Le calvaire de Fillon

Un moment désagréable
(Photo AFP¨)

Comme on pouvait s’y attendre, François Fillon, invité de l’Emission politique sur France 2, a moins exposé son programme qu’il ne s’est défendu contre des accusations et des jugements portés par des interlocuteurs particulièrement hostiles.

LE CANDIDAT de la droite et du centre aurait dû comprendre depuis plusieurs semaines qu’il serait pratiquement empêché de faire campagne et que ses propositions seraient constamment étouffées par des questions incessantes sur ses déboires judiciaires. L’émission de France 2 était importante pour lui parce que, au lieu d’être confronté à des concurrents, il était le seul à s’exprimer et pouvait donc, théoriquement, orienter le débat dans un sens qui lui fût favorable. Sauf que ce n’est pas vrai, car les questionneurs choisis par les organisateurs, de l’écrivaine Christine Angot à l’ancienne ministre socialiste Aurélie Filipetti, étaient remontés contre lui comme des manivelles. Il a donc été contraint tantôt de s’excuser pour les costumes (qu’il a rendus), tantôt de se fâcher, tantôt de nier ce que la justice lui reproche. On serait médusé par la violence verbale des « agresseurs » si on ne savait que M. Fillon s’est lui-même mis dans la nasse.

Une mauvaise défense.

Le problème, pour lui, va s’aggravant, parce qu’à l’inconfort du mis en examen s’ajoute une défense très mal construite et très contradictoire. Quand il continue à dire qu’il est victime d’un scandale d’État, il dramatise la situation de manière tout à fait artificielle. Même si le « cabinet noir » de l’Elysée existe, M. Fillon ne pourra jamais le prouver. Il a donc donné l’occasion à François Hollande de démentir immédiatement. Personne ne sort grandi de ce débat sulfureux, pas plus M. Fillon que ses interlocuteurs et que le chef de l’État, dont on remarque qu’il réagit au quart de tour et ne semble manquer, le soir, aucune émission qui l’intéresse. François Hollande n’aurait pas dû intervenir personnellement et aurait dû laisser ses services répondre à M. Fillon. Le président a encore récidivé ce matin en prononçant une déclaration tout aussi sévère pour M. Fillon à France Info. Cet acharnement contre le candidat de la droite et du centre est suspect : on se demande si M. Hollande ne craint pas que les propos accusateurs de M. Fillon fassent boule de neige. C’est comme si le président brûlait de participer aux débats de la campagne et qu’il regrettait de ne pas être candidat lui-même.

« Le Canard », cet ami.

M. Fillon, pour étayer son dires, se réclame d’un ouvrage qui n’est pas encore paru mais dont il a lu les bonnes feuilles : « Police : les secrets inavouables d’un quinquennat » affirme que M. Hollande lit toutes les renseignements apportés par ses services et toutes les écoutes judiciaires, ce qui, dit M. Fillon, est illégal. L’un des deux auteurs du livre, Didier Hassoux, est journaliste au « Canard », le même « Canard » dont M. Fillon ne cesse de dénoncer les articles qu’il publie sur lui mais dont il fait maintenant son allié objectif. Bien sûr, M. Hassoux a démenti sans réserves la notion de cabinet noir. Et le ministre de la Justice, Jean-Jacques Urvoas, rappelle que M. Fillon a voté contre toutes les mesures favorisant l’indépendance de la justice. Autrement dit, quand on s’enfonce dans un noeud de vipères, on risque d’être piqué et de mourir empoisonné. M. Fillon exige qu’une enquête soit lancée à la suite de la parution de l’ouvrage, mais il ne semble pas comprendre que, même si des juges finissaient par traîner M. Hollande en justice (après son quinquennat), il ne serait pas pour autant lavé des soupçons qui pèsent sur lui et que seule la justice peut lever.
Ainsi se déroule une campagne qui se rapproche de son terme, ne ressemble à aucune autre, ne dessine aucune victoire, apporte peu d’éléments sur les intentions des candidats, et devient chaque jour un peu plus hystérique, non pas seulement parce que les partis politiques cèdent à la panique mais parce que, dans le débat, même les questions sont empoisonnées. Quarante pour cent des électeurs n’ont pas encore décidé pour qui ils vont voter. C’est énorme et cela veut dire que n’importe quoi peut arriver.

RICHARD LISCIA

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24 réponses à Le calvaire de Fillon

  1. liberty8 dit :

    « Hystérique » vous avez donné la juste définition. On ne sait plus ou on va, les bases se délitent, c’est le grand n’importe quoi et on a du mal a chercher les brides de programmes aux milieu des invectives.
    Plus rien n’est respecté, même pas la parole donné ( comme les socialistes qui eux aussi quitte le navire)
    Après le premier débat on pouvait espérer un retour à l’essentiel, il n’en est rien.
    40 % d’indécis , tout peut arriver, même le pire !

  2. Michel de Guibert dit :

    Oui, cette campagne est nauséabonde, le summum ayant été atteint par l’écri-« vaine » Christine Angot dont la « prestation » hystérique est indigne d’une télévision du service public.

    Sur la question du « cabinet noir » dont il est question et dont j’ai pu lire comme tout un chacun les bonnes feuilles dans « Valeurs actuelles » ou sur les fac-similés du livre publiés dans la presse, je suis très surpris que M. Hassoux démente sans réserves la notion de cabinet noir, c’est-à-dire qu’il démente ce qu’il a lui-même écrit, ou bien ses coauteurs, dans son livre «Bienvenue Place Beauvau, Police : les secrets inavouables d’un quinquennat»!

    • Patrice Martin dit :

      Qu’il est laid, le visage de la France, quand elle prend les traits de Christine Angot !
      C’est Roger Nimier qui écrivait que certains personnages entassent des couches de laideur les unes sur les autres, et qu’au point où ils en sont, elles auraient bien tort de s’en priver.
      Elle y parvient à merveille en cumulant sa jalousie face au nanti, la rancœur de sa médiocrité d’écrivaine face au talent de l’orateur et surtout la haine du puiissant. On l’imagine aisément en tricoteuse promenant la tête de François Fillon au bout d’une pique. Hélas la France est aussi ce dégoût ou cet égout.

    • Liberty8 dit :

      Je suis tout à fait d’accord avec vous.
      Livre probablement préparé bien avant les « affaires » Fillon, qui va sortir bientôt et deux coauteurs démentent ce qu’ils sous entendent de manière on ne peut plus explicite. Or ces deux coauteurs font partie de la rédaction du « Canard ».
      Alors ? Je n’emploierai pas le mot « d’autisme ». Il n’est plus politiquement correct.
      Liberté de la presse ? Oui mais à sens unique vers l’objectif du moment.

  3. CHEMILA dit :

    Je ne trouve pas que la dramatisation de M. Fillon soit artificielle. Après tout, le non-respect quasi immédiat du secret de l’instruction, de façon itérative, aussitôt largement relayé par la presse qui l’exècre, ne cesse de tomber sur M. Fillon, et somme toute il a su rester calme contre deux personnes particulièrement débordantes de haine (en particulier Mme Angot). A l’évidence, le « Canard » a publié l’affaire des emplois fictifs à la date qui faisait le plus mal, et la convocation chez les juges suit la même logique. Il y a une chance sur 365 que cela soit simplement dû au hasard. Sommes-nous encore en démocratie ? Oui, c’est dramatique.

  4. Gilbert dit :

    C’est tellement facile d’excuser l’inacceptable au prétexte que M. Fillon se mettrait tout seul « dans la nasse »… Cela évite de s’interroger sur le but de cette « hystérie ».

    Réponse
    Tellement facile ? Parce que c’est moi qui l’ai mis dans la nasse ? Allons, un peu de bon sens…
    R.L.

  5. Morandini dit :

    Nous assistons à une campagne désastreuse,finalement dans la continuité de ce quinquennat tout aussi catastrophique. L’acharnement médiatique dont fait l’objet M.Fillion est, à mon sens, suspect, ainsi que le calendrier de cette affaire .Cela permet d’oublier les scandales de ce quinquennat (Cahuzac, Morel, coiffeur et j’en passe …) et surtout ses échecs.
    M.Fillon est le seul candidat qui ait une dimension d’homme d’Etat mais il s’est défendu de façon bien maladroite ( bien qu’étant bien à droite ) et le doute s’est emparé d’une partie de son électorat. Donc oui, tout est possible même le pire .

  6. garcia jean-louis dit :

    Il est évident qu’une action de torpillage ou cabale systématique a été mise en place contre M. Fillon, et les mailles du filet n’en finissent pas de se resserrer !
    Cela dit, le Palmipède n’est pas du tout tendre pour ses adversaires ; il semble simplement être moins informé à leur sujet, ce qui conforte l’idée d’une araignée tissant une trame particulière autour de cette cible, comme cela aurait pu se produire, de sa part, contre DSK ;
    quand on est « limite », on peut être tenté d’éliminer un concurrent ou, plus tard, celui d’un candidat soutenu, par défaut, de façon occulte.

    • Rien de tout cela ne serait arrivé si François Fillon n’avait pas accepté le soutien de Sens commun pour gagner la primaire, ce qui a volé la victoire à Alain Juppé. En maintenant, de surcroît, M. Fillon a trahi la droite républicaine, la laïcité, et la démocratie française. Excusez du peu.
      Quand on se défend mal, on n’est pas capable de bien défendre les intérêts de la France, surtout si l’on fait ami-ami avec M. Poutine, histoire de se faire un peu d’argent à mettre dans sa propre tirelire. Quant à demander à sa propre fille de l’aider à payer ses impôts (pas les impôts de sa fille, mais les siens, à lui), c’est inouï. Il aurait du vendre ses beaux habits aux enchères, au lieu de les rendre; cela lui aurait permis de régler tout ce qu’il devait au fisc français. Quelle honte ! Et vous appelez cela être un homme d’Etat ?

      Réponse
      Attention à ce que vous écrivez : les rapports de M. Fillon avec M. Poutine ne sont entachés d’aucun problème d’argent et, par ailleurs, il n’est pas poursuivi pour des raisons fiscales.

      R.L.

      • Michel de Guibert dit :

        Merci de confirmer indirectement par vos propos que l’ennemi à abattre pour le pouvoir et toute la bien-pensance c’est Sens commun, et derrière Sens commun, cette immense manif pour tous coupable d’avoir réuni des centaines de milliers de personnes pour manifester contre la loi Taubira…

      • Liberty8 dit :

        Madame vous êtes excessive et diffamatoire dans vos débats. Un peu de modération. Ce que vous écrivez et la façon dont vous le faites dessert complètement votre candidat préféré.

      • Non, cher R.L., M. Fillon n’est pas poursuivi pour des raisons fiscales, mais il a quand même emprunté de l’argent à sa fille pour boucler ses fins de mois ! Je n’imagine pas feu mon père me demander pareil service. J’ai peut-être mal compris concernant François Fillon et Poutine, mais M. Fillon aurait touché 50 000 euros d’un milliardaire libanais pour que M. Fillon lui permette de rencontrer Poutine et des dirigeants de Total; ce n’est pas Poutine qui l’a payé mais bon. A propos, Christophe de Marjorie n’est-il pas mort en Russie ?

        Réponse
        Mais enfin, cela revient à tirer sur une ambulance ! Vous ne pouvez pas mentionner une accusation qui n’existe pas et en plus dire que vous avez raison.
        R.L.

        • Agnès Gouinguenet. dit :

          Parce qu’il n’a pas demandé à sa fille Marie de l’aider à payer ses propres impôts ? Parce que Vladimir Poutine n’a pas dit que M. Fillon était un bon candidat (désormais, il a changé de cheval, pour détruire l’Europe), parce que M. Fillon n’a pas rendu ses beaux habits de luxe au lieu d’assumer ses cadeaux ? Un cadeau sincère, cela se garde, sinon c’est un affront fait au donateur. Il ne s’agit pas de tirer sur une ambulance, mais d’arrêter quelqu’un qui ridiculise la France. Merci cher R. L.
          Réponse
          Est-ce qu’on peut arrêter cette partie de ping pong ?
          R.L.

      • tamburini dit :

        Heureusement que nous ne sommes plus à l’époque de la révolution française car avec cette dame « bien pensante ou bien diseuse », Fillon aurait été guillotiné sans même être jugé.
        Que faîtes-vous de la présomption d’innocence ?
        Souvenez vous de Sarkozy : 14 mises en accusation et; pour l’instant, que des non-lieux.
        Laissez faire la justice et c’est seulement après le verdict que vous pourrez hurler avec les loups.

  7. Juvi dit :

    « Le Canard » est l’instrument dont le pouvoir ne saurait se passer ; il permet de faire dire ce qu’on veut par un canal de biais, un peu comme le fou du roi à l’ancienne, qui permettait toutes les impertinences impossibles à verbaliser autrement. Cela dit, et bien qu’aucun candidat ne me semble a la hauteur, nous devrions élire le « moins pire », une gageure. Le procédé anti-Fillon étant tellement crasseux- c’est un fait du Prince, un TP sorti du livre de Machiavel- je me vois obligé de prendre sa défense, même si la morale n’y trouve pas son compte. Et que dire des autres candidats qui ont tous plongé leur cuillère dans la même gamelle, tant la soupe était bonne. Pour l’incertitude du résultat des élections je vous renvoie aux mesures Filteris.
    Au moins ce vote sonne le glas d’une profession, celle des offices de statistique, pour ne pas dire de toute la presse en conflit d’intérêts par leurs subventions étatiques.

  8. Nicolette dit :

    Compte tenu du titre de l’émission sur France 2, il eût été intéressant que les journalistes interrogent M. Fillon sur son programme. On peut se demander s’ils en sont capables. Il est moins compliqué de préparer une émission télévisée en parlant de costumes que d’un programme pour une élection présidentielle. Les questions posées aux candidats avant la primaire des républicains évitaient déjà soigneusement de parler des sujets de fond. Quelle est la compétence de Mmes Angot et Filipetti dans le domaine économique, la lutte contre le terrorisme, le chômage,…? La télévision publique fonctionne grâce aux « subventions » données par les contribuables qui sont en droit de demander des comptes.

  9. ganja N dit :

    J’ai été marqué par le visage de haine de cette Mme Angot, semblable à un cobra qui crachait son venin!
    Jusqu’où va aller cette escalade pour assassiner Fillon alors qu’il a un programme solide pour sauver la France?
    Avez-vous remarqué également que lors de l’émission des tweets passaient pour dire en gros au peuple que nous sommes : quoi que dise Fillon, même des choses justes, c »est peine perdue. C’est grave, ce réflexe de Pavlov !
    Quand va-t-on parler du fond alors que nous sommes devant un précipice ?
    J’ai admiré le courage et la solidité de notre homme.
    Quant à M. Hassoux, si c’est pour se contredire lui même, ce n’est pas la peine qu’il écrive son livre sur le cabinet noir, dont l’existence est un secret de Polichinelle.

  10. Scalex dit :

    Encore une fois, j’ai été époustouflé par la prestation de Fillon. Je fais partie des hésitants et cette émission pourrait me décider à voter pour lui et non pour Macron. Mais l’électorat étant désormais majoritairement plus jeune que moi, il est évident que Macron reste le grand favori.

    • mXmF dit :

      « Point n’est besoin d’espérer pour entreprendre, ni de réussir pour persévérer. ».
      Le meilleur programme est celui de Fillon. Le seul candidat ayant une stature d’homme d’état est Fillon. Le candidat qui a des casseroles comme tous les autres est Fillon. La moralité d’un chef d’état est certes à prendre en considération mais, en se fiant à ce seul critère, l’Histoire se serait passé des meilleurs ! Le vote « utile » au premier tour c’est Fillon… Tel est du moins un avis…

  11. Michel de Guibert dit :

    Hollande dément l’existence d’un cabinet noir.
    Comme disait Pierre Lazareff : « Une affirmation, un démenti, deux informations » !

  12. Michel de Guibert dit :

    Après Madame Angot, l’héroïne de « Madame Angot ou la Poissarde parvenue » d’Antoine-François Ève, aurons-nous la Fille de Madame Angot (opéra-comique en trois actes de Charles Lecocq) pour nous chanter :
    « Hollande est roi, Christine est sa reine
    C’n’était pas la peine (bis)
    Non pas la peine, assurément
    De changer de gouvernement ! »

  13. Michel de Guibert dit :

    Hollande qui reproche à Fillon de manquer de dignité me fait penser à Françoise, la cuisinière de Marcel Proust. Quand le canard à qui elle coupait la tête se débattait, elle le traitait de “sale bête !”

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