La chienlit continue

Myriam El Khomri ce matin (Photo AFP)

Myriam El Khomri ce matin
(Photo AFP)

On ne pouvait pas attendre de l’entretien d’aujourd’hui entre Myriam El Khomri et Philippe Martinez des résultats bouleversants. La rencontre a abouti à un constat de divergences, alors qu’elle avait été claironnée comme une phase décisive du conflit social.

LA POSITION de la CGT est relativement affaiblie. Elle fait face à des accusations souvent fondées. Quelques-uns de ses militants, filmés dans la rue, ont participé à la casse, en dépit des dénégations répétées de son secrétaire général ; son affiche de très mauvais goût ciblant la police a presque coïncidé, circonstance affreuse, avec l’assassinat d’un couple de policiers par un terroriste ; ses nervis sont allés manifester au domicile de la ministre, portant atteinte à sa vie privée ; de sorte que la CGT s’est pratiquement mise en marge de la légalité. Elle a d’ailleurs lâché du lest : le métro marche, ainsi que les trains, l’approvisionnement en carburants ne pose plus aucun problème. Mais 64 % des Français continuent de penser que grèves et manifestations résultent d’une mauvaise gestion de la crise par le gouvernement, restent hostiles à la loi travail et estiment que Manuel Valls doit la retirer.

Syndicat de combat.

M. Martinez n’est pas dépourvu de sens politique. Il sait que, au point d’épuisement où le gouvernement est parvenu, il ne peut pas abandonner la loi de travail sans signer son arrêt de mort électoral. On ne voit pas non plus pourquoi la CGT contribuerait au retour de la droite au pouvoir : elle est assurée, dans ce cas, d’avoir à combattre des réformes bien plus draconiennes que celles de François Hollande. Mais, dans cette affaire, personne ne réfléchit en termes rationnels. M. Martinez a transformé la CGT en syndicat de combat, avec l’espoir qu’il améliore son score lors des prochaines élections syndicales. Il pratique une sorte de politique du bord de l’abîme. Le conflit actuel pourrait n’être qu’une répétition de la grande explication que les syndicats auront avec une droite libérale au lendemain des élections générales de 2017.
Voilà pourquoi les raisons de verser dans l’optimisme sont pratiquement nulles. Nous sommes dans une configuration inédite avec un pouvoir presque disqualifié et des syndicats qui ne savent pas eux-mêmes où les conduit leur action, mais qui y vont quand même à marche forcée. Quand il a été question d’interdire les manifestations pour raison de terrorisme et d’Euro, Jean-Claude Mailly a volé au secours de M. Martinez en rappelant que le droit de manifester est sacré en France. J’ajoute que c’est le seul, ou presque, à avoir été aussi bien respecté : les casseurs ont attaqué et démoli un hôpital pour enfants malades. Nous n’allons pas dire le contraire aux camarades syndiqués, mais on peut leur rappeler qu’il faut savoir finir une grève, ou plutôt en finir avec près de quatre mois d’un conflit épuisant, exaspérant, accablant pour le public, pour les manifestants, pour les services d’ordre, et qui donne de la France une image ridicule. Il n’y a que la CGT et FO pour croire que la loi travail et son article 2 sont une régression qui nous renvoie au Moyen Âge et que, si elle ne disparaît pas du paysage, la civilisation française sera mortellement atteinte.

Hollande durablement affaibli.

L’autorité de l’État, confronté à un conflit d’une durée interminable, à des actes terroristes qui ont épouvanté la société, à de nouvelles dépenses de sécurité qui ajourneront de plusieurs années le retour aux équilibres fondamentaux, s’est liquéfiée. C’est M. Martinez qui gouverne la France. C’est lui qui sifflera la fin du conflit ou plutôt qui laissera le pays aller cahin-caha jusqu’aux vacances et on parlera alors du Tour de France puisque l’Euro de football n’a pas pu empêcher les difficultés que la CGT nous a infligées. Au début de l’année, François Hollande percevait les premiers frémissements d’un redémarrage de l’économie. Ils se sont confirmés avec une baisse du chômage. Il se disait alors que le retournement de conjoncture lui permettrait de se présenter à un second mandat avec des chances raisonnables. Hélas pour lui, le projet est mort.

RICHARD LISCIA

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2 réponses à La chienlit continue

  1. Michel de Guibert dit :

    Il y a tout de même une raison d’être optimiste, c’est que la CGT va se prendre une déculottée aux prochaines élections syndicales tant elle exaspère…

  2. La casse de la vitrine extérieure du Pavillon Laennec de l’hôpital des Enfants Malades rebaptisé Necker, n’est pas un acte unique et isolé. Replacé dans son contexte de manif’ infra-insurrectionnelle, ce n’est qu’un gros fait-divers. Il faudrait savoir si le casseur de vitrine qui semble avoir agi seul sur ce building au sein d’un groupe qui saccageait tout depuis la place du 18 juin était télécommandé ou non. J’ai vu sur les podcasts le saccage du gros cabinet d’imagerie médicale qui occupe tout un rez-de-chaussée sur le trottoir d’en face. Personne n’instrumentalise ce dernier!
    Moi, citoyen lambda, j’aimerais bien savoir qui sont ces commandos de casseurs, qui les commandent et à quoi ils servent et dans quel but ils cassent.

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