La politique du renoncement


Agissez, M. Hollande !
(Photo AFP)

Plusieurs voix se sont exprimées dans le camp de la majorité pour mettre en doute la théorie du « choc de productivité ». Le gouvernement semble de plus en plus séduit par une réindustrialisation fondée sur des techniques innovantes que par le transfert d’une partie des charges sociales des entreprises sur les impôts.

LE GOUVERNEMENT ne semble pas comprendre que le choix entre les deux voies de la réindustrialisation, la baisse des charges et l’innovation, n’existe pas. Elles sont toutes deux nécessaires et se complètent. Elles ne peuvent pas avoir lieu dans le même temps politique. La baisse des charges est immédiate. Elle diminue le coût de nos productions, elle favorise leur exportation et, de ce fait, elle tend à rééquilibrer notre balance commerciale dont le déficit est, à l’heure actuelle, un paramètre plus inquiétant que l’endettement. L’innovation ne peut résulter que de la recherche de nouveaux produits et d’un plan à long terme. Elle donne de la valeur ajoutée à notre production. Elle aussi participe au rééquilibrage du commerce extérieur.

L’effet de la baisse des charges est immédiat. Il correspond parfaitement au « choc de productivité » que tant d’économistes appellent de leurs voeux. Comme il est impossible de priver les budgets sociaux de cette recette, il faut augmenter les prélèvements obligatoires pour récupérer le manque à gagner engendré par la diminution des charges. François Hollande a refusé d’augmenter la TVA parce que c’est une mesure « injuste », alors que, en réalité, elle est indolore puisqu’elle n’est payée que par le consommateur. Lequel n’est pas obligé d’acheter un produit qu’il juge trop cher.  Le président est hostile à la TVA sociale parce qu’elle a été portée par l’ancienne majorité et qu’il a décidé de ne rien faire de ce que faisait Nicolas Sarkozy, comme si cette grille de lecture de l’économie était judicieuse.

Si ce n’est pas la TVA, c’est la CSG.

Dès lors qu’une hausse de la TVA est écartée, il ne reste qu’à augmenter la CSG, impôt qui touche à la fois le travail et les revenus du capital et de l’épargne. L’hésitation du gouvernement est liée au matraquage fiscal auquel il s’est livré dans le cadre du projet de loi de finances 2013. Ajouter un impôt à tous ceux qui vont être adoptés ces jours-ci par le Parlement revient à prendre le risque d’une révolte sociale. Le problème, cependant, réside dans l’ordre des priorités. Il y a des gens qui souffrent en France parce que leur pouvoir d’achat diminue. Mais il y a surtout des gens qui perdent leur emploi parce que les entreprises où ils travaillent font faillite. Il est évident qu’il faut parer au plus pressé, c’est-à-dire tenter de créer des offres d’emploi malgré la crise. Et on ne créera des emplois que si l’on abaisse le coût du travail, en attendant de monter en gamme dans les catégories de produits que nous fabriquons.

Le renoncement au choc de productivité serait fatal. Le taux de chômage, déjà anormalement élevé, continuerait de grimper. Le filet social deviendrait encore plus coûteux. Les investissements diminueraient comme peau de chagrin parce que tout l’argent public serait investi dans une protection sociale accablée par le nombre des chômeurs et des précaires. M. Hollande a déjà lancé trop de commissions, trop d’études, trop de réflexions collectives sur des dossiers qui ne souffrent pas une minute de retard. Il est temps qu’il se lance dans l’action. Courageusement. À l’abri des dogmes. Sans se demander si ses mesures sont conformes à la doctrine socialiste ou si elles s’inspirent des décisions de la majorité précédente. On nous parle sans cesse de « l’intérêt général ». Bien vu. Il est temps de s’y consacrer.

RICHARD LISCIA

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2 réponses à La politique du renoncement

  1. Vultaggio-Lucas dit :

    Je passerai sur les tergiversations et autres reculades significatives de ce nouveau pouvoir pris entre l’enclume et le marteau et non la faucille et le marteau, tout comme celui tout aussi légitimement élu en 1981 et qui dut, sans grande difficulté idéologique et encore moins dogmatique, se résoudre à la « rigueur » en 1983. L’argument de la baisse du coût du travail est toujours le même depuis plus d’un siècle tout comme la menace d’exil déjà appliquée par la noblesse à la fin des années 1700,lorsque la Bourgeoisie prenait le pouvoir.La baisse du coût du travail ne profite jamais qu’aux actionnaires comme le prouvent, par exemple, les plans sociaux dont l’annonce est immédiatement suivie d’une augmentation de la cotation en Bourse et ensuite des dividendes. Le coût du travail en France a déjà été diminué maintes fois par des allègements voire la suppression des cotisations sociales dites patronales et rarement salariales, ce d’autant plus que la CSG Balladur non déductible de 2,4 % taxe le salaire une fois et cette même part de salaire est imposée sur le revenu. Double peine pour les salariés mais aussi les retraités et les professions « libérales ». Je ne comprendrai jamais pas ces pseudo-luttes idéologiques alors que la majorité et l’opposition actuelles tout comme hier, sont toutes deux acquises au libéralisme économique lequel prime sur tout et en particulier l’humain ( pas le droit humain…) et l’humanisme.

  2. anger dit :

    Vous avez raison, mais comment faire alors que l’augmentation des impôts et les prèlèvements sociaux sont inscrits dans les gènes de nos hommes politiques ?

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