Trump-Macron : la castagne

Trump et Macron le 10 novembre
(Photo AFP)

Le déluge de tweets incendiaires diffusés hier par Donald Trump traduit l’état, plutôt anémique, des relations franco-américaines, mais la France a pris le parti de ne pas contribuer à leur détérioration.

C’EST UNE CHOSE d’observer un enfant mal éduqué, violent et narcissique quand il s’en prend à sa famille, c’en est une autre quand cet enfant dirige le pays le plus puissant du monde. Les tweets de Trump contenaient des formules grossières exprimant moins la défense de sa diplomatie que sa colère de fils gâté qui n’a pas eu pour Noël les jouets demandés. Les Français apprenaient l’allemand en 1940 (sans doute pour mieux collaborer avec l’ennemi), jeter les Etats-Unis dans le même sac que la Russie et la Chine est scandaleux, « Paie pour l’OTAN » (ce que nous commençons à faire), « Il n’y a aucun pays plus nationaliste que la France et les Français en sont fiers à juste titre », « Make France great again », et un peu à la manière de l’opposition en France, un rappel venimeux de la cote de popularité de Macron et de notre taux de chômage.

Un échec de Macron.

Est-ce que c’est grave ? Cela met un terme en tout cas à la fiction écrite par Emmanuel Macron d’un dialogue possible avec un interlocuteur impossible. Les rapports entre les deux pays n’en seront pas améliorés, d’autant que le sang de l’opposition n’a fait qu’un tour. Elle a exigé une riposte en bonne et due forme (quoi ? Une guerre nucléaire ?). D’un côté le président de la République continue à feindre, contre toute évidence, que la France peut encore collaborer avec l’Amérique de Trump, de l’autre, il ne peut pas cacher qu’il a échoué dans l’un de ses exercices préférés, le grand écart du « en même temps ». Mais la méchanceté infantile du gosse-président qui casse tous ses jouets n’est pas un simple accès de mauvaise humeur. Le discours prononcé par M. Macron et dans lequel il accablait le nationalisme était dirigé contre Trump qui a eu l’impression qu’il avait été invité au centenaire de l’armistice uniquement pour prendre une leçon d’humanisme, alors qu’il n’a cessé de durcir ses positions depuis qu’il est entré à la Maison Blanche.

Projet européen : question de crédibilité.

Il a donc réagi à sa manière, en tenant d’humilier M. Macron et principalement parce qu’il a lui-même été humilié. Avec Trump, la bagarre ne dépasse pas, en intensité, celle des querelles sous le préau de l’école. Soutenu par Angela Merkel, le projet européen d’Emmanuel Macron a besoin d’être précisé et d’atteindre un certain degré de crédibilité. Comment peut-on construire une armée européenne parallèle aux forces de l’OTAN? Avec quels effectifs et quels moyens ? Et si la chancelière allemande a été convaincue par l’idée du président français, les Allemands en général sont-ils prêts à larguer les amarres avec l’Amérique ? Les Etats-Unis demeurent les garants de la sécurité européenne et lorsque Macron a envisagé que l’Europe domine son cyberespace, pour mieux assurer sa défense contre d’autres puissances parmi lesquels l’Amérique, n’a-t-il pas jeté un pavé dans la mare qui a choqué les Américains, et pas seulement M. Trump ?

Chez certains diplomates européens, l’idée la plus répandue est que Trump est un mauvais moment à passer et qu’il faut continuer à protéger la porcelaine du magasin jusqu’à ce qu’enfin il disparaisse de la scène politique. Personne, pourtant, ne peut exclure qu’il soit réélu, ni que les partis européens qui s’auto-décrivent comme « progressistes », s’effondrent. Le fait est qu’il faut beaucoup de temps pour construire une force européenne indépendante, qu’il en faut aussi pour changer la direction politique d’un pays, et que rien, dans les discours de Macron et les tweets de Trump, ne dépasse le débat d’idées. Tout au plus constate-t-on que le président américain apporte à sa diplomatie sa touche personnelle de vulgarité et d’infantilisme et que ses colères, qui relèvent de la vulcanologie, ne prêtent pas forcément à conséquences.

RICHARD LISCIA

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4 réponses à Trump-Macron : la castagne

  1. Scalex dit :

    Tant que ce triste personnage sera au pouvoir, je n’aurai aucune envie de refaire un voyage touristique dans ce pays. Faut il attendre deux ans, ou six ans, pour revoir enfin New York ?

  2. chretien dit :

    Excellent, votre article ! Le problème de Trump est l’éducation, ce que vous dites dès le début de votre article. Alors que des milliers de jeunes Américains durant deux guerres sont morts dans la boue, le froid, la neige, son attitude lors des dernières cérémonies est inexcusable et ses insultes (en particulier contre les résistants français) sont intolérables .

  3. Michel de Guibert dit :

    En français courant (je ne sais pas comment cela se dit en anglais), Trump est un goujat et un gougnafier.

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