Le malaise de la droite

Il n’imprime pas.
(Photo AFP)

L’élection d’Emmanuel Macron a perturbé  tous les partis politiques, de l’extrême droite à l’extrême gauche. Les Républicains, en choisissant sans hésitation Laurent Wauquiez comme leader, semblaient mieux réagir au grand désordre qui a remplacé l’opposition classique entre droite et gauche. Pourtant, il devient de plus en plus évident que le parti, qui se réunit le 30 juin à Menton, n’est pas certain de la marche à suivre.

M. WAUQUIEZ regroupe autour de lui et de ses idées, notamment le traitement sévère de l’immigration, des hommes et des femmes convaincus, par exemple Eric Ciotti, Eric Woerth, Christian Jacob ou Brice Hortefeux, qui ont une forte expérience, ont eu l’occasion d’exercer le pouvoir et peuvent se présenter comme ceux qui détiennent la compétence face aux jeunes élus de la République en marche. Président de région, ancien ministre, M. Wauquiez se présente comme un homme en adéquation avec les fonctions qu’il exerce et celles auxquelles il aspire. Sa ligne politique, proche de celle de Nicolas Sarkozy, repose sur un renforcement des « valeurs de la droite », ce qui fait de lui, dans le rituel classement des caramels, un dur. Il a fort bien compris le problème de cette décennie, l’immigration, qui épouvante les Français comme d’autres peuples européens, et veut engranger des suffrages en se servant de cette peur. Il met le doigt sur un point stratégique essentiel: c’est sur la question des migrants, clandestins ou non, que se jouent tous les scrutins européens, comme on a pu le voir dans plusieurs pays, dont le Royaume-Uni, l’Allemagne et l’Italie.

Le trouble de l’opposition.

Sa première difficulté est celle qui a marqué le parcours de M. Sarkozy, élu président de la République en 2007 en « siphonnant » les voix du Front national, battu en 2012 avec la même stratégie. La forte présence de l’extrême droite, mouvement désormais susceptible de gouverner la France, le contraint à apporter un plus par rapport à Marine Le Pen. Le durcissement de la position de M. Wauquiez sur l’immigration semble avoir absorbé toute son énergie. Dans les autres dossiers, économiques, sociaux, diplomatiques, il se contente de critiquer chacune des actions du gouvernement, en le marquant à la culotte, si j’ose dire, ce qui n’est pas très original. Ni très utile quand on sait que l’exercice est partagé par ce qu’il reste des socialistes, par les mélenchonistes et par les lepénistes. Le président des LR pourrait dire  que son parti est dans une forme bien meilleure que celles des autres, fracturés par des querelles internes et doutant au fond d’eux-mêmes de la finalité de leur entreprise. L’une des forces du macronisme dont on dit tant de mal aujourd’hui, c’est d’avoir durablement jeté toute la classe politique dans une ornière d’où elle a beaucoup de mal à sortir.

Car Laurent Wauquiez, en dépit de son autorité, qui est grande, ne fait pas le plein des voix de la droite. Les anciens de l’UMP se sont dispersés : les uns ont vite fait de gagner le camp de Macron, celui de l’action politique, et finalement le seul qui bouge vraiment ; d’autres, et ils sont nombreux, ont abandonné la politique ; d’autres enfin sont, comme Christian Estrosi, toujours chez LR, mais ont pris clairement leurs distances ; d’autres, comme Valérie Pécresse et son mouvement bien nommé, « Libres », se tiennent en réserve de la droite et même du pays. La droite, tout entière contenue naguère dans l’UMP, a laissé les centristes de l’UDI retrouver leur autonomie. Le problème est qu’il ne suffit pas de singer Marine Le Pen pour obtenir le ralliement des suffrages du Front. Il faut aussi garder auprès de soi les Républicains modérés, et les centristes,  ceux qui, fascinés par Macron, se demandent encore si la REM n’est pas le parti où le confort intellectuel leur serait assuré. Beaucoup d’électeurs de droite veulent bien qu’on durcisse les conditions de l’immigration, mais sont totalement hostiles à une politique qui nous fâcherait avec l’Europe et  l’euro.

L’homme qui ne sourit pas.

Il appartient à M. Wauquiez de donner des assurances sur ces points à l’ensemble de LR. Il a maintenant assez d’autorité sur le parti pour pouvoir nuancer ses idées. Malheureusement pour lui, les sondages ne sont pas rassurants. Ils montrent en effet qu’il n’apparaît pas comme le chef d’une opposition capable de ravir le pouvoir à M. Macron. Laurent Wauquiez, qui a été plutôt absent de la scène publique ces dernières semaines, n’imprime pas. Pourquoi ? Parce que, quand il tonne contre les divers abus infligés au peuple, il effraie. Parce, pratiquement, il ne sourit jamais. Voilà un homme qui a pour lui la prestance, la culture, le savoir, et qui ne s’en sert jamais, tellement il est convaincu qu’il doit apparaître comme l’anti-Macron absolu. Là où le président feint de n’avoir que des amis, et poursuit une politique sociale dure tout en souriant, là où l’implacable machine de la réforme avance, Laurent Wauquiez, comme la plupart des opposants, ceux qui n’ont pas le pouvoir mais ont une forte dose de rancune, se livre à des actions verbales de guérilla. Dans le genre qui fait peur, Mme Le Pen et M. Mélenchon sont imbattables. M. Wauquiez devrait essayer la détente, la sérénité, l’assurance, la jeunesse, l’ouverture, l’amour des libertés et, surtout, exposer une vision, un projet rationnel et bien huilé.

RICHARD LISCIA

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2 réponses à Le malaise de la droite

  1. Chretien dit :

    Les problèmes pour Macron vont être la CSG et le 80Km/h et plus encore le matraquage fiscal dans la continuité de la gauche (immobilier, essence, 60 milliards d’impôts sur l’automobile, les radars baptisés « mitraillettes fiscales ») .
    Tous les jours on parle d’un nouvel impôt !
    Alors qui ? Mélenchon? Le Pen? Plutôt Maréchal?
    Ou bien une situation à l’italienne au regard de nos dernières élections présidentielles ?

  2. JULIEN dit :

    Bien que je ne partage pas du tout les idées de Laurent Wauquiez, je trouve qu’il a pris une position à droite assez logique. Entre la gauche social-démocrate et la droite dite républicaine, le centre est occupé par la REM. La droite républicaine ne pouvait donc qu’infléchir sa politique vers la droite. Tout à fait d’accord avec votre conclusion : Laurent Wauquiez ne devrait pas jouer autant les méchants.

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