Le sens de la marche

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(Photo AFP)

Les partis politiques éprouvent de sérieuses difficultés à se mouler dans la nouvelle donne créée par l’élection d’Emmanuel Macron à la présidence de la République. Ils tentent de se réorganiser avec les moyens éculés qui ont produit leur défaite. Les élections législatives complèteront un changement politique qui est sans précédent et auquel tous les candidats à la députation devront s’habituer.

NON, ON NE FAIT plus la meilleure tambouille dans une vieille casserole. Manuel Valls a compris parfaitement la signification de la victoire du président Macron et, après avoir prononcé l’oraison funèbre du PS (« le parti socialiste est mort »), il brigue un poste électif dans le cadre de « la République en marche », le nouveau nom du parti présidentiel. Le parti socialiste ne semble pas enclin à suivre l’exemple de l’ancien Premier ministre. Le réflexe de défense des « anciennes » formations politiques est tout à fait compréhensible, mais elles risquent de passer à côté de l’histoire. Les Républicains, sous la houlette de François Baroin, qui espère obtenir une majorité de droite et forcer M. Macron à cohabiter, ne cachent même pas leur nervosité. Tout à coup, le programme de François Fillon n’est plus le bon, il faut l’amender, en diminuant les impôts à tout va, en renonçant à la hausse de la TVA, en réduisant à peau de chagrin le non remplacement des fonctionnaires. Vraiment ? Et comment la réforme, dans ces conditions, sera-t-elle financée ? Croient-ils que par la démesure fiscale ils augmenteront leur crédibilité ?

Le cas épineux de Valls.

M. Macron ne porte pas M. Valls dans son coeur. Le 8 mai a été l’occasion pour lui de montrer qu’il gardait un lien filial avec François Hollande, lequel a publiquement exprimé son affection pour cet ambitieux jeune homme qui, pourtant l’a « trahi avec méthode ». Mais dans un documentaire diffusé par TF1, le nouveau président n’a caché aucun de ses griefs contre M. Valls qui, naguère à l’Assemblée et sous l’oeil des caméras, lui a fait une scène. Et il affirmait que M. Valls a littéralement « empêché » M. Hollande de se présenter pour un second mandat. Le mouvement du président dit que la candidature de M. Valls est acceptable mais qu’elle devra suivre la procédure des investitures, telle qu’elle est engagée par la commission que préside Jean-Paul Delevoye, lequel a déjà signalé qu’il y avait une autre candidature dans la circonscription de l’ancien Premier ministre. Bref, M. Macron ne fera pas de cadeau à M. Valls, qui reste stoïque, sans doute parce qu’il est assez intelligent pour deviner que l’élection de M. Macron entraîne une refonte complète du personnel politique, une révision en profondeur de distribution des postes, une parité hommes-femmes absolue des candidatures, l’appel à ceux qui viennent de la société civile et doivent représenter la moitié des 577 candidats de la « République en marche ». Enfin, il semble que le président entend choisir un Premier ministre de droite, sans doute pour torpiller les ambitions de LR.

Une jeunesse toute relative.

Tout cela signifie que la recherche de visages neufs dépasse l’exigence de jeunesse. Il y a des hommes et des femmes politiques encore jeunes qui apparaissent aujourd’hui comme de vieux chevaux de retour. Les rejeter, c’est peut-être se priver de leur expérience. M. Delevoye devra être conforme à lui-même, c’est-à-dire très prudent. Le nouveau président bénéficie déjà d’un état de grâce, même si une forte opposition s’organise contre lui. Il est salué dans le monde entier comme le sauveur de la démocratie française et de l’Union européenne, reconnu comme interlocuteur valable par Poutine et Trump, salué avec soulagement par Angela Merkel, félicité par Matteo Renzi, un autre prodige de la politique, qui a été réélu à la tête du Parti démocrate italien. Il me semble que M. Macron a le sens de l’urgence, qu’il n’écarte pas la notion des cent jours pendant lesquels il doit imprimer sa marque, et de manière irréversible. Il commencera pas une loi de moralisation de la vie publique qui donnera un coup d’arrêt, on veut l’espérer, à ces « affaires » qui ont empoisonné la campagne. Il doit à la fois rassurer les chômeurs et les pauvres en montrant de quelle façon il entend les protéger et engager très vite des réformes, notamment celle du travail que les syndicats CGT et FO ont l’intention de combattre de toutes leurs forces. La tâche est immense, ce qui veut dire que, M. Macron étant notre président, nous ne devrions pas, nous les électeurs, finasser en créant des contrepoids à un chef de l’État bien élu. À la fin des fins, on se moque des partis et de leur survie, on se moque des extrêmes et de leur déraison, on se moque des ambitions personnelles et des opportuns. Le rassemblement des Français ne peut être réalisé que s’ils sont rassurés sur les intentions du pouvoir à leur égard et si la réforme est financée jusqu’au dernier euro.

RICHARD LISCIA

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2 réponses à Le sens de la marche

  1. liberty8 dit :

    Si le nouveau programme de la droite perd toute sa substance , en particulier avec l’abandon de la hausse de la TVA, la réduction des fonctionnaires plus basse que celle proposée par Macron, la retraite a la carte etc., il perd alors toute sa crédibilité.
    On a alors un programme non financé, pas plus financé que celui de EM.
    Devant les différentes réactions de son parti suite aux appels de pied ( Vals, Estrosi etc.), devant les réactions des autres pays, on a vraiment l’impression que quelque chose de nouveau est en train de monter, mes certitudes se fissurent.
    Il ne manque pas grand chose pour me faire basculer : un premier ministre de droite ?

  2. Michel de Guibert dit :

    Le sens de la marche… important, oui !
    Comme disait Houphouët-Boigny, alors député français a la tribune de l’Assemblée Nationale : « Nous étions au bord du gouffre, nous avons fait un grand pas en avant ».
    Réponse
    Non, nous venons juste d’éviter le gouffre.
    R.L.

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