouvernement n’empêcheront pas les Français de se demander pourquoi il y a encore 15 000 passages à niveau en France qui ne sont pas sécurisés par un pont ou un tunnel. La réponse est claire : il faut des moyens énormes pour empêcher qu’un train croise une route. On reconstruit six à sept passages à niveau en France chaque année, mais l’élimination de tous les croisements rail-route coûterait une somme évaluée à au moins cent milliards d’euros. On a déjà accompli des progrès considérable, en réduisant le nombre des passages à niveau de plus de 30 000 à 15 000 en quelques décennies. Pour une famille, la vie d’un enfant vaut le prix, aussi élevé soit-il, de l’élimination des endroits dangereux. Hélas, même si l’État envisageait d’accélérer le chantier, il toucherait rapidement les limites budgétaires de l’entreprise.

La recherche d’un coupable.

La France est en deuil, mais ce n’est certainement pas la première fois que nous sommes confrontés à un drame du même genre. Le plus grave, peut-être, est le carambolage qui s’est produit le 31 juillet 1982 sur l’autoroute A6 près de Beaune à 2 heures du matin et qui a causé la mort de 53 personnes dont 44 enfants. L’année dernière, le 11 février, à Rochefort, dans les Charentes-Maritimes, une collision entre un camion et un bus scolaire a entraîné la mort de six adolescents. La veille, un bus scolaire s’est couché à Montbenoît (Doubs) : deux enfants tués. Le 22 juillet 2016, six personnes dont cinq enfants sont tués dans une collision entre un minibus et un poids-lourd à Troyes. Le 7 juin 2008, sept enfants sont tués à Allinges (Haute-Savoie) sur un passage à niveau. D’autres accidents semblables se sont produits en 2000, en 1993 et en 1990.

Les familles des victimes, mais aussi l’opinion publique, seront conduites par la douleur à la recherche d’un coupable. Le conducteur du train et la conductrice du bus seront prématurément désignés, puis l’impuissance des pouvoirs publics à garantir la sécurité des enfants qui vont à l’école, puis l’État ou le système. Personne ne peut répondre à leur émotion par un discours fataliste. Mais personne, non plus, ne peut éliminer 15 000 passages à niveau en quelques années.

RICHARD LISCIA

 

 

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4 réponses à Une tragédie routière

  1. Eve M. dit :

    Plus de 3500 morts par an sur les routes françaises:
    Autre tragédie, plus discrète.
    Interdire une alcoolémie positive serait déjà une courageuse mesure gouvernementale, aucune tolérance n’est admissible en la matière.
    Mais voilà.
    Il paraît que c’est impossible dans notre pays.

    • mathieu dit :

      La différence dans le nombre d’accidents mortels entre alcoolémie <0.5g et alcoolémie nulle n&#039, n’est pas statistiquement significative en France… Ce qui ne suffit pas à recommander de boire un coup avant de prendre le volant.
      signé: un buveur d&#039 ; eau quasi-exclusif.

  2. Aubert dit :

    Certains pays ont des bus scolaires de forme, de taille et de couleur parfaitement reconnaissables.
    La sécurité routière oblige, sous peine de très forte amende, les véhicules circulant dans les deux sens
    de s’arrêter à distance lorsque le bus charge ou décharge des enfants. La signalisation routière en France est insuffisante : les panneaux sont petits et il manque la répétition de l’information, la pré-signalisation lumineuse d’une zone dangereuse. La publicité cache la signalisation routière et détourne l’attention du conducteur. Il n’y a pas que la vitesse, l’alcool, la drogue, l’incapacité physique et mentale qui d’ailleurs sont trop souvent négligés.

  3. JB7 dit :

    Merci pour cet article.
    Pour ma part, j’ignorais totalement le coût réel de tous les travaux nécessaires pour sécuriser tous les passages à niveau.

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