Territoires : le coup de massue

Macron hier
(Photo AFP)

Lors de la première conférence des territoires, le gouvernement a annoncé aux élus que l’effort qui leur serait demandé atteindrait 13 milliards, et non 10, en 5 ans. Le plan proposé a soulevé la colère des élus.

NI EMMANUEL MACRON, ni ses ministres n’ont caché l’ampleur de leur programme, pas plus qu’ils n’ont relativisé l’intensité des efforts douloureux qui devront être fournis par les communes et les départements, et pas davantage les éventuels effets récessifs de cette cure diététique. Le président de la République, remuant le couteau dans la plaie, demande en outre une réduction du nombre des élus locaux, comparable à celle qui est envisagée pour les députés. Gérard Larcher, président du Sénat, a appelé cette nouvelle mesure « la surprise du chef ». François Baroin, président des maires de France, a exprimé sa vive opposition. On ne le leur reprochera pas. MM. Larcher et Baroin sont comptables, devant les sénateurs et les maires, des sacrifices qui sont exigés d’eux et semblent d’autant plus injustes que les gouvernements de François Hollande ont déjà réduit les dépenses des collectivités locales qui, aujourd’hui, dénoncent l’abandon de projets qui ne sont plus financés. Il n’empêche que la droite est mal placée pour critiquer. François Fillon au pouvoir n’aurait pas agi autrement et avait annoncé des mesures encore plus draconiennes, s’agissant de la limitation du nombre de fonctionnaires.

Macron vise la réduction des effectifs.

L’objectif non déclaré du gouvernement, c’est la compression des effectifs de fonctionnaires dans les territoires. Chaque fois qu’un gouvernement diminue les dépenses nationales, les mairies, départements et régions embauchent davantage de personnels. Pour une raison simple : le meilleur moyen de se faire réélire, c’est de lutter contre le chômage, fût-ce en créant des emplois injustifiés. Le recrutement de fonctionnaires locaux a été l’antidote d’un chômage qui aurait pu être élevé qu’il ne l’est sans ce remède quelque peu artificiel. Il est donc d’autant plus difficile de réformer en imposant aux collectivités une cure d’amincissement que l’emploi fait partie des sacrifices à faire. En tout cas, une chose est sûre, les territoires devront faire des économies en réduisant leur nombre d’employés s’ils ne veulent pas renoncer à l’entretien des écoles, des rues et routes, et des hôpitaux.

La grogne monte.

La méthode réformiste verticale et jacobine du gouvernement indique le choix de l’impopularité. Toutes les forces conservatrices de la droite et de la gauche vont se liguer contre lui. Même dans les rangs de la République en marche, on commence à exprimer des doutes, on s’inquiète des conséquences des réductions de dépenses sur la croissance, on se demande à quels conflits va conduire la marche forcée des réformes, surtout celle du travail, associée à la réduction du budget militaire, à la suppression de la taxe d’habitation et maintenant à la diminution des dépenses territoriales. En Marche ! n’ayant pas encore d’élus locaux, ses députés ne sont pas anxieux sur leur sort personnel. Mais nombre d’entre eux souhaiteraient au moins une concertation plus suivie avec le pouvoir. Il demeure que le président et le Premier ministre entendent aller vite, annoncer maintenant les mauvaises nouvelles pour que les Français les digèrent pendant les vacances, et prendre de court des oppositions qui sont tout de même très secouées par la longue séquence électorale qui les a marginalisées.
En tout cas, on ne peut pas porter sur la réforme des collectivités territoriales (car c’en est une) le même regard que pour la réduction du budget militaire qui, elle, affecte directement notre sécurité. Il s’agit de savoir si, oui ou non, nous allons nous prendre en main, nous infliger nous-mêmes les changements dont nous avons tant besoin et commencer à engager des réformes structurelles qui, aussi douloureuses qu’elles nous semblent, nous permettront, à terme, de sortir de l’ornière fiscale et financière où nous nous sommes si allègrement jetés.

RICHARD LISCIA

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5 réponses à Territoires : le coup de massue

  1. Galex dit :

    La diète sera pour tous, à tous les niveaux, ou ne sera pas !
    Nos voisins d’Europe du Sud ont commencé à s’en sortir. Même la Grèce pourrait nous montrer le chemin, alors que la social-démocratie scandinave semble rencontrer des difficultés.
    Merci à R.Liscia pour la clairvoyance de ses analyses quotidiennes,

    • Michel de Guibert dit :

      Pour tous, oui, à condition de ne pas mettre sur le même plan les fonctions régaliennes indispensables (armée, police, justice) et le reste.
      Traiter également des choses inégales est la plus grande des injustices…

  2. Num dit :

    C’est une très bonne chose ! Les collectivités territoriales ont vu leurs dépenses dériver depuis des années et ce alors que l’Etat se serrait la ceinture. Les nombreuses embauches sont abusives alors que l’Etat réduisait le nombre de fonctionnaires dans le même temps. Il était temps de répondre les choses en main. Le millefeuille administratif et territorial français est absurde créant de nombreux doublons et servant les intérêts des baronnies locales, non ceux des citoyens ni l’efficacité de l’action publique.
    Souhaitons que Macron aille au bout car il va rencontrer de nombreuses résistances…

  3. JB7 dit :

    N’ayant aucune compétence économique j’apprécie énormément l’éclairage qu’apporte votre article!
    Il n’est pas légitime de faire des généralités à partir d’un cas particulier, mais lorsque la communauté de communes fut créée sur mon secteur, on embaucha beaucoup de personnel sans transférer une seule personne des mairies vers la communauté de communes. Pourtant, beaucoup de compétences des mairies avaient étés transférées totalement à la communauté de communes et cela aurait du s’accompagner d’un transfert du personnel.
    Que pensez vous de l’avenir proches des communes ayant décidé de construire beaucoup de logements sociaux ? Par exemple pour les communes ayant plus de 50 % de logements sociaux ?

  4. Olis dit :

    Prenons exemple sur le ratio allemand élus/fonctionnaires/population. Celui de la France est le double de celui de l’Allemagne. Sans parler des 35h et autres RTT. Usines à gaz de notre pays…

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