Des LR en colère

 

Gérard Larcher
(Photo AFP)

Emmanuel Macron a réussi à désamorcer la grogne sociale en promettant hier aux syndicats une « République contractuelle ». Sur le plan politique, la réforme constitutionnelle donne lieu à une levée de boucliers chez les Républicains, vent debout contre le scrutin proportionnel.

LE PROJET de réforme constitutionnelle contient trois textes, le premier constitutionnel, le deuxième loi organique, le troisième loi ordinaire. Ses deux éléments novateurs sont l’introduction d’une dose de proportionnelle dans le scrutin législatif et une réduction sensible du nombre de députés et sénateurs. Le Sénat, présidé par Gérard Larcher, s’achemine vers un compromis avec l’exécutif. Mais nombre de députés LR se sont dressés contre la réforme et ils l’ont fait savoir à M. Larcher lors d’une réunion des élus LR hier.

L’atteinte au scrutin majoritaire.

Sur la dose de proportionnelle et le nombre de parlementaires, dont la réduction implique un redécoupage des institutions, le débat est porté d’une part par l’atteinte au principe du scrutin majoritaire à deux tours qui, jusqu’à présent, a assuré la stabilité gouvernementale et, d’autre part par la crainte des élus actuels, y compris ceux de la République en marche, qui sont contraints de se sacrifier sur l’autel d’une représentation moins large et, en principe, moins coûteuse.  François Bayrou, et d’autres avec lui, n’a pas caché sa déception : il souhaitait une double dose de scrutin proportionnel, soit 30 % des élus à la proportionnelle, plutôt que 15 %. Bien entendu, son objectif est de renforcer la présence du MoDem au Parlement, mais ce parti ne serait pas le seul à bénéficier de la proportionnelle : elle profiterait au Rassemblement national et à la France insoumise, dont les scores aux élections de 2017 étaient déjà considérables.

Un temps plus court.

Le scrutin proportionnel n’est en réalité une bonne affaire pour personne en ce sens qu’il milite pour la république des partis et tourne le dos à la grande et efficace idée gaulliste de donner à la France un gouvernement stable pendant cinq ans. Il se trouve que Lionel Jospin a proposé et obtenu, quand il était Premier ministre au sein de la cohabitation avec le président Jacques Chirac, une réduction de sept à cinq ans du mandat présidentiel. Les Français passent leur temps à chercher des amendements constitutionnels censés donner de l’oxygène à la démocratie. Mais depuis, ce fut très clair : la coïncidence dans le temps entre élections présidentielle et élections législatives a renforcé le pouvoir de l’exécutif pendant le mandat de cinq ans, ce qui l’oblige à mettre les bouchées doubles, mais pour un temps plus court. On aura d’ailleurs remarqué que cette course a abouti deux fois, en 2012 et 2017, à la non-réélection du président en exercice.

La solution qui consiste à n’accorder que 15 % des sièges à la proportionnelle n’est, pour le président, qu’une manière de donner un gage à son ami et allié François Bayrou.  Non seulement il n’était pas enthousiaste au sujet du projet, mais il est inquiet de ce qui pourrait se produire si par la suite une coalition de partis, MoDem, RN, LFI réclamait un nouvel élargissement de la part du suffrage à la proportionnelle. C’en serait bel et bien fini des majorités sûres, au moment où Macron vient de démontrer qu’avec sa propre majorité il a réussi à lancer plusieurs réformes indispensables et forcé de la sorte un peuple rétif à les accepter.

RICHARD LISCIA

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4 réponses à Des LR en colère

  1. Michel de Guibert dit :

    Merci pour cet article et pour vos conclusions auxquelles j’adhère.
    Cette réforme constitutionnelle serait pernicieuse, on le voit chez nos voisins qui ont déjà la proportionnelle, comme l’a été la suppression du septennat ; nous avions une bonne constitution et nous nous obstinons à la déconstruire !

  2. admin dit :

    Michel Gorfinkel dit :
    Le meilleur système est le système anglais scrutin par circonscriptions majoritaire à un tour.

  3. JB7 dit :

    Merci d’avoir dénoncé, à plusieurs reprises au cours des 12 derniers mois, les risques du scrutin proportionnel. Il est bien dommage que les Français soient peu nombreux à se rappeler des dégâts qu’il a causés pendant la Quatrième république. Les hommes politiques qui réclament ce scrutin proportionnel sont plus intéressés par leur intérêt personnel que par l’intérêt de la France, mais cela aussi vous l’avez déjà dit à plusieurs reprises.

  4. Stiers dit :

    Le souvenir de la 4ème République est suffisamment éloquent pour ne pas envisager un scrutin proportionnel. N’oublions pas que nous sommes en France.

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