La détermination des États-Unis à tenir tête aux forces djihadistes en Irak et en Syrie n’a d’égale que celle des terroristes. Non seulement la situation au Proche-Orient va encore évoluer, mais on peut s’attendre à un généralisation du conflit provoqué par l’attaque du Hamas en Israël.
EMMANUEL MACRON a beaucoup contribué à la prise de conscience des pays arabes de la gravité de la crise : la question humanitaire devient critique alors que l’armée israélienne encercle Gaza sans y pénétrer ; le Hezbollah menace l’État juif tous les jours par des incursions ; les États-Unis envoient à l’Iran un signal clair avec deux de leurs plus gros porte-avions voguant en Méditerranée orientale. Israël et les Occidentaux ont posé leurs conditions ; elles sont tout aussi humanitaires qu’à Gaza : pas de répit tant que le Hamas n’aura pas rendu tous les otages (il en détient plus de 200).
Les effets de la propagande.
L’atmosphère est empoisonnée en outre par le fanatisme du Hamas et le désir de vengeance d’Israël, pour qui il s’agit moins de transformer une défaite en victoire que de rétablir durablement sa crédibilité militaire. Ce sont des préoccupations légitimes : on sait maintenant ce qu’il en coûte de baisser sa garde. Il demeure que le Hamas a gagné la bataille de la communication, notamment en multipliant au moins par deux le nombre des victimes des bombardements israéliens. L’affaire de l’hôpital de Gaza où 500 personnes auraient péri dans une attaque israélienne n’a été, on en est sûr aujourd’hui, qu’une bulle médiatique : c’est une roquette du Djihad islamique qui s’est abattue sur le parking de l’hôpital.
Créer un État palestinien.
Il semble bien qu’une libération des otages empêcherait l’invasion de Gaza. Macron a apporté une prise de conscience : l’affaire palestinienne n’est pas d’aujourd’hui, elle a 80 ans et même plus, la solution si allègrement écartée par les accords d’Abraham réapparaît ; la création d’un État palestinien après le départ annoncé par Benjamin Netanyahu lui-même et après la destruction du Hamas. Rien ne semble plus caduc et anachronique, mais c’est le seul règlement qui vaille dans cette crise longue et douloureuse.
L’invasion n’est pas sûre.
Israël ne peut laisser impunies les atrocités commises par le Hamas. Chacun des hommes qui ont participé au carnage et aux enlèvements, sera dûment retrouvé et châtié. Les archives de l’espionnage israélien sont pleines d’exemples historiques : tôt ou tard, Israël se venge d’un attentat. Ce qui va dans le sens d’un renoncement à l’invasion qui pose un problème non seulement au peuple palestinien mais aux Israéliens eux-mêmes. Si Netanyahu admet qu’il devra « rendre des comptes après la guerre », il vaut peut-être mieux qu’il n’alourdisse pas son dossier. Le tout dans une atmosphère diplomatique très active dont la France a repris le flambeau.
Le cynisme est contagieux.
Bien entendu, il faut compter avec le camp adverse, qui se nourrit de la souffrance des peuples : l’Iran, qui espère que les accords d’Abraham sont morts-nés (ce qui n’est pas sûr), le Hezbollah, qui fera tout pour élargir le conflit, et surtout la Russie qui a compris que l’attention de l’opinion mondiale s’est détournée de l’Ukraine pour mieux observer la guerre en gestation au Proche-Orient. Ce n’est pas sans une immense surprise que nous assistons à la création d’un front pro-russe, avec le Brésil et l’Inde qui, à ce jour, n’ont rien trouvé à reprocher à Vladimir Poutine. Le cynisme est contagieux. Il fait des émules, il crée des vocations. Autant d’éléments qui soulignent le courage de Macron, Marco Polo de la diplomatie moderne, capable de conjuguer l’histoire et la politique sans chercher à savoir ce que les autres en pensent.
RICHARD LISCIA