Régionales : un choix historique

Mme Le Pen en campagne (Photo AFP)

Mme Le Pen en campagne
(Photo AFP)

Il est difficile de savoir si l’électorat se sent très concerné par les régionales, dont le premier tour a lieu dimanche, difficile d’imaginer son comportement au second tour, difficile de dire combien de régions le Front national va conquérir. Mais une chose est sûre : nous entrerons lundi dans l’ère du tripartisme.

LES SONDAGES d’opinion, dont Nicolas Sarkozy affirme qu’ils ne veulent rien dire, accordent environ 30 % des voix au Front national, qui arrive donc en tête, 29 % à la droite et au centre, 22 % au PS, 7 % au Front de gauche, 4,5 % à EE-LV, 2,5 % à Debout la France. S’il remporte ce score, le Front national pourra déclarer qu’il est devenu le premier parti de France. Droite et gauche sont également responsables de cette formidable percée de l’extrême droite. Assises sur le scrutin majoritaire, elles n’ont cessé de penser qu’il les favorisait, que le FN, isolé, n’avait pas de réserves de voix, que des coalitions seraient suffisantes pour l’écarter au second tour. Or le Front, aujourd’hui, n’a même plus besoin du scrutin proportionnel qu’il a réclamé à cor et à cri. Certes, une dose de proportionnelle a été introduite dans le scrutin des régionales, mais, pour les échéances suivantes, le « premier parti de France » a plutôt intérêt à ce que soit conservé le scrutin uninominal majoritaire à deux tours.

Un électorat atteint de surdité.

Ces derniers jours, la droite et la gauche ont fait campagne sur le thème « Voter FN, c’est se tirer une balle dans le pied », avec des variantes : à gauche, on dit que le vote en faveur du Front favorise la droite, à droite, on dit le contraire. Efforts désespérés pour convaincre un électorat atteint de surdité, qui ne croit plus un mot de ce que les partis traditionnels lui racontent et veut tenter une expérience nouvelle. Les attentats du 13 novembre auront été décisifs en renforçant le FN au-delà de ce qu’il espérait. Il bénéficiait déjà, depuis les départementales, d’un vote sans complexe. Les Français, naguère, osaient à peine dire qu’ils votaient pour lui. Aujourd’hui, ils ne ne s’en cachent guère. Au lendemain des attentats, François Hollande a déployé des efforts sécuritaires sans précédent que la droite et même le FN ne devraient pas désavouer. En pure perte. Tout autour du président de la République, il y a des socialistes qui s’élèvent, avant même la reprise en main du pays, avant même que se réduise la menace terroriste, contre l’état d’urgence et contre la déchéance de nationalité.

La société que les Français réclament.

Le premier secrétaire du PS, Jean-Christophe Cambadélis affirme lui-même que l’anti-islamisme de la population n’est qu’une autre forme de l’antisémitisme, analyse totalement erronée, car, de toute évidence, des éléments se réclamant de l’islam commettent des attentats qui provoquent des hécatombes. Il est absurde de se voiler la face devant cette réalité, car une fois encore on essaie de renverser les termes du débat en exigeant des Français qu’ils se sentent coupables, pratiquement, des attentats terroristes. Que M. Cambadélis ne s’étonne pas, ensuite, que le PS se transforme en peau de chagrin. Il fait à peu près tout ce qu’il peut pour jeter les électeurs dans les bras du FN.
Les élections régionales ne devaient pas avoir l’importance qu’elles ont acquise cette année. Elles représentent un enjeu essentiel. Elles définiront, au moins en partie, la forme de société dans laquelle les Français auront décidé de vivre. Contrairement à ce que d’aucuns, à gauche, croient dur comme fer, ce n’est pas François Hollande qui menace nos libertés, ni lui qui serait sur le point de créer un État policier ou qui, sous le prétexte de mieux nous défendre, nous priverait de tout ce qui fait que la vie est plus douce en France que dans quantités d’autres pays. Ce qui exaspère les Français, c’est l’incapacité d’une bonne partie de la classe politique à appeler un chat un chat et un djihadiste islamiste un terroriste de la pire espèce. Ceux qui ont attaqué les rues du XIè arrondissement de Paris et le Bataclan n’étaient pas les sacrifiés d’une société française injuste et inégalitaire. Ils pouvaient s’intégrer à elle. Ils ont choisi l’anti-France, la barbarie et la mort. Si la gauche et la droite ont chacune sa part de responsabilité dans l’ascension du Front, c’est parce que la première ne veut pas s’adapter idéologiquement et matériellement à un monde en pleine mutation et parce que la seconde a voulu stupidement imiter un parti auquel, au contraire, elle aurait dû donner des leçons.

RICHARD LISCIA

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2 réponses à Régionales : un choix historique

  1. phban dit :

    Excellente analyse, je dirais presque malheureusement.

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