AVEC L’IRAN, la diplomatie française a été, grâce à Laurent Fabius, la plus exigeante au sujet de l’accord nucléaire, demandant même, pratiquement à la dernière minute, de nouvelles garanties. Cependant, dès que l’accord fut signé, le gouvernement français a organisé des visites de chefs d’entreprise à Téhéran, pour ne pas laisser le champ libre à nos concurrents européens et américain. Dans la foulée, le président Rohani est venu nous voir, mais aussi nous dire que le régime syrien devait rester en place et qu’il fallait combattre l’opposition. On ne lui reprochera pas sa franchise. Au moins, avec lui, c’est clair : la politique syrienne de la France est diamétralement opposée à celle de l’Iran. Ce qui ne nous a pas empêchés de vendre 118 Airbus à M. Rohani.
Un régime brutal.
S’il est facile de comprendre que le président de la République se voit souvent comme le démarcheur de notre industrie à l’étranger, on se demande comment des pays à régime totalitaire peuvent nous inspirer tant d’enthousiasme. D’abord, on commence par faire de l’Iran un débouché démesuré et fructueux pour nos productions, ce qui n’est pas exact. La capacité de consommation des Iraniens n’est aiguisée que par des décennies de frustrations, pas vraiment par un pouvoir d’achat considérable. Ensuite, et quoi qu’en dise l’Élysée, les droits de l’homme sont passés à la trappe à la faveur du rapprochement franco-iranien. Or l’Iran n’a rien à envier aux régimes les plus brutaux du monde. En 2015, il aurait procédé à 4 000 exécutions. Bien que le peuple iranien aspire à la liberté, la vie de tous les jours fait l’objet de réglementations draconiennes, d’une surveillance minutieuse et de sanctions sévères. Quel espoir offrons-nous aux Iraniens si tout ce que nous faisons à l’égard de leur pays renforce le régime sans vraiment contribuer à ce qu’il change ?
Le vrai responsable.
Il en va de même pour Cuba. Le président Hollande a toujours eu un faible pour ce pays. Il a toujours milité pour la levée de l’embargo et il a accueilli avec soulagement la décision de Washington de rétablir ses relations diplomatiques avec la Havane. Je ne crois pas que notre gouvernement voit dans Cuba un vaste marché. Ce n’est donc pas l’intérêt commercial qui guide la diplomatie française, mais la sincère recherche d’une vie meilleure pour les Cubains. Sauf que Fidel Castro est toujours là, que son régime ne semble avoir tiré aucune leçon de la chute du mur de Berlin, que la libéralisation économique de l’île est d’une lenteur extrême et que les libertés n’y ont pas été rétablies. Autrement dit, nous volons au secours d’un pouvoir qui n’a donné que de maigres gages de sa volonté de changement. Étant entendu que la vie ne s’améliorera vraiment à Cuba que lorsque le castrisme aura disparu. Non seulement Fidel et Raul, 88 et 83 ans, semblent se croire éternels, mais ils ne font rien de décisif pour préparer Cuba à la démocratie après leur mort. Il est possible que le peuple cubain ait payé cher l’embargo américain, il est indéniable qu’il a été soumis à d’injustes souffrances, et il mérite mieux que le sort qui lui est fait, mais tout n’est pas la faute de l’embargo (que Barack Obama souhaite lever pour sa part). Le vrai responsable, c’est Castro.
Ah, ce n’est pas avec les droits de l’homme que l’on fera une bonne politique étrangère ! Mais il faut aussi que les peuples, iranien ou cubain, profitent de la détente mise en place par des dirigeants avisés. On nous permettra d’être sceptiques sur la gestion d’un Cuba toujours soumis à Castro et sur les espoirs que les citoyens iraniens peuvent nourrir tant qu’ils sont les sujets du « Guide suprême » Ali Khamenei et soumis à la violence des pasdaran.
RICHARD LISCIA
Comme vous le dites, « ce n’est pas avec les droits de l’homme que l’on fera une bonne politique étrangère ! »
Merci pour cet article