Une diplomatie énergique

Une fermeté utile
(Photo AFP)

Telle qu’elle est conduite par Laurent Fabius, la diplomatie de la France est moins sujette à critiques que sa politique économique. À l’étranger, elle soulève nombre de louanges. Les Américains, par exemple, ont été très admiratifs de l’opération lancée par l’armée française au Mali et de ses effets géopolitiques. Dans la négociation avec l’Iran, la fermeté française, fort bien incarnée par Laurent Fabius, qui n’a pas partagé l’enthousiasme de ses homologues pour un accord express, a soulevé des critiques, mais la suite a montré que la France avait raison.

L’ÉLECTION  du président Rohani, considéré comme un modéré, semblait correspondre à un adoucissement des positions iraniennes. Elle a été aussitôt suivie d’une nouvelle offre de Téhéran de reprendre les conversations sur le nucléaire iranien. Les négociateurs dépêchés par M. Rohani exprimaient un immense enthousiasme et affirmaient que l’accord était à portée de la main, qu’il ne faudrait pas six mois pour qu’il fût conclu. Au début de la semaine dernière, les Iraniens et les Cinq + 1 (les membres permanents du Conseil de sécurité de l’ONU plus l’Allemagne) ont fait venir à Genève, inopinément, leurs ministres des Affaires étrangères parce qu’ils estimaient que l’accord était imminent. Laurent Fabius, contrairement à ses homologues occidentaux et russe, demanda des garanties supplémentaires, ce qui a irrité les États-Unis. « Une puce qui empêche un accord historique ! », s’exclama un négociateur américain.

Une douche froide.

Mais l’enjeu des discussions méritait mieux qu’un document signé à la hâte et susceptible de créer, à l’usage, des équivoques périlleuses. Le chef de la diplomatie française ne devait pas avoir tout à fait tort puisque, à la réunion suivante, les délégués iraniens ont refusé de s’engager dans le sens souhaité par la France. En même temps, à Téhéran, l’ayatollah Ali Khamenei, Guide suprême dont l’autorité est supérieure à celle du président Rohani, reprenait mot pour mot le discours morbide de l’ex-président Ahmadinejad, en déclarant qu’Israël était « voué à disparaître », et que jamais l’Iran ne renoncerait à sa vocation nucléaire.

Une douche froide. Tout se passe comme si, accablé par les sanctions économiques et commerciales, l’Iran cherchait davantage à les supprimer qu’à s’engager dans la voie de la paix. Pour autant, la négociation n’est pas interrompue, seulement différée de quelques jours : on se reverra bientôt pour de nouveaux entretiens. D’aucuns voient dans l’attitude française une continuité qu’ils jugent alarmante. M. Fabius a soigneusement préparé la visite du président en Israël qui, quoi qu’on en dise, a été un succès parce qu’elle a rapproché les gouvernements israélien et français en dépit de différences idéologiques profondes. Pour une part, M. Netanyahu a bénéficié d’un regain de crédibilité qui compense son isolement dans le monde ; pour une autre part, la France, qui a réussi à obtenir confiance des Palestiniens et des Israéliens à la fois, aura désormais plus d’influence sur le gouvernement israélien, ce qui, sait-on jamais ?, peut contribuer aux progrès de la paix.

M. Hollande a répété que la France n’accepterait jamais que l’Iran dispose de la bombe atomique. C’est encore une de ces promesses qui risquent, à long terme, de ne pas être tenues. Mais c’est tout de même une façon de prendre une position extrêmement ferme sur la sécurité d’Israël, d’opposer un barrage à l’hypocrisie iranienne, dont l’emballement soudain pour un accord cache, de toute évidence, une seule préoccupation, les sanctions. C’est une façon de dire à l’Iran qu’il doit choisir, entre le développement et la prospérité d’une part, la guerre d’autre part. Personne n’exige que l’Iran change de régime. Tout le monde réclame qu’il se réforme.

RICHARD LISCIA

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Une réponse à Une diplomatie énergique

  1. phban dit :

    Le répit fut de courte durée, semble-t-il. Espérons que les Iraniens ont vraiment l’intention de se cantonner au nucléaire civil, que les mécanismes de contrôle seront suffisamment sérieux et les sanctions dissuasives.
    Je ne peux m’empêcher de penser, malgré tout, que la « fermeté » française ressemblait fort, une fois de plus, à des rodomontades.

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