Un remède de cheval

Rhétorique enflammée
(Photo AFP)

En attendant l’annonce de la composition du deuxième gouvernement Valls, qui aura lieu avant ce soir, il me semble utile d’écarter quelques jugements ou hypothèses qui, selon moi, ne cadrent pas avec la réalité. Par exemple, quelques journaux ou personnages politiques ont parlé hâtivement de crise de régime. Il s’agit seulement d’une crise politique de forte ampleur et on ne pourra parler de crise de régime que s’il y a dissolution de l’Assemblée, changement de majorité et refus du parti vainqueur de cohabiter.

EN EFFET, l’arrivée de la gauche au pouvoir en 1997 à la suite d’élections anticipées voulues par MM. Chirac et Juppé s’est traduite par un gouvernement de cohabitation qui a duré cinq ans et n’a pas mis à mal les institutions. La situation est assez grave pour qu’on ne la représente pas, en plus, comme un chaos institutionnel.

Atouts institutionnels.

On insiste beaucoup sur la faiblesse politique de François Hollande, dont la cote de popularité ne dépasse pas 17 %, tandis que celle de Manuel Valls est tombée à 36 %. Il est vrai que la majorité du prochain gouvernement sera étroite. Il est possible que les frondeurs, ralliés autour d’Arnaud Montebourg, fassent payer à l’exécutif ce qui ressemble à un coup de force contre la gauche de la gauche. Mais le deuxième gouvernement Valls n’est pas du tout obligé de porter l’affrontement à son degré d’ébullition. Il dispose d’atouts institutionnels, comme le vote bloqué et le recours à l’article 49/3 de la Constitution, pour contraindre la majorité à choisir entre le vote des lois ou la dissolution. La situation ne sera certainement pas idéale. Il n’empêche que François Hollande, poussé par M. Valls, ou lui-même décidé à en finir avec la guérilla que l’aile gauche du PS ne cesse de lui livrer, a fait acte d’autorité.

Un acte plus fort que celui auquel M. Montebourg s’attendait, qui croyait que, une fois encore, il pourrait lancer ses piques contre le taureau sans que la bête, pour éviter l’estocade, ne le piétine. L’ex-ministre de l’Économie aurait dû savoir s’arrêter avant la provocation de trop. Quant au débat, présenté comme fondamental par les « frondeurs » du PS, il n’est pas aussi important qu’ils le disent. Ils ne proposent pas une politique tellement différente de celle qu’a engagée le gouvernement. La preuve en est que lorsque M. Montebourg prononce cent fois le mot d’austérité dans son discours de Frangy, il est facile de démontrer qu’il s’attaque à un mal inexistant. L’austérité, ce n’est pas ce que fait M. Hollande. L’austérité, c’est une baisse des salaires, des licenciements de fonctionnaires, des réductions des montants de retraites et des prestations de l’assurance-maladie. L’austérité, c’est la Grèce ou l’Espagne, dont un quart de la population active est sans emploi.

Un monstre imaginaire.

Nous avons subi à ce jour un régime si peu austère que nous sommes très en retard dans le rétablissement de l’équilibre budgétaire. Le recrutement de 60 000 enseignants est toujours au programme. Le non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux qui partent à la retraite a été abandonné. Si le nombre d’employés de l’État a diminué, les effectifs des fonctionnaires des collectivités locales ont augmenté. Les récentes baisses d’impôts ne seront financées que par le déficit budgétaire. M. Montebourg s’attaque donc à un monstre imaginaire, sorti tout droit de sa rhétorique enflammée. Il s’oppose au redressement des comptes alors que les déséquilibres financiers de notre pays sont parmi les plus prononcés de la zone euro. Il préconise une relance de la demande parce qu’il y voit un stimulant à la croissance, mais l’état de notre industrie l’empêcherait de fabriquer les produits réclamés par un consommateur un peu plus riche, ce qui nous contraindrait à les importer et à aggraver encore le déficit de notre balance commerciale.

Le président et le Premier ministre ont le droit de dire que leur programme, tout en insistant sur l’offre, ne ferme pas la porte à la demande. Le dernier argument de l’aile gauche du PS est purement démagogique : cessons de faire des cadeaux aux entreprises, faisons-en aux Français. Non-sens. Il nous faut des emplois et, sauf à installer les Soviets, ce sont les entreprises qui créent des emplois dans une économie de marché. Pour un chômeur, quel meilleur cadeau qu’un job ?

RICHARD LISCIA

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Une réponse à Un remède de cheval

  1. Chambouleyron dit :

    Merci pour ce papier. Je ne comprends pas que M. Montebourg le bonimenteur garde dans la population cet aura de sympathie bienveillante pour ses fausses affirmations péremptoires où l’on trouve au détour d’une éructation un commencement d’ébauche de possiblement vrai. C’est vrai que le clown est toujours attirant, même pour les adultes.

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