JO : Mélenchon a raison

Mélenchon hostile aux JO (Photo S. Toubon)

Mélenchon hostile aux JO
(Photo S. Toubon)

La ville de Paris a annoncé officiellement aujourd’hui qu’elle était candidate pour les Jeux olympiques de 2024. Cette décision a été saluée par à peu près tous les partis politiques, y compris le Front national. Jean-Luc Mélenchon l’a condamnée en rappelant qu’il s’agit d’un projet coûteux, somptuaire, qui ne fera qu’augmenter les embarras de la capitale. Je rejoins son opinion.

PARIS veut se venger de l’échec d’une tentative précédente pour les JO de 2012, qui eurent lieu, en définitive, à Londres. On a attribué cet échec au fait que le projet était porté par la ville, plutôt que par le pays. On a aussi critiqué l’ancien maire de Paris, Bertrand Delanoë, qui aurait péché par excès de confiance. Je comprends l’enthousiasme des Français qui voient dans les JO une sorte de consécration de la bonne réputation d’un pays. Mais les Jeux de Pékin en 2008 et ceux de Sotchi en 2014 n’ont pas fait de la Chine et de la Russie des pays exemplaires sur le plan de la démocratie et de l’universalisme. On est donc en droit de s’interroger sur l’envie de se classer dans un catalogue de régimes discutables. Certes, les JO doivent être dépolitisés, c’est même la vocation du sport. Il n’empêche que la politique s’en mêle souvent, comme lorsqu’un président américain, Jimmy Carter, a décidé de boycotter les Jeux en URSS, au nom des droits de l’homme.

Nationalisme rampant.

En outre, il y a, dans la candidature elle-même, un nationalisme rampant. La classe politique, la classe sportive et l’opinion française dans son immense majorité, rêvent de cette gloire particulière que confère à une nation l’organisation des Jeux olympiques. Ce serait une preuve de puissance, alors que nos déboires financiers devraient nous conduire à un peu plus d’humilité et, surtout, à un effort pour y mettre un terme avant de reprendre le chemin de la croissance et de l’emploi, conditions indispensables à l’organisation des JO dans un pays respecté. La gloire, aujourd’hui, c’est le droit au travail, à l’éducation, à la santé. Si nous avons des milliards à jeter par la fenêtre, nous ferions mieux de les utiliser pour améliorer le sort des pauvres.

Le prix de la gloire.

On lit ici et là que le budget des JO ne serait pas ruineux, qu’il pourrait ne pas dépasser les 3 milliards d’euros et qu’il serait facilement financé par la vente des billets et le sponsoring. Je n’en crois rien. Vladimir Poutine a dépensé 50 milliards de dollars pour des Jeux censés consacrer le statut de grande puissance de la Russie. Il n’y est parvenu qu’en privant ses moujiks d’un sort meilleur. À ce jour, on a rarement vu des Jeux dont le budget n’a pas allègrement dépassé, et de beaucoup, les prévisions. Jean-Luc Mélenchon, à juste titre, rappelle que la Grèce a eu l’honneur insigne d’organiser des Jeux et que les bâtiments qu’elle a construits pour accueillir les compétitions et les athlètes dépérissent aujourd’hui, bien qu’ils aient contribué à l’endettement du pays, plongé en ce moment même dans une crise financière sans précédent.
Je ne vois pas en quoi accueillir les JO serait un privilège. C’est juste un moment d’ivresse nationale, le sentiment de participer à un grand-oeuvre sportif. Il est bon d’exalter le sport et ses vertus. Mais comment ne pas voir qu’il est désormais inséparable de l’argent et que ceux qui l’adorent sont souvent ceux qui s’exercent le moins ?

RICHARD LISCIA

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2 réponses à JO : Mélenchon a raison

  1. Patrick Delahousse dit :

    Tout à fait d’accord avec M. Liscia, tout comme 67 % des Français d’après un premier mini-sondage télévisuel aperçu hier soir. Mais je doute que les politiques, qui vivent à des années-lumières de nous, à part M. Mélenchon en l’occcurrence, en tiennent compte.

  2. JMB dit :

    Le paradoxe de notre société est qu’elle disqualifie l’évaluation au niveau des études, et la pratique avec gourmandise quand il s’agit de sport.
    Une médaille, un succès à une compétition sportive feront le début et l’essentiel de journaux télévisés tandis qu’une distinction d’un chercheur ou d’un savant sera reléguée en fin de journal dans les nouvelles brèves.
    Les sportifs professionnels, entre autres, ne réalisent que “la cerise sur le gâteau”, et celle-ci ne s’apprécie que si le gâteau est parfaitement réalisé. Ce qui n’est pas le cas. L’utilité d’une tâche est à prendre en compte avant la qualité de sa réalisation.
    Paris a bâti sa notoriété sur la variété et la qualité de son patrimoine qui va des arènes de Lutèce antiques au quartier de la Défense contemporain. Récemment, au XIXè et au XXème, son aura a attiré des artistes de disciplines et d’origines variées venus se former et élaborer leur œuvre. Paris n’a pas besoin de succédanés de jeux du cirque pour se valoriser.

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