La possibilité d’une guerre

Kim Jong-un à l’oeuvre
(Photo AFP)

Le lancement d’un nouveau missile balistique nord-coréen capable d’atteindre n’importe quel point du territoire des États-Unis accroît énormément les tensions internationales. L’hypothèse d’une guerre nucléaire, ou d’un début de guerre nucléaire suffisant pour provoquer des ravages incalculables semble de moins en moins déraisonnable.

KIM JONG-UN, le jeune dictateur surexcité qui règne à Pyong Yang, explique ses essais de missiles par la nécessité, pour son pays, de se protéger des États-Unis, pays voué, selon lui, à détruire la Corée du Nord. Il refuse de négocier l’arrêt du développement de ses moyens stratégiques et, à chaque essai, les Américains eux-mêmes reconnaissent qu’il fait des progrès. La réponse de Donald Trump est toujours la même : il promet à la Corée du Nord des représailles qui la feraient disparaître de la carte. Ce qui ne veut rien dire : on veut toujours la mort de son ennemi, on ne veut pas mourir avec lui, sauf dans le cas des kamikazes. Or le seuil d’intolérance à un conflit nucléaire commence très tôt. Un seul missile qui détruirait une seule ville américaine représenterait la mort de millions de personnes, des dévastations indescriptibles, une pollution qui nous renverrait tous à l’âge de pierre.

Une menace très sérieuse.

Les États-Unis ne peuvent pas conduire une action militaire préventive tant qu’un missile nord-coréen n’est pas tiré pour les atteindre. S’ils vitrifiaient la Corée du Nord en ripostant massivement, ils ne déclencheraient pas nécessairement une guerre tous azimuts capable d’éliminer l’humanité, car ils auraient avec eux la légitime défense. Mais s’ils tiraient les premiers, la Chine et la Russie pourraient se joindre à la Corée du Nord et participer à la punition des Américains. Dans cette voie extrêmement étroite, le seul moyen de contre-carrer les plans de Pyong Yang, c’est le recours à un système anti-missiles. Il existe. Il parviendrait sans aucun doute à neutraliser une demi-douzaine de missiles nord-coréens, même si l’on néglige une pollution radioactive qui mettrait en danger des millions de vies. Il ne parviendrait pas à empêcher l’arrivée sur le sol américain d’une partie d’une flotte de missiles.  Comme apparemment, rien, ni la situation économique de la Corée du Nord, qui est défavorable, ni l’insuffisance des connaissances des scientifiques nord-coréens, ni une politique d’agression pure, n’empêche les progrès nucléaires et balistiques de  Pyong Yang, Kim sera capable, dans quelques années, de représenter une menace pour l’Amérique (et peut-être d’autres pays) aussi sérieuse que celles de la Russie ou de la Chine.

Enjeux immenses et petits calculs.

Une explosion nucléaire serait un tel malheur pour l’humanité que le seuil de la dissuasion commence très tôt. M. Trump allie les imprécations aux suppliques adressées à la Chine pour qu’elle mette Kim au pas. Les Russes, pour leur part, ne veulent même pas accroître les sanctions. Ni Pékin ni Moscou ne sont inquiets d’une crise qui affaiblit les États-Unis moralement et militairement. Xi Jinping et Vladimir Poutine souhaitent seulement qu’elle ne se transforme pas en une guerre dont la Chine et la Russie paieraient les conséquences. Si nous en sommes là, ce n’est pas seulement à cause du laissez-faire d’une demi-douzaine de présidents américains qui n’ont pas su négocier à temps avec Pyong Yang :  la Corée du Nord exerce son chantage depuis fort longtemps mais il fallait la rassurer en dépit de la paranoïa des Kim passés et présent. Si l’inquiétude augmente dans le monde, c’est aussi parce que les dirigeants chinois et russe ne semblent pas comprendre clairement que l’enjeu de la paix est infiniment supérieur à leurs petits calculs pour empoisonner la vie des Américains.  Une chose est sûre. L’accord nucléaire avec l’Iran n’a jamais autant démontré son utilité. Donald Trump, qui voudrait sortir son pays de cet accord, se trompe lourdement. Il n’a rien à dire aux Coréens, mais son devoir est d’entamer des discussions très sérieuses avec la Chine et la Russie.

RICHARD LISCIA

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2 réponses à La possibilité d’une guerre

  1. Michel de Guibert dit :

    Je ne suis pas sûr qu’il faille être aussi pessimiste ; malgré sa paranoïa, le dictateur coréen est un calculateur, et je ne pense pas qu’il irait jusqu’à déclencher une guerre nucléaire où il aurait tout à perdre.
    En revanche, je ne comprends pas pourquoi vous écrivez : « L’accord nucléaire avec l’Iran n’a jamais autant démontré son utilité » ? N’en déplaise à Trump, je pense tout le contraire.

    Réponse
    Si vous croyez que l’accord avec l’Iran est inutile (ou dangereux), vous êtes d’accord avec Trump. Peut-être avez-vous compris l’inverse de ce que j’écris. Bref, je suis pour cet accord.
    R.L.

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