Macron, côté social

Huit milliards contre la pauvreté
(Photo AFP)

Emmanuel Macron a annoncé un plan de huit milliards d’euros en quatre ans pour lutter contre la pauvreté en France, qui touche neuf millions de personnes.

POUR LE chef de l’Etat, cette rentrée est celle des bonnes résolutions : parfaitement conscient de la chute de sa popularité, qui ne dépasse guère les 32 %, il annonce notamment la mise en oeuvre d’un plan contre la pauvreté qui, en France, toucherait quelque neuf millions de personnes. Il a prononcé ce matin, au Musée de l’Homme, un discours comme il aime les faire, en présentant une analyse qui montre la fatalité de la misère, pour un certain pourcentage de citoyens, dans une économie de marché. Il entend dépenser huit milliards (dont quatre étaient déjà affectés au projet) en quatre ans, ce qui, il est vrai, peut faire une différence, dès lors que le président de la République met l’accent sur la formation professionnelle.

Le choix du chômage.

La pauvreté n’est quantifiable en France que selon les paramètres que nous avons adoptés. Beaucoup de ceux qui ne sont pas considérés comme pauvres, au sens statistique du terme, ont du mal à joindre les deux bouts. M. Macron n’est pas non plus le premier président qui souhaite mettre un terme à la pauvreté, c’est même une constante historique en France. Elle est toutefois le produit du système et elle s’aggrave en période de vaches maigres, c’est-à-dire quand le taux de chômage devient insupportable, comme c’est le cas aujourd’hui, à 9 % de la population active. Dans une société dominée par les lois du marché, il n’existe pourtant qu’un vrai remède à la pauvreté : un fort taux de croissance. La France, qui a eu une bonne année en 2017, avec beaucoup de créations d’emplois, est retombée cette année dans le marasme, avec des distorsions nouvelles du marché du travail, emplois proposés mais non pourvus, cherté du logement dans les grandes villes à laquelle un salaire insuffisant ne peut pas répondre, choix fréquent du chômage parce qu’il correspond, en définitive, à la meilleure protection.

Grand réformateur devant l’Eternel, Emmanuel Macron souhaite tout à la fois accompagner l’éducation et l’apprentissage des laissés-pour-compte, mettre un terme progressivement aux emplois aidés qui n’ont pas prouvé leur pérennité, mais qui peuvent pourtant amorcer une carrière, bref donner une chance à tout le monde, y compris ceux dont le destin est déterminé par la misère familiale. Il n’est pas le premier président à se dresser contre le chômage, mais il tente de placer l’argent là où il peut jouer un rôle, en insistant non plus sur la générosité de l’Etat, mais sur l’apprentissage et la formation. On ne peut pas lui en faire le reproche tant les efforts précédents pour réduire le chômage ont abouti à des résultats insuffisants ou nuls. Mais M. Macron lui-même ne niera pas que les huit milliards d’euros qu’il a mis dans la balance ne suffiront à réduire qu’une partie du chômage, pour autant qu’ils portent leurs fruits.

Dissuader les chômeurs « professionnels ».

Sa politique a donc un aspect généreux, mais elle sera aussi plus stricte à l’égard des chômeurs, surtout ceux qui se complaisent dans une inactivité encouragée par les prestations sociales. Il va engager une négociation avec les syndicats pour limiter et plafonner la durée des indemnités allouées aux chômeurs. Ce qui est sûr, c’est qu’il existait jusqu’à présent dans la société française une complaisance à l’égard des indemnités chômage, qui permettaient à tout un chacun de bien dormir, mais ne résolvaient guère le problème. M. Macron n’invente rien en adoptant une attitude plus ferme à l’égard ds chômeurs professionnels, qui ne peuvent plus désormais compter sur une rente permanente et devront chercher un emploi plus activement. Il demeure un paramètre inquiétant, qui est le taux de chômage en France, l’un des plus élevés en Europe, sans doute parce que, jusqu’à présent, il a été plutôt combattu par des moyens budgétaires alors qu’il fallait mettre l’accent, comme ailleurs en Europe, sur la formation et la flexibilité du travail.

Le gouvernement est en tout cas assuré, de rencontrer, dans la mise en oeuvre de son plan contre la pauvreté, un certain nombre d’obstacles, à commencer par les syndicats, peu enclins à accepter une révision en baisse des prestations allouées aux chômeurs (pour ce qui est, à la fois, du montant et de la durée). Il ne faut pas oublier qu’il y a au moins trois millions de chômeurs en France, si on ne compte que ceux qui n’ont aucun emploi, fût-il partiel, alors que les maigres milliards jetés dans cette crise sociale qui dure depuis quarante ans n’auront pour effet, si tout va bien, que de mettre au travail quelques centaines de milliers de personnes.

RICHARD LISCIA

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2 réponses à Macron, côté social

  1. admin dit :

    LL dit :
    La pauvreté était considérée, au temps de Lyndon Johnson, comme la dernière frontière américaine, après l’espace. On attend encore aujourd’hui qu’elle soit conquise. Il y aura toujours des gens pour profiter du système – mais ce n’est pas la norme et cela ne doit pas empêcher la mise en place d’un filet social, surtout si on peut offrir des services de placement aux chômeurs. Nombreux sont ceux qui n’ont aucune idée de la complexité inhérente à la recherche d’emploi. Cette infrastructure existe déjà en France. On peut bâtir sur l’existant !

  2. BASPEYRE dit :

    500.000 travailleurs détachés en France:
    CQFD

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