Syrie : la guerre embrase la région

Après le bombardement israélien
(Photo AFP)

Le double refus des puissances occidentales d’intervenir militairement contre  le régime de Bachar Al-Assad et de livrer des armes aux insurgés n’aura pas empêché l’extension de la guerre civile en Syrie aux forces djihadistes et aux pays voisins. Pour la deuxième fois, les Israéliens ont bombardé la Syrie afin de détruire des armes qui devaient être livrés, selon eux, au Hezbollah libanais. Damas a promis de riposter.

LES ÉTATS-UNIS ont leur part de responsabilité dans la poursuite des combats en Syrie : ils ont fixé à Bachar des limites à ne pas franchir, en premier lieu l’utilisation des gaz. « Nous avons la preuve que des gaz ont été utilisés, a déclaré Barack Obama la semaine dernière, mais nous ne savons pas qui les a utilisés ». Hier l’ONU affirmait que c’étaient les rebelles qui avaient eu recours aux gaz. Peut-être serait-il temps, pour les puissances occidentales, d’accorder leurs violons et de mettre au point une procédure d’intervention: la guerre aurait fait plus de 70 000 morts, il y a des réfugiés syriens partout, en Turquie, en Jordanie et au Liban, la Syrie vit dans une anarchie absolue et Israël, soucieux d’empêcher le Hezbollah libanais d’avoir accès aux armes sophistiquées dont dispose la Syrie, est désormais engagé dans la guerre. C’est un baril de poudre. Le Hezbollah dispose de quelque cinquante mille roquettes de toutes tailles et peut à tout moment s’en servir pour bombarder les villes israéliennes. Ce qui entraînerait aussitôt une invasion du Liban par l’armée israélienne.

Une épreuve de force.

Pour empêcher une telle conflagration, une intervention soutenue par la légitimité internationale doit être organisée au niveau des Nations unies. Malheureusement, sans les moyens militaires américains, l’ONU est impuissante. Or Barack Obama veut être le président qui a mis fin à deux guerres terribles, en Irak et en Afghanistan, et ne souhaite pas s’engager dans un nouveau conflit. Entre Jérusalem et Washington se joue en outre une sorte d’épreuve de force diplomatique qui sert de répétition à un éventuel conflit avec l’Iran. Le gouvernement israélien est en train de tester la détermination de l’exécutif américain à protéger Israël en cas de nécessité. « Israël a le droit de se défendre », a déclaré dimanche M. Obama à propos du raid sur israélien sur la Syrie, qui s’est traduit, entre autres, par la mort de 15 soldats syriens, selon Damas. Le Hezbollah menaçant de lancer une offensive contre Israël, l’État juif a placé des missiles antimissiles près de sa frontière septentrionale avec le Liban, mais ils ne seront pas suffisants pour arrêter des milliers de tirs. De sorte que, en bombardant la Syrie, Israël savait exactement à quelles représailles il exposait sa population civile.

Obama à son corps défendant.

L’engagement auquel répugne M. Obama pourrait donc résulter de la nécessité,  au cas où Israël serait menacé de destructions majeures. Le Congrès exigerait aussitôt de la Maison Blanche qu’elle fasse bombarder la Syrie et, peut-être,  qu’elle envoie un corps expéditionnaire américain. L’inconvénient de cette extension de la guerre civile syrienne serait l’improvisation. L’ONU n’aurait pas le temps de légitimer l’intervention, pas plus qu’elle ne réunirait les votes pour une résolution.

Israël veut voir si, le cas échéant, l’Amérique se passerait des feux verts diplomatiques et préférerait une action militaire soudaine et efficace. Ce serait un gage pour l’avenir immédiat, celui de la construction d’une bombe A par l’Iran que M. Obama a juré d’empêcher sans pour autant dire de quelle façon. Le gouvernement israélien veut lui forcer la main en Syrie, dans la perspective d’un conflit avec Téhéran. Le président Obama n’ignore pas que le Congrès est favorable à Israël chaque fois que ce pays court un grand danger. On peut se demander si les atermoiements des Américains face aux agissements du régime syrien ne les ont pas privés de leurs atouts : on n’a pas livré d’armes aux insurgés parce qu’on craignait qu’elles ne tombent aux mains de factions terroristes, lesquelles sont maintenant bien implantées en Syrie, de sorte que la chute espérée de Bachar Al-Assad risque d’être suivie par l’instauration d’un régime islamiste ; on n’a pas voulu faire plus tôt une guerre qui, il y a deux ans, aurait été moins difficile à livrer.

RICHARD LISCIA

 

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Une réponse à Syrie : la guerre embrase la région

  1. GASSER dit :

    M. Liscia est un bon analyste de la situation au Moyen-Orient. Mais Obama ne veut pas intervenir car on aurait un régime pire, islamiste, en Syrie, alors que ce n’était pas le but lorsque son père a pris le pouvoir. Israël ne pourrait pas envahir le Liban si le Hezbollah et la Syrie ne le voulaient pas; la situation est modérément explosive.

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