Fillon contre-attaque

Fillon croit en lui-même
(Photo AFP)

Ce matin, sur France Inter, François Fillon a réaffirmé qu’il détenait les preuves de l’ingérence du pouvoir politique dans ses démélês judiciaires. Le porte-parole du gouvernement a vivement démenti les affirmations du candidat de la droite.

« J’AI LES DATES, les jours, les personnes qui ont communiqué les documents (au « Canard enchaîné »). Le moment venu, je poursuivrai tous ceux qui sont à l’origine de cette affaire ».. M. Fillon explique que, s’il ne jette pas ses preuves sur la place publique, c’est parce qu’il reste concentré sur sa campagne. On ne peut pas exclure complètement l’hypothèse d’un bluff destiné à augmenter le nombre des intentions de vote en sa faveur. Mais c’est difficile à croire dans la mesure où il a pris date et que la presse ne manquera pas de l’interroger sur ses preuves au lendemain des élections. Les propos de M. Fillon induisent un nouveau malaise dans l’opinion. D’abord, et malgré des préoccupations bien compréhensibles, il n’est jamais tolérable qu’une personne disposant de preuves se contente de faire des semi-révélations : ou bien il en a trop dit, ou bien pas assez. Ensuite, dans le match que M. Fillon livre contre le pouvoir depuis qu’il a eu maille à partir avec la justice, son dénigrement des juges, de la police et de la presse ajoute du poison à une campagne qui foule aux pieds allègrement la plupart des principes démocratiques qui devraient la régir.

Règlement de comptes.

François Fillon vit, depuis deux mois et demi, un calvaire qu’il a prolongé en refusant de se démettre après sa mise en examen. Il a cent fois raison de dire que ses concurrents (par exemple Philippe Poutou pendant le grand débat à onze) se servent des accusations qui pèsent sur lui pour l’empêcher d’exposer son programme. C’est sûrement très injuste. Mais on n’a jamais vu une campagne dont les acteurs prendraient le soin de se ménager les uns les autres. Tout est bon pour fragiliser l’ennemi et même l’abattre. Il n’est pas impossible que cette campagne continue au-delà des scrutins et se transforme en règlement de comptes politique. M. Fillon ne semble pas avoir réalisé que des charges pèsent contre lui. Non seulement il réaffirme son innocence mais il rappelle que, dans plusieurs affaires concernant de hauts dirigeants de la droite (parmi lesquels Nicolas Sarkozy), les poursuites ont abouti à des non-lieux. L’ancien Premier ministre se déclare donc convaincu qu’il sortira blanchi de l’épreuve.

Trouver des points.

Les « révélations » qu’il vient de faire changeront-elles la donne ? Non, il doit donner quelques importantes précisions. La perspective d’une bataille entre M. Hollande et M. Fillon pendant la campagne n’est pas très séduisante, mais elle relève, pour le moment, de l’utopie. Les sondages les plus récents montrent que M. Fillon résiste à son étiage de 18 % mais qu’il ne progresse pas non plus. Sept points le séparent de Marine Le Pen et d’Emmanuel Macron, ex-aequo à 25 %. Le seul candidat à qui la campagne ait été très utile, c’est Jean-Luc Mélenchon, aujourd’hui à 17 %, seulement un point derrière M. Fillon, alors que Benoît Hamon tombe à 9 %, annihilant tout espoir de la gauche d’être présente au second tour. Le projet de M. Fillon pour les deux semaines qui viennent, c’est de gagner les cinq points qui lui manquent pour franchir le cap du premier tour. Ces suffrages ne viendront pas du Front national, ni de la gauche. Ils ne peuvent venir que de M. Macron qui n’a d’ailleurs construit sa position qu’en prenant à M. Fillon une partie de l’électorat de la droite. Il a été abondamment souligné que l’électorat de M. Macron est bien moins solide qu’il n’en a l’air. Si c’est vrai, c’est l’unique espoir de M. Fillon.

RICHARD LISCIA

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13 réponses à Fillon contre-attaque

  1. liberty8 dit :

    Si les révélations sont justes et prouvées, ce qui n’est pas encore le cas, ce sera un scandale de plus. Cette République a vécu, il est temps de passer à autre chose avec un seul pouvoir exécutif, celui du parlement et un président élu au suffrage indirect, libre d’aller planter ses chrysanthèmes.
    Quant à Fillon ou Macron, le troisième round, celui des législatives, va mettre tout le monde d’accord et il faudra gouverner avec la droite qui en sortira vainqueur pour les raisons que j’ai déjà exposées.

  2. Michel de Guibert dit :

    « il n’est jamais tolérable qu’une personne disposant de preuves se contente de faire des semi-révélations »… cela vaut aussi pour ceux qui accusent Fillon et qui distillent des semi-révélations dans la presse au fil des semaines !
    Réponse
    Sil a des preuves, qu’il les montre. Sinon, qu’il se taise. Il y a longtemps que M. Fillon a reconnu que sa femme et ses enfants étaient salariés en tant qu’assistants parlementaires. Vous défendez quelle vérité, au juste ?
    R.L

    • Michel de Guibert dit :

      La question n’est pas que Fillon salariait sa femme et ses enfants, mais celle de l’accusation portée contre lui d’emplois fictifs, ce qu’il conteste, et la présomption d’innocence vaut là aussi…
      Maintenant, je suis pleinement d’accord avec vous pour dire que Fillon doit montrer les preuves des accusations qu’il porte.
      Réponse
      Mais oui, mais oui, la question porte sur les salaires versés à la famille de M. Fillon. Vous êtes en train de me dire que le délit existe, qu’il a été bien caché et que le malheureux délinquant est victime d’un salaud qui l’a dénoncé. Certes, mais le délit existe.
      R.L.

      • Michel de Guibert dit :

        Ne me faites pas dire ce que je n’ai pas dit ! Il n’y a aucun délit à salarier sa femme ou ses enfants ; si délit il y avait, il serait constitué uniquement si l’emploi avait été fictif, ce qui reste à prouver ; la mise en examen ne signifie pas culpabilité, et vous me permettrez de respecter la présomption d’innocence.
        Réponse
        Une sorte de blocage mental lié à votre passion pour Fillon vous aveugle : si le seul fait de salarier sa famille est parfaitement convenable, pourquoi M. Fillon serait-il seulement à
        18 % et pourquoi est-il vraisemblable qu’il va perdre la partie ? Une partie de son électorat s’est détournée de lui non pas à cause du cabinet noir mais à cause des erreurs qu’il a lui-même reconnues. Vous voudriez que ces choses là ne soient pas dites et que je défende Fillon jusqu’à mon dernier souffle. La réponse est non. Je suis libre et je vous souhaite d’être aussi libre que moi.
        R.L.

        • Michel de Guibert dit :

          Mais je suis libre, simplement je n’aime pas que l’on piétine un homme et que l’on dénature ainsi la campagne électorale.

  3. Michel de Guibert dit :

    « Benoît Hamon tombe à 9 %, annihilant tout espoir de la gauche d’être présente au second tour »… mais vous semblez oublier Emmanuel Macron !
    Réponse
    Vous avez le droit de nourrir indéfiniment vos fantasmes, mais Macron ne représente pas la gauche de combat.
    R.L.

    • Michel de Guibert dit :

      Macron ne représente certes pas la gauche de combat, celle-ci est représenté outre Benoît Hamon par Mélenchon, mais il représente bien une gauche hollandaise…
      Réponse
      Non. Il y a des idées de droite dans le plan de réforme de Macron. Libre à vous de verser dans le fanatisme. Libre à moi de respecter les lecteurs médecins qui ne sont pas de votre avis.
      R.L

      • Michel de Guibert dit :

        Je ne pense pas vous offenser ni offenser mes confrères qui vous lisent en donnant mon point de vue… mais permettez-moi de dire que les idées de Macron sont proches de celles de François Hollande, y compris les « idées de droite » de son plan de réforme.

        Réponse
        Il est donc à droite, il est donc à gauche et en définitive, ce n’est même pas le sujet. Je comprends que l’on regrette la réforme de Fillon. Je ne comprends pas que, au nom de la politique, on enterre l’éthique avec autant d’ardeur. En outre, votre méthode est celle du harcèlement : vous commentez trois mots, deux lignes et vous engagez un débat sans fin. Je vous ai déjà expliqué que ce blog ne sera pas détourné de sa vocation, celle de proposer une analyse où n’existe aucune complaisance, aucune tendresse, comme dit l’autre, mais où les principes démocratiques sont défendus. Parmi ces principes, l’éthique en politique n’est pas le moindre.
        R.L.

    • Gilbert dit :

      Qui a fait Monsieur Macron ?

  4. Antoine Martin dit :

    Richard Liscia qui est un modéré a une tendresse particulière pour François Fillon et surtout son programme qui en l’état actuel des choses sera inapplicable dans l’hypothèse bien peu probable de son élection : imaginez les manifestations à la moindre réforme .
    Reste à la droite républicaine la possibilité de gagner les législatives suivantes et de s’associer avec Macron, hypothèse à vérifier mais pas impossible pour la grande partie des LR qui s’est mis en retrait style Edouard Philippe, maire du Havre.

    Réponse
    L’interprétation de mes articles est parfois hallucinante. Que vient faire la tendresse dans tout ça ? François Fillon a en effet un programme dont je pense qu’il serait le plus efficace. Mais je n’ai éprouvé ni exprimé aucune tendresse pour les salaires versés à des « assistants parlementaires » et je comprends que des citoyens renoncent à voter pour M. Fillon. Quant à l’idée qu’un programme est inapplicable parce qu’il provoquerait des émeutes, elle semble dire que, décidément, on ne peut rien faire pour sauver ce pays. Je ne partage pas cette opinion délétère.
    R.L.

  5. Liberty8 dit :

    Dernier sondage BVA : une bombe, rien n’est joué, 4 personnes dans un mouchoir : Macron/Le Pen = 23, Fillon/Mélenchon = 19. Pourcentage d’erreur +/-2.5 %
    Mélenchon/Le Pen au deuxième tour ? … Je vais être malade !

    • Michel de Guibert dit :

      Mélenchon a fait jusqu’à présent une excellente campagne.

      • Liberty8 dit :

        Oui d’autant plus que sa courbe est en ascension régulière pendant que celle de Hamon plonge vers les abysses, de là à rejouer le coup des primaires avec la surprise Mélenchon au premier tour, il n’y a qu’un pas .
        Nous n’avons jamais été dans une telle incertitude.

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