Social : le pavé de Macron

« Un pognon de dingue »
(Photo AFP)

Il va falloir prendre au sérieux la menace qui pèse sur les aides sociales : Emmanuel Macron a prononcé à ce sujet des propos démontrant qu’il veut procéder à leur révision exhaustive.

DECIDEMENT, tout passe par la communication de nos jours. La directrice de la com de l’Elysée, Sibeth Ndiaye, a diffusé une vidéo dans laquelle on voit et on entend le président de la République s’insurger contre les incohérences des aides sociales, énorme budget de l’Etat dont on dit depuis plusieurs semaines qu’il pourrait être amputé de 7 milliards, ce que le Premier ministre s’est hâté de démentir, mais qui n’a pas empêché le chef de l’Etat de revenir à la charge. Il doit faire ce matin un discours à Montpellier sur les aides sociales, et, dans son bureau, il s’est livré à une répétition, filmée par Mme Ndiaye, et  aussitôt livrée à la curiosité publique. Ballon d’essai ou préparation de l’opinion à une mauvaise nouvelle ? En tout cas, Emmanuel Macron n’y est pas allé de main morte.

Un rapport qualité-prix.

« On met un pognon de dingue dans les minima sociaux, a-t-il dit, et les gens ne s’en sortent pas. On doit avoir un truc pour  permettre aux gens de s’en sortir. Par l’éducation. » Et le président d’expliquer qu’il faut mettre de la cohérence dans la dépense publique. Par exemple, il estime que le reste à charge zéro pour les prothèses dentaires ou optiques est une bonne façon de dépenser de l’argent. On trouvera peut-être son langage un peu vulgaire, mais il explicite parfaitement sa pensée. Il veut que l’aide sociale produise de l’émancipation, pas de la stagnation. Il est incontestable que, plus l’Etat distribue de l’argent et plus les récipiendaires se plaignent, plus ils restent au chômage, alors que la France est l’un des pays au monde où le montant des aides sociales est l’un des plus élevés.

Certes, on n’est pas dupe d’une technique de communication qui consiste à roder un discours dans l’opinion avant de le prononcer réellement. Il se trouve qu’Emmanuel Macron fait face à la grogne croissante de nombreux élus d’En Marche ! qui s’inquiètent de ce que la politique économique du gouvernement penche trop à droite. Ce qui a conduit trois économistes français, proches du président (et qui ont contribué à l’élaboration de ses programmes), Philippe Martin, Philippe Aghion et Jean Pisani-Ferry, à publier samedi dernier dans « le Monde » une longue tribune dans laquelle ils lui demandent de rééquilibrer ses mesures en s’inspirant de quelques idées de la gauche. Ce texte traduit, à n’en pas douter, la perplexité de tous ceux qui, au sein de la République en marche, estiment que les décisions de l’exécutif ne vont plus que dans une seule direction, celle de la droite.

Et de droite et de gauche.

Liberté ou égalité ? En France, le souci égalitaire a toujours servi de garde-fou aux mesures libérales. Le phénomène n’est pas nouveau et n’est pas surprenant dans un parti tout neuf qui, dans l’enthousiasme, a accueilli toutes les bonnes volontés avec la confiance contenue dans sa devise : et de droite et de gauche, et en même temps. Voilà que les vieux clivages réapparaissent alors que le pouvoir est confronté à une crise sociale déclenchée par la réforme de la SNCF et alors qu’il s’apprête à engager d’autres réformes encore plus difficiles à accomplir. M. Macron compense les obstacles qu’il rencontre par la vitesse de son action. Là, en ce moment : la réforme de la SNCF va être adoptée demain définitivement par les deux chambres, la loi Elan sur le logement est en discussion, la loi sur l’alimentation aussi, puis on s’attaquera aux chantiers énormes de la retraite et de la formation professionnelle. La liste concise que j’en donne n’est pas exhaustive. Le flux réformiste est si puissant que les élus ahanent sous la charge, que l’opposition ne sait plus où donner de la tête, que les chroniqueurs politiques sont largement dépassés par les connaissances qu’ils sont censés avoir pour pouvoir discuter des réformes méthodiquement.

M. Macron a exposé, dans la vidéo, sa philosophie profonde. Elle n’est pas erronée. Le pays dépense beaucoup en aides sociales pour un maigre résultat. Tout le monde sait cependant que le filet social français rend la vie plus douce à nos compatriotes en temps de crise. En 2008, les Français ont tenu bon parce que Nicolas Sarkozy n’a pas hésité à accroître lourdement le déficit budgétaire pour empêcher que des millions de nos concitoyens soient ruinés par la crise financière mondiale. L’aide sociale coûte cher, mais elle fait de la France un pays relativement privilégié. Même ceux qui paient des impôts pour que d’autres perçoivent leurs minima sociaux devraient être contents de savoir que leur confort n’est pas une île dans un océan de misère.

RICHARD LISCIA

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2 réponses à Social : le pavé de Macron

  1. chrétien dit :

    Le diagnostic est fait depuis longtemps .De la com ! Encore de la com !
    Mais pardon de vous le dire : plus de la moitié des français ne paie pas d’impôts. Les autres attendent du concret et des actes !

    Réponse
    TOUS les Français paient des impôts, tous ne paient pas l’impôt sur le revenu.
    R.L.

  2. Picot dit :

    Nous mettons aussi un pognon dingue dans les salaires de nos ministres, parlementaires, fonctionnaires de l’Assemblée, secrétaires d’Etat, sous-secrétaires d’Etat, conseillers divers, hauts fonctionnaires au placard, postes bidons, députés européens, les retraites mirobolantes de tout ce petit monde, voitures de fonction, etc, etc.. Mais là, curieusement, il n’y a aucun problème.

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