13-Novembre : résilience nationale

Hidalgo et Macron aujourd’hui
(Photo AFP)

Chaque Français commémore aujourd’hui les attentats du 13 novembre à sa manière. Le président et ses prédécesseurs ont consacré une matinée au devoir de mémoire. Les médias diffusent de longs et multiples témoignages. Aucun organe de presse n’échappe à l’émotion que soulève le rappel d’un événement tragique, dont le souvenir reste affreusement douloureux pour les victimes et qui, en outre, s’inscrit dans un contexte qui nous interdit de tourner la page.

CE CONTEXTE est angoissant. Les victoires remportées contre Daech en Syrie et en Irak ne nous permettent nullement d’espérer la fin du terrorisme sur notre sol. Mais l’effondrement du « califat » pose un problème supplémentaire : qu’allons-nous faire de celles et ceux, comme dirait Macron, qui se sont engagés aux côtés du prétendu État islamique, ont survécu et aujourd’hui souhaiteraient revenir en France en échange d’une procédure judiciaire ? Les pouvoirs publics, ce n’est pas un secret, auraient préféré qu’ils restent sur place et qu’ils soient jugés. C’est possible en Irak où existent un gouvernement et une justice, mais ce ne l’est pas en Syrie où la dictature a survécu. Il est donc inévitable qu’un certain nombre de terroristes de nationalité française reviennent sur notre sol. Tous nos services sont évidemment dans une phase de vigilance extrême pour s’assurer que ces hommes et ces femmes ne reviennent pas d’une manière clandestine et ne se fondent pas dans la population. Nous devons tous les juger.

Une violence terminale.

Pourquoi ? Pas seulement parce que la société française doit leur rendre la monnaie de leur pièce, mais parce qu’ils ont contribué à des actes innommables pour lesquels il ne saurait y avoir la moindre complaisance de notre part. Nous n’aspirons pas à nous venger, encore que la notion de vengeance doive traîner dans nombre d’esprits révoltés par des crimes que les djihadistes continuaient à commettre à l’instant même où leur « cause » était laminée. Cela rappelle les nazis qui assassinaient des détenus à la fin de 1944 alors que, de toute évidence, ils avaient déjà perdu la guerre. Il est important en revanche de comprendre ce qui a motivé ces personnes, pourquoi des frustrations qui, chez tous les autres, se traduisent par des revendications ou un militantisme social, sont devenues chez eux une idéologie entièrement fondée sur le crime, sur l’exercice du pouvoir des armes contre des civils innocents, sur une violence sans limites, impitoyable, terminale.
Il faut donc qu’ils sachent qu’ils n’ont pas simplement commis une erreur, ou pris une option négative, ou déraillé pendant leurs parcours. Ils ont bel et bien choisi une inhumaine cruauté, le nihilisme, la mort des autres, de tous ceux qui voulaient rester dans le cadre d’une société démocratique où la vie est le bien le plus précieux. Ils ont franchi une frontière au-delà de laquelle il n’y a que le néant. Et ils ont vu dans leur choix une supériorité sur les peuples qu’ils combattent, qu’ils soient musulmans ou non. La démarche de ces jeunes partis se battre en Syrie et en Irak doit être exposée, analysée, décortiquée.

Le bonheur de se savoir répugnants.

Mais surtout, ils doivent être placés devant les conséquences de leurs actes. Ils doivent réapprendre les qualificatifs qui les décrivent et qu’ils ont oubliés : immondes, fanatiques, inhumains, voilà ce qu’ils ont été et sont encore. Tirer des rafales de mitraillette contre des innocents attablés à un café ou à un restaurant, ce n’est pas seulement commettre un crime de masse, c’est agir sous l’empire d’une indescriptible lâcheté. Poser des bombes dans des aéroports, c’est assassiner des anonymes dont ils ne savent même pas si certains d’entre eux rejoignent ou non leurs idées. Mais quelle importance ? L’essentiel, c’est de terroriser tout un pays, toutes les démocraties parlementaires, et de faire régner la peur dans les villes, d’exhiber, avec une forme particulièrement aboutie de monstruosité, des videos de décapitation, des scènes d’assassinats collectifs, et leur bonheur de se savoir aussi laids, aussi répugnants, aussi condamnables.
Au moment où les médias nous racontent, témoignages à l’appui, le destin terrible de ces femmes qui ont conçu des enfants avec ces hommes, au moment où ces mères réclament leur rapatriement et veulent soudain se soumettre à la justice du pays qu’elles ont fui, au moment où l’on risque d’être tenté par le pardon parce que, tout à coup, elles nous paraissent proches de nous, il faut se rappeler chaque balle, chaque blessure, chaque déchirure, chaque seconde de douleur, chaque décès, chaque événement inéluctable, morts, blessés, paralysés, traumatisés (il y a encore des victimes à l’hôpital deux ans après les faits), psychismes bouleversés, peut-être démolis à vie, chagrins ineffaçables, pertes incalculables.
Le devoir de mémoire consiste justement à ne pas laisser le temps effacer une souffrance aussi intense et partagée par autant de personnes. Le devoir de mémoire, c’est appliquer à tous le droit tel qu’il est exercé chez nous, ni plus ni moins. Le devoir de mémoire, c’est donner la bonne mesure du mal infini qu’ils ont causé et qui les a tant réjouis quand ils se croyaient au-dessus du droit, de la justice, de l’humanisme, de la culture, de la compassion, de l’amour. Quand ils se prenaient pour des super-héros incapables de souffrir. Voilà qu’aujourd’hui ils auraient une sensibilité ? Dans ce cas, réservons à ces belles âmes la juste rétribution qu’elles méritent.

RICHARD LISCIA

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3 réponses à 13-Novembre : résilience nationale

  1. gegau dit :

    Il n’y a rien à ajouter à ce réquisitoire implacable ; laissons faire la justice, celle des hommes rendue au nom d’un peuple ou celle d’un juste retour des « choses » qui n exclura rien de ce qui doit arriver lorsque l’on connaît de quoi est capable la nature humaine livrée à elle-même. Ils nous l’ont assez montrée ; qu’ils en paient les conséquences.

  2. deregnaucourt dit :

    Que de pertinence dans votre article!. Voilà, enfin nommées, les véritables plaies de notre démocratie et de toutes les valeurs sur lesquelles, le fait d’être un homme se différencie d’être un animal. Ce n’est plus une plume dont vous usez mais bien d’un nécessaire et cultivé bistouri qui sépare des choses qu’on a admises par manque de culture, manque de recul, compromission, peur de souligner les différences au profit unique des similitudes? Entre, simplement, le bien et le mal. Si tant est, qu’à en juger par les selfies et les prise de vue des caméramans relatant ce sombre anniversaire, ces mots est encore quelque signification.

  3. Eve M. dit :

    Les « je suis Charlie » bonasses, nounours et bougies, bien-pensance humide largement diffusée par nos chaînes d’info, révèlent ceci: nous sommes en guerre avec des théocrates et n’en finissons pas de tendre la joue et le reste, aux efficaces coups de cutter et de pare-chocs de ces prétendus résistants.
    Si la justice continue de s’exercer comme elle s’exerce ( cf Merah ), nous avons déjà perdu.
    Houellebecq serait donc un visionnaire?

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