L’affaire Hulot

Nicolas Hulot
(Photo AFP)

Nicolas Hulot, ministre de la Transition écologique, fait l’objet d’accusations d’agression sexuelle et de viol dans deux affaires qui ont été examinées à la loupe par un nouvel hebdomadaire, « L’Ebdo ». Le ministre se défend avec force et a obtenu le soutien sans failles du gouvernement.

LA VAGUE de révélations sur le passé sexuel de nombre de célébrités à travers le monde n’a pas épargné le gouvernement qui a maintenant deux cas compliqués sur les bras, celui de M. Hulot et celui de Gérald Darmanin, ministre des Comptes publics. Le public est stupéfait par le nombre exponentiel de ces révélations, mais il se demande aussi, si, dans le lot, il n’y a pas des cas fabriqués de toutes pièces. « L’Ebdo », dirigé par Thierry Mandon, ancien secrétaire d’Etat de François Hollande (y a t-il un concept purement politicien de l’information ?) raconte, en long et en large, une affaire qui remonte à 2008 et a été classée sans suite par le parquet. Il en décrit une autre, celle qui concerne une ancienne collaboratrice de son ex-fondation, qui, elle-même, affirme que Nicolas Hulot est totalement innocent et qu’elle n’a jamais subi ses avances. En conséquence, s’il existe une rumeur et un soupçon sur la conduite de l’actuel ministre, il y a aussi un doute particulièrement fort sur sa culpabilité.

Le vrai et le faux, tout est bon.

Le problème résulte de plusieurs facteurs. Le premier est lié à l’activité d’une presse jeune qui a besoin de se faire connaître. « L’Ebdo », face aux dénégations d’au moins une des deux « victimes » et surtout de M. Hulot, qui lui a accordé un entretien pour déminer l’entreprise de destruction à laquelle le journal se livrait, a jugé tout bon : une rumeur aux conséquences délétères, les démentis, les propos de M. Hulot. Est-ce que cette somme fait progresser la vérité ? Elle est surtout utile à la vente de papier, au sujet d’une histoire qui, étant invérifiable, n’a pas été vérifiée par cette publication. Ce comportement vaut ce qu’il vaut, c’est-à-dire pas cher, puisqu’il place l’intérêt commercial du journal au-dessus de la vie personnelle et familiale du ministre ou, pire, le cynisme au-dessus de l’éthique. Je l’écris ici en toute sérénité sans être capable de dire si M. Hulot est coupable ou non. Car il est clair que, dès lors que la justice et les enquêteurs de « L’Ebdo » en sont au point mort, je n’ai accès pour ma part à aucune preuve allant dans le sens de la culpabilité ou de l’innocence. « L’Ebdo », de son côté, se justifie au nom du journalisme et de la liberté d’expression et, maintenant qu’il est attaqué à son tour, il promet de nouvelles révélations. Cycle infernal.

Un comportement peu professionnel.

Mais de quoi s’agit-il ? Il ne s’agissait pas, pour l’hebdomadaire, d’apporter une vérité fracassante, mais de sortir de la vase du passé des anecdotes croquignolettes susceptibles d’intéresser un large public et peu importaient alors l’atteinte à la vie privée, le coup porté à la présomption d’innocence, et la violation du secret judiciaire.  Parler de deux affaires plus qu’incertaines, ce n’est pas révéler des éléments nouveaux. J’ai dénoncé ce comportement  dans l’affaire Darmanin, je ne me prive pas de le faire dans celle qui nous préoccupe aujourd’hui. Je me suis prononcé à plusieurs reprises pour les droits des femmes, mais il ne faudrait pas que leur juste colère révolutionnaire se transforme en Terreur. On essaie de couper plus de têtes que celles qui le méritent, on sème le désordre dans les institutions, notamment la justice, qui ne sort jamais grandie de ces rumeurs, on tend à paralyser un gouvernement et surtout, on n’a aucune pitié pour un homme qui, s’il n’est pas coupable, subit une torture insupportable. Ce qui me conduit à penser que, même si, en définitive, la justice finissait par trouver un substrat de vérité dans les allégations de « L’Ebdo », ses enquêteurs ne pourraient pas s’enorgueillir d’avoir abattu un membre du gouvernement par leurs contestables méthodes. Ils ont, en quelque sorte, publié leurs articles trop tôt. Ils devaient enquêter davantage. Tous les journalistes ne peuvent pas publier les « Pentagon Papers » ou obtenir, par leur talent, la démission d’un président, comme dans les deux cas mémorables du « New York Times » et du « Washington Post ».

Le cas Hulot est exemplaire des dérives de la société. Une vague salutaire de féminisme se transforme en raz-de-marée qui n’épargne personne, et surtout pas les probables innocents. La concurrence avec les réseaux sociaux pousse les détectives de la presse à aller chercher le scandale là où il n’est pas nécessairement. Sur les laves brûlantes crachées par un volcan rédempteur, on fabrique une vérité alternative qui joue le même rôle que la drogue du toxicomane. Fake news, comme dit Donald Trump. Cette fois, il aurait raison.

RICHARD LISCIA

 

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3 réponses à L’affaire Hulot

  1. Jérôme Lefrançois dit :

    Merci, une fois encore, pour vos écrits.
    Les journalistes de nombreux médias, ces jours-ci, se repaissent de cette « affaire Hulot », ce qui va plaire au peuple de lecteurs (et auditeurs) d’une presse du type d’anciens titres comme « Ici Paris » et « France Dimanche ».
    Non seulement Nicolas Hulot a bénéficié d’un non-lieu en 2008, mais de plus, il a déclaré qu’après avoir été entendu (à sa demande) par les gendarmes lors de cette affaire (je crois en 1997), les gendarmes eux-mêmes ont retenu « l’absence de faits montrant une quelconque culpabilité » de Nicolas Hulot.
    Ce que se gardent bien de dire les journalistes que j’ai entendus ce soir dans ma voiture sur RTL à 18H. C’est tellement mieux de faire courir ce qui ressemble bien à de la diffamation, c’est-à-dire que le classement de cette affaire a eu lieu du fait de l’ancienneté et ne signifie en rien l’absence de faits avérés.
    Il est certain que Nicolas Hulot dérange beaucoup de monde dans la « bien-pensance » actuelle, au moins autant à gauche qu’à droite.
    Les nombreuses hyènes qui aboient depuis quelques jours contre Nicolas Hulot ne vont pas crédibiliser ou renforcer la juste cause des très nombreuses femmes victimes d’abus de pouvoir en tous genres de la part de mâles ayant régressé au stade de primates, ce que je crois que sont tous les mâles coupables de harcèlement (au travail, dans les transports en commun, etc…) voire de violences sexuelles contre des femmes.
    Bien cordialement.

  2. JB7 dit :

    Très belle analyse , qui vous honore !

  3. Chambouleyron dit :

    Hors toute analyse que je serai bien en peine d’argumenter, je m’étonne que M. Hulot soit persona grata dans notre monde médiatico-politique et populaire, aussi faut bien l’écrire. Du temps d’ Ushuaïa période où il a fabriqué cette popularité je me souviens de notre héros pataugeant seul dans les marigots avec des chut-chut alors que des hélicoptères venaient de le déposer in situ.

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