Panique à la bourse

Mario Draghi
(Photo AFP)

Dans le sillon de Wall Street, les bourses mondiales ont lourdement chuté hier et aujourd’hui.  La tendance est encore à la baisse depuis ce matin. Assistons-nous à un début de krach ? Il est probable que les marchés, qui jouent à se faire peur, se ressaisiront. Mais on peut s’attendre à une chute des valeurs sur le long terme.

QU’EST-CE QUI a provoqué cette chute à la fois inattendue et brutale ? La conviction des acteurs que les taux d’intérêt vont repartir à la hausse, ce qu’ils ont commencé à faire il y a plusieurs semaines, et la tendance semble ferme. Les investisseurs sont notamment surpris parce que le marché ne suit pas le calendrier de hausses très progressives, et chaque fois de faible ampleur, mis au point par la Banque fédérale (Fed) des réserves aux États-Unis. Ce qui signifie qu’existe un mouvement des taux à la hausse lancé par des prêteurs qui estiment qu’ils sont trop bas, que cela ne leur convient pas ou que, quoi qu’en pensent les banques centrales, la remontée des taux est irrésistible. Enfin, les salaires américains ont augmenté en moyenne de 2,9 % en 2017, ce qui fait craindre une hausse de l’inflation aux Etats-Unis, laquelle contribuerait elle aussi à la hausse des taux.

Politique de Gribouille.

Que l’on soit boursicoteur ou non ne signifie pas que vous et moi ne sommes pas concernés par une chute de la bourse. Depuis la crise de 2008, le monde en général et la France en particulier ont bénéficié de taux extraordinairement bas et maintenus à ce niveau par les programmes de rachats de créances de la Fed et de la banque centrale européenne (BCE). Aux États-Unis, la Fed a déjà procédé depuis plusieurs trimestres à des hausses de taux de l’ordre de 0,25 %.  Mario Draghi, le flamboyant président de la BCE, n’a pas exprimé la même volonté que la présidente de la Fed, Janet Yellen.  Mais le marché  voit la hausse comme une sorte de fatalité et imite Gribouille en se jetant à l’eau pour ne pas être mouillé.

La hausse des taux permettra sans doute de mieux rémunérer l’épargne privée qui, pratiquement, ne rapporte plus rien. Elle sera plus en phase avec les hausses de prix qui commencent à rejoindre l’objectif des banques centrales, à savoir 2 % par an, ni plus ni moins. Mais elle risque de poser au gouvernement français un sacré problème. Il doit en effet, cette année, emprunter quelque 200 milliards d’euros. Il a bénéficié l’année dernière de taux de l’ordre de 0,70 %. Ils sont déjà passés à un pour cent. Un point de pourcentage supplémentaire représente, sur l’année, une dépense supplémentaire de 4 milliards. Lesquels s’ajouteront au déficit budgétaire et à la dette publique qui se situe à plus de 2 200 milliards. Pour nos dirigeants, la hausse des taux est donc une très mauvaise nouvelle. Elle compliquera la résorption tant promise et tant attendue du déficit budgétaire ; elle montre que le fameux « alignement des planètes » est en train de disparaître. De quoi s’agit-il ? Nous avons eu la chance d’avoir un euro relativement faible, sa parité avec le dollar remonte ; de payer notre pétrole bon marché, le prix du baril atteint maintenant 70 dollars ; d’avoir une inflation nulle, elle augmente. Les bonnes circonstances qui nous ont permis l’an dernier de retrouver un peu de croissance sont en train de disparaître.

La France mal préparée.

Le gouvernement était averti, notamment par la Cour des comptes, qui lui a rappelé sans cesse qu’il devait moins compter sur la croissance pour réduire le déficit budgétaire que sur la diminution des dépenses. Mais l’opinion publique envoie à nos dirigeants le message opposé : elle ne veut pas que soit diminué le nombre de fonctionnaires, que les collectivités locales reçoivent des aides insuffisantes de l’État, elle ne veut pas non plus de la hausse des impôts et des taxes. L’environnement économique et financier est sous tension. Il nous invite à une extrême prudence et à la recherche d’équilibres plus durables. Même si la crise des marchés boursiers n’est qu’une alerte, à court ou moyen terme, les actions surévaluées finiront par baisser. La France n’est pas suffisamment préparée à une crise financière. Elle doit réduire son endettement le plus vite possible. S’il est encore temps.

RICHARD LISCIA

 

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Une réponse à Panique à la bourse

  1. admin dit :

    LL dit :
    Il est logique que les investisseurs se reportent sur le marché obligataire lorsque le taux du bon du trésor américain a 10 ans atteint les 3% (c’est pour très bientôt). Les taux seront supérieurs dans le secteur privé, et le risque bien moindre qu’en bourse. La politique de taux faibles a forcé les épargnants à boursicoter et à absorber une partie du risque du marché financier. Ce n’est pas une situation tenable. On ne peut pas demander aux gens d’épargner et de jouer à la loterie avec leur épargne.

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