Folklore parlementaire

François de Rugy après son élection
(Photo AFP)

François de Rugy, ex-Europe Ecologie-les Verts, a été élu hier président de l’Assemblée nationale, dont la composition originale, avec ses nouveaux venus et les comportements atypiques de ses membres, ne cessera pas de surprendre.

CE N’EST PAS le moindre des paradoxes que François de Rugy, même s’il est issu de la majorité République en marche, ait été élu à la tête de l’Assemblée. Certes, il est député depuis dix ans et il connaît bien le fonctionnement de l’hémicycle. Mais il devient le quatrième personnage de l’Etat au moment où le mouvement écologiste disparaît en tant que groupe parlementaire. On admettra que l’environnement figure dans les priorités du gouvernement, puisque, avec Nicolas Hulot, il y est fortement représenté et que l’élection de M. de Rugy renforce l’idée que la France poursuivra une politique ferme en matière de réchauffement de la planète et autres menaces sur notre destin. Mais le pouvoir n’a pas tenu sa promesse de faire élire une femme présidente de l’Assemblée, ce qui est regrettable.

L’affaire de la cravate.

La moitié des 577 députés est composée de novices dont on prétend, toujours avec le souci de prévoir des dysfonctionnements qui ne seront pas forcément confirmés, qu’ils risquent de ne pas acquérir assez vite les codes de l’Assemblée, qu’ils pourraient être tentés par le mode contestataire ou provocateur ou, inversement, qu’ils voteront comme des bénis-oui-oui. L’arrivée de ces nouveaux acteurs de la politique a donné lieu à des spectacles moins traditionnels que naguère, les 17 députés de la France insoumise (ou, plus exactement, les mâles) ayant juré que rien ne les contraindrait à porter la cravate, alors que le règlement de l’Assemblée ne les y force pas et qu’ils pouvaient donc faire l’économie d’un débat bien dérisoire.
Quelques jours plus tôt, Jean-Luc Mélenchon et ses amis, étaient venus explorer le lieu suprême de la démocratie française, ce qui a incité le chef indiscuté de LFI à bousculer un huissier, à se plaindre de la présence du drapeau européen et à attaquer Cédric Villani, médaille Fields de mathématiques élu REM, qui, lui, porte une lavallière, sous le prétexte que ce « matheux », dixit M. Mélenchon, n’entendrait rien aux contrats de travail. « Cher Jean-Luc Mélenchon, lui a répondu l’élu de l’Essonne dans un tweet, en tant qu’ancien directeur de l’Institut Henri-Poincaré, j’en ai connu des contrats de travail, mais c’est toujours un plaisir de recevoir des cours particuliers ». Par la suite, les deux hommes se sont réconciliés, probablement parce que l’as des maths est doté de cette civilité exquise qui n’est pas, à proprement parler, la tasse de thé du provocateur en chef du monde politique.

Une idée de Marine Le Pen.

Quant à Marine Le Pen, elle a émis l’idée prodigieuse de permettre à tout député de former un groupe, alors que le règlement de l’Assemblée prévoit la constitution de groupes parlementaires à partir de quinze élus. Il n’y en a que huit du FN, ce qui est déjà beaucoup trop, mais quoi, ils veulent pouvoir crier au moins aussi fort que les 17 de LFI. C’est dire que la perception de la démocratie varie énormément d’un parti à l’autre et que la présence d’un groupe éléphantesque au sein de l’hémicycle suggère à ses faibles concurrents des mesures qui n’ont plus rien à voir avec ce qui est le fondement même de la république : un homme, une voix (mais pas plus).
Ce folklore parlementaire ne dit rien de ce qui va se passer pendant les cinq prochaines années à l’Assemblée nationale. Mais on sait quand même qui est en train de s’éclaircir la gorge pour mieux hurler ultérieurement, qui entend faire de l’obstruction, qui va voter pour ou contre, et pourquoi et comment. La CGT se rappelle au bon souvenir d’Emmanuel Macron en annonçant d’ores et déjà une journée de grève et d’action en septembre. Peu importe que le gouvernement ait prévu une cinquantaine de réunions pendant l’été sur la réforme du travail. La CGT dit non de toute façon. Dans tous ces changements que nous ont apportés les élections, il y a a moins une chose qui ne varie pas : l’ineffable constance du syndicalisme.

RICHARD LISCIA

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Une réponse à Folklore parlementaire

  1. Larry @ El Sobrante dit :

    Folklorique mais on constate que ce sont les perdants qui sont responsables du folklore, comme vous le notez fort bien.

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