Hollande fait de son mieux

Hollande maintient la pression
(Photo AFP)

Il y a deux interprétations de l’accord conclu entre les Américains et les Russes au sujet des armes chimiques syriennes : la menace militaire a fait plier Moscou ou bien le contraire, la Russie a imposé son point de vue, évité la guerre et Bachar Al-Assad s’en sort indemne. François Hollande a choisi, bien sûr, la première interprétation. Elle n’est pas fausse, mais elle n’est pas complète.

EN EFFET, l’accord diplomatique ne sera efficace que si Bachar se conforme réellement au contenu de l’accord : rassemblement de toutes ses armes chimiques sans exception, puis destruction. C’est plutôt dans sa nature de louvoyer et de cacher au moins une partie de son stock. Aussi le chef de l’État a-t-il insisté sur sa vigilance. Il reconnaît du bout des lèvres que John Kerry et Sergueï Lavrov ont négocié en son absence alors que la France était le seul allié des États-Unis dans cette affaire, mais, comme en témoignent les discussions de ce matin au Quai d’Orsay entre Américains, Anglais et Français, le suivi est assuré minutieusement. La France maintient sa menace militaire et continue à réclamer le départ de Bachar. Certes, il existe un risque. Les atermoiements de Bachar, sa duplicité, les difficultés de la recherche d’armes disséminées dans toute la Syrie feront perdre du temps, ou videront l’accord de sa signification. Et la question des frappes se posera de nouveau.

Les critiques pleuvent sur Obama.

Mais la probabilité d’une guerre s’éloigne. Les critiques de l’opinion, des commentateurs, de l’opposition républicaine pleuvent sur Barack Obama, accusé de faiblesse, même par certains de ses partisans, qui soulignent la perte d’influence de leur pays dans le monde, malgré une opinion qui était majoritairement hostile aux frappes. En France, M. Hollande a plutôt rassuré les Français qui, dans leur majorité, ne souhaitaient pas d’intervention militaire. Les peuples ne sont pas les meilleurs analystes d’une situation complexe, ils n’échappent pas, en l’occurrence, à une contradiction profonde entre la haute idée qu’ils se font de leur pays et leur refus de s’engager dans des batailles qui coûtent cher et ne rapportent rien. On peut dénoncer « l’atlantisme » de Hollande, fidèle ami de l’Amérique au moment précis où elle ne semble pas accorder à la France le mérite de sa loyauté ; on peut voir en Obama une chiffe molle, incapable de tenir tête à un nazillon d’Orient, on ne doit pas oublier qu’il a été élu pour désengager l’Amérique de ses mésaventures militaires.

Hollande compréhensif.

Succédant à George W. Bush,  il s’est donné pour mission de concentrer ses efforts sur le départ des forces américaines d’Irak et d’Afghanistan. Ce qui explique qu’il soit resté très discret quand la France et la Grande-Bretagne ont attaqué le régime de Kadhafi et quand la France a libéré le Mali de l’invasion intégriste. L’agenda d’Obama, contenu dans son discours du Caire en juin 2009, excluait toute nouvelle intervention au Proche-Orient. C’est donc à contre-coeur qu’il a conçu le concept de « ligne rouge » à ne pas franchir, dont il s’est retrouvé prisonnier parce que Bachar est capable de tout. Et c’est à contre-coeur qu’il a brandi la menace des frappes.

François Hollande n’est d’ailleurs atlantiste que parce qu’Obama veut donner une autre vocation à l’Amérique que celle de l’éléphant dans le magasin de porcelaine. S’il n’a pas participé aux négociations de Genève (encore une maladresse américaine), il indique que la France pèsera de tout de son poids dans les modalités d’application de l’accord, il maintient sa menace, il ne retire pas le mot « punition » qu’il a prononcé pour stigmatiser la plus récente et la plus scandaleuse des atrocités commises par Bachar. Il se refuse à émettre la moindre critique contre la diplomatie des États-Unis, d’une part parce qu’il s’est engagé auprès d’eux et, d’autre part, parce qu’il comprend mieux Barack Obama que l’opposition américaine.

RICHARD LISCIA

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Une réponse à Hollande fait de son mieux

  1. CLUZEAU j.c dit :

    Oui, on est rassurés de notre non-intervention, car ce conflit nous dépasse, nous, Français? Car ce conflit touche le monde musulman dans son ensemble, la Libye ayant été le départ, la Turquie le dernier en date. Quand sera-t-on conscient que nous sommes une puissance régionale ? Mais dans le cadre d’une action concertée avec les pays entourant la Méditerranée notre place aurait été justifiée.
    Pour ce qui de notre président, le président américain l’a traité, soyons clairs, de façon négligeable ; en « capitaine de pédalo ».

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