L’agonie du PS

Sincère mais pas réaliste
(Photo AFP)

En quittant le parti socialiste parce qu’il en dénonce la dérive droitière, Benoît Hamon poursuit le travail de démolition entamé par Manuel Valls qui, lui, est parti parce qu’il trouve le PS trop à gauche.

RIEN DE CE QUI arrive au PS ces jours-ci ne surprend. Cela fait au moins deux ans que les politologues qui connaissent le mieux l’histoire et l’évolution de ce parti nous en annoncent la décomposition. Après une primaire qui a confié les chances des socialistes à Benoît Hamon alors que, de toute évidence, il n’avait pas l’unanimité du PS, puis sa lourde défaite à la présidentielle, qui lui a été reprochée par ses camarades, on ne pouvait pas croire qu’il resterait sagement dans les instances du parti et obéirait à sa discipline. La « fronde » d’une fraction des élus socialistes à l’Assemblée, qui est parvenue à son paroxysme quand Manuel Valls a voulu faire passer sa loi travail (au 49-3), a montré que le parti était clairement divisé, que sa direction et son opposition interne étaient également minoritaires, que le débat de fond qui divise les socialistes est idéologique. Ils ne peuvent pas s’entendre parce qu’il existe au sein du PS deux approches divergentes des maux de la société française : ceux qui souhaitent moderniser le parti, l’adapter à la mondialisation, imaginer d’autres méthodes pour relancer l’emploi et ceux qui, comme M. Hamon, veulent en définitive que rien ne change dans la politique sociale et n’hésitent pas à préconiser de nouvelles dépenses publiques pour améliorer le sort des chômeurs et des laissés pour compte.

Un homme irréductible.

M. Hamon est un homme sincère qui, face aux nombreuses critiques dont il fait l’objet dans le camp libéral, maintient les propositions qu’il a faites lorsqu’il était candidat, y compris le revenu universel. Cependant, ce que ses détracteurs lui reprochent, c’est de continuer sur la voie qui n’a cessé, en France, de produire des chômeurs. Un accroissement systématique de la dépense publique pour renforcer le filet social devient insoutenable et empêche l’économie de se développer. Il ne veut pas en tenir compte parce qu’il souhaite un système plus dirigiste qui réoriente les recettes et les dépenses, quitte à s’acheminer lentement mais sûrement vers une société de type marxiste, dont l’inconvénient principal serait qu’elle se résisterait pas à un environnement européen et mondial progressant dans la direction opposée.
On ne le convaincra pas avec de tels arguments. Mais, s’il est irréductible sur le plan idéologique, il ne peut pas ignorer la réalité politique. Jean-Luc Mélenchon et ses amis ont confisqué l’opposition. Ce sont eux qui la représentent, même si le nombre d’élus PS à l’Assemblée est plus élevé. Justement, la bonne idée, pour la gauche, c’est de montrer qu’il y a une alternative à M. Mélenchon. Ce n’est pas, pour le moment, ce qu’elle est en train de faire. Si les élus les plus disciplinés cherchent un nouveau chef (qui pourrait être Bernard Cazeneuve, pour autant qu’il en ait envie) capable de faire un nouveau parti avec les survivants des élections, les autres tendances de gauche sont toutes des variantes de l’euro-scepticisme et du protectionnisme. M. Hamon ne le dit pas, mais pour que pour son plan ait la moindre chance, il faut que lui aussi préconise la sortie de l’euro et de l’Europe. En quoi se distinguerait-il alors de M. Mélenchon et même de Marine Le Pen ? La gauche est animée par une sorte de tropisme qui la rapproche de l’extrême droite.

Pour s’opposer, il faut aussi être réaliste.

Certes M. Hamon est un démocrate. Mais la démocratie est incompatible avec une politique si difficile à appliquer qu’elle serait imposée, tôt ou tard, par la contrainte. M. Valls a quitté le PS parce qu’il en est arrivé, après beaucoup de déboires, à penser que son parti ne se rallierait pas aux réformes qu’il propose et dont Emmanuel Macron est aujourd’hui le champion incontesté. Ce matin, M. Hamon, sur France Info, adressait au président de la République quelques critiques prononcées sur un ton dépourvu de toute animosité. Oui, ce discours devant le congrès réuni à Versailles n’a pour seule raison que l’embellissement de l’image et même le sacre du président. Oui, en devançant le discours de politique générale du Premier ministre, M. Macron a fait à Edouard Philippe une mauvaise manière ; oui, M. Macron n’aurait pas dû imposer Richard Ferrand à la tête du groupe parlementaire de la République en marche donnant ainsi l’impression qu’il a la main sur tout sans laisser beaucoup d’oxygène à son Premier ministre ; oui, sa présidence jupitérienne touche au ridicule (ou au moins à la puérilité). Quand on a dit tout cela, on n’a rien dit de l’essentiel, à savoir que M. Macron a été élu pour cinq ans, qu’il dispose d’une majorité absolue, qu’il a apporté une bouffée d’air frais à l’ensemble de ses concitoyens, et que tout changement de structure au sein de l’opposition, qu’elle soit de droite ou de gauche, doit tenir compte de ces impérieux changements.

RICHARD LISCIA

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2 réponses à L’agonie du PS

  1. Num dit :

    Je ne sais pas si M. Hamon est sincère mais ce qui est sûr c’est que c’est un apparatchik qui n’a jamais travaillé de sa vie et ne connaît rien à l’économie ni à la vie réelle.

    Réponse
    Je confirme qu’il est sincère, ce qui ne signifie qu’il ferait un bon président.
    R.L.

  2. JB7 dit :

    Excellente analyse !
    Débordé par le travail, je n’ai plus beaucoup de temps pour lire les journaux alors que nous vivons une période politique passionnante. Vos articles sont courts et toujours bien argumentés, c’est donc un vrai plaisir de vous lire.
    Réponse
    Merci.
    R.L.

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