Un sommet européen réuni à Bruxelles n’a produit aucun résultat au sujet de l’accord que les 27 sont censés conclure avec le Royaume-Uni. La perspective d’une cassure sans accord donnant le vertige, on s’achemine vers un délai d’un an supplémentaire avant l’adoption définitive d’un texte qui rendrait aux Britanniques leur liberté commerciale et financière.
LE DIALOGUE entre Londres et Bruxelles devient si long qu’il serait apparemment sage d’y mettre fin. Sauf qu’une absence d’accord risque de créer, dans les transports, les échanges (assortis de nouveaux contrôles à mettre en place), et même les relations politiques, un chaos sans précédent. Une foule de problèmes sont apparus à la faveur de la négociation. Certains ont été résolus, mais le plus important, le sort de la frontière entre la République irlandaise et l’Irlande du Nord, ou Ulster, est un casse-tête. L’Irlande, capitale Dublin, appartient à l’Union européenne. L’Ulster aussi, mais parce qu’il s’agit d’un territoire britannique. Si la Grande-Bretagne quitte l’UE, l’Ulster la quitte aussi et il faudra alors ériger une frontière entre les deux Irlande. Cela créerait une crise insoluble : d’une part, les Irlandais républicains et indépendants ne supporteraient pas une frontière qui infligerait des droits de douane à leurs échanges avec l’Irlande du Nord ; d’autre part, la Première ministre, Theresa May, ne peut pas forcer la main des extrémistes du nord de l’Irlande qui assurent sa majorité à la chambre des Communes et dont la colère l’évincerait du pouvoir.
Une femme courageuse.
On a affaire, en l’occurrence, à un sérieux problème de politique intérieure. Mme May est une femme extrêmement courageuse. Elle a hérité d’une crise historique dont elle ne voulait pas et elle a été chargée d’assumer les conséquences catastrophiques de l’erreur stratégique de son prédécesseur : l’ex-Premier ministre, David Cameron, a cru en finir avec les divisions de son parti, les Tories, en organisant un référendum qui mettrait tout le monde d’accord, et définitivement. Malheureusement pour lui, pour le Royaume et pour l’Europe, les Britanniques, convaincus que l’Union européenne rognait leur indépendance et menaçait de les inonder d’immigrants, ont voté en faveur du Brexit. Mme May, au départ hostile au divorce avec l’Europe, a mis un point d’honneur à respecter la volonté populaire, alors qu’elle était parfaitement consciente que son pays courait à la mésaventure, pour ne pas dire au désastre. Les conservateurs les plus acharnés à quitter l’UE ont exercé sur elles des pressions à la fois déloyales et malhonnêtes, en exigeant d’elle notamment qu’elle présentât un plan plus favorable aux Britanniques qu’ils ne le méritaient, compte tenu du choix négatif et masochiste qu’ils avaient fait. A plusieurs reprises, elle a failli être renversée, notamment sous l’effet des coups de boutoir de Boris Johnson, son ancien ministre des Affaires étrangères, qui a fini par démissionner, clamant partout que Theresa May conduisait le pays à sa perte.
Il n’y a pas de bon Brexit.
La difficulté des négociations entre Londres et Bruxelles démontre qu’il n’y a pas de Brexit satisfaisant ni pour les Anglais ni pour les Européens. Le problème ne vient pas de ce qu’un pays ne puisse pas rétablir le contrôle de ses échanges à tout moment. Si la Grande-Bretagne n’avait jamais adhéré à l’Union, tout aurait été très simple. Mais aujourd’hui, elle doit défaire l’inextricable écheveau tressé en quarante-cinq ans d’intégration européenne. La vérité est que le système en place fonctionne et que le remplacer par un système totalement périmé, c’est prendre un risque dont les Anglais pourraient ne pas se relever. Ils le savent tous. M. Johnson sait parfaitement que le Brexit n’est pas viable. Avec l’extrême droite et une bande de conservateurs agités, il n’a cessé de mentir au sujet des bienfaits incalculables que le divorce avec l’Europe allait procurer à ses compatriotes. Maintenant, il prétend que le danger n’existe que parce que Mme May est incapable de couper le cordon . C’est faux. Elle tente seulement de ne pas insulter l’avenir.
RICHARD LISCIA
Je ne comprends pas ce qui empêche un nouveau vote. Tout le monde a le droit de changer d’avis, même le peuple.
Ce serait en France, on aurait fait un nouveau vote !
Non, on l’aurait contourné en ratifiant un traité.
En effet, la ratification du traité de Lisbonne reprenant quasi les termes du traité rejeté de Maastricht…
C’est exact, la reformulation du texte de la constitution de 2005 s’est établie à partir des traités de Rome et de Maastricht.
L’inextricable écheveau de l’Union européenne : tout est dit.
A l’inverse des unionistes de l’Ulster, dans les conséquences possibles du Brexit, l’indépendance de l’Ecosse qui veut rester en Europe…