Macron tient bon

Macron ce matin
(Photo AFP)

Emmanuel Macron n’a pas cédé aux gilets jaunes : il maintient les taxes sur les carburants tout en envisageant de négocier. De leur côté, les manifestants poursuivent leur action. François de Rugy, ministre de la Transition écologique, a été chargé de recevoir une délégation des gilets jaunes dès cet après-midi.

IL Y AVAIT très peu de chances que le président de la République accède aux revendications diverses exprimées par les gilets jaunes. Il a pris le soin de distinguer entre les protestataires et les casseurs, décrits par son porte-parole, Benjamin Griveaux, comme des éléments de l’ultra-droite. Il devait aujourd’hui présenter sa programmation pluriannuelle de l’énergie. Il a joint la crise actuelle à des annonces prévues depuis longtemps. On ne nourrissait aucun doute sur la ligne que M. Macron allait adopter : tout renoncement de sa part, en dehors des paroles de compréhension et de compassion, et d’une analyse tendant à démontrer que les gilets jaunes sont les victimes des politiques énergétiques incohérentes qui se sont succédé, aurait signé sa déconfiture. Néanmoins, il a envisagé une politique fiscale souple, plus élevée en cas de baisse du prix du baril de pétrole, plus réduite en cas de hausse.

Il a donc replacé son discours dans le cadre des efforts du gouvernement pour lutter contre le réchauffement climatique. Il a annoncé la fermeture de la centrale nucléaire de Fessenheim à la fin de 2020,  et l’arrêt de 14 réacteurs d’ici à 2035. Il a abondamment décrit le « mix » énergétique qu’il prévoit pour le pays, avec la décision de fermer à terme toutes les centrales à charbon et de développer l’énergie solaire et éolienne. Le président n’a pas dit s’il ferait construire de nouveaux EPR, la nouvelle filière nucléaire dont un seul exemplaire existe en France, qui ne sera achevé qu’en 2020, si tout va bien.

Un président technocratique.

C’était le discours d’un président « technocratique » qui ne satisfera pas ceux qui veulent seulement que l’essence soit moins chère et exigent une hausse de leur pouvoir d’achat par quelque méthode que ce soit. Bien entendu, on a toutes les raisons de croire que les oppositions de droite et de gauche lui en feront le reproche et encourageront les gilets jaunes à bloquer la circulation. À l’approche de Noël, le coût de cette crise est très élevé puisque les spécialistes du commerce parlent d’une diminution de 30 % de l’activité commerciale, ce qui ne manquera pas d’affaiblir la croissance pour cette année.

De leur côté, les gilets jaunes ont désigné huit porte-parole dont la liste a été contestée par ceux qui ne l’avaient pas votée.  Cependant, comme il est difficile de croire qu’ils vont abandonner leur mouvement, il semblait souhaitable que le gouvernement les reçoive non seulement pour les écouter mais pour faire un geste fiscal dans leur direction. C’est dans ce sens que le président a annoncé la création d’un « Haut Conseil énergétique », dont on ne voit guère l’utilité, mais qui pourrait servir de relais pour des discussions avec les gilets jaunes. En fin de matinée, on apprenait que François de Rugy, ministre de la Transition écologique, allait rencontrer une délégation de gilets jaunes dès cet après-midi, ce qui constitue un signe de détente.

Saut périlleux.

Il est tout de même peu probable que la crise s’éteigne d’un seul coup. M. Macron s’appuie, dans sa démarche, sur les expériences passées. Il a tenu bon pour le code du travail et pour la SNCF et il est sorti victorieux des conflits provoqués par ses réformes. Entretemps, ce qui a changé, c’est sa baisse de popularité. Elle tend à lui prouver qu’il prendrait un risque accru en se livrant à un nouveau saut périlleux. D’une certaine manière, dès lors qu’il a reconnu la validité des revendications des gilets jaunes, il ne devrait pas lui être trop difficile d’accéder à au moins une partie de leurs demandes, en restant dans le cadre strict de la fiscalité, les appels à la démission devant être ignorés par tout exécutif qui se respecte. Ce matin, le chef de l’État a un peu repris la main, mais les critiques et le désordre qu’elles provoquent ne vont pas tarder.

 

RICHARD LISCIA

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7 réponses à Macron tient bon

  1. avulmiere@wanadoo.fr dit :

    Qu’il continue ainsi et en 2022 on aura un gouvernement comme en Italie ou au Brésil.

    • Scalex dit :

      Macron doit rester lui même. C’est probablement sa seule chance d’être réélu. Mais son objectif n’est pas d’être réélu. Macron souhaite surtout atteindre ses objectifs. De la même façon, je ne suis pas sûr que les Français souhaitent remplacer Macron. Les Français souhaitent seulement « gagner plus et payer moins ».

  2. Doumé dit :

    Droit dans ses bottes,comme Juppé en 1995. La suite a été plus dure en 1997.

  3. chretien dit :

    Intelligents nos énarques?
    Pollution : 40 % pour le bâtiment
    Automobile : 15 %

  4. Michel de Guibert dit :

    Pour évoquer les casseurs, Castaner parle de la « peste brune », Griveaux désigne l’ultradroite, mais d’après la Préfecture de police il s’agirait de membres de l’ultragauche…
    Problème de communication au ministère de l’Intérieur ? ou manœuvre politicienne ?

  5. Picot François dit :

    C’est exactement la bonne formule : un Président technocratique alors qu’il devrait être un politique soucieux du bien être de Français, ce qu’il n’est pas. Il y a une urgence : aider tout de suite ceux qui sont en grande difficulté sur le plan financier en baissant le niveau des taxes et prélèvements obligatoires, les « explications » ne servent à rien si le porte monnaie est vide. La transition énergétique c’est peut être bien mais cela doit passer après. Quant au « Haut Conseil Energétique » c’est une vaste plaisanterie, un comité Théodule qui ne convaincra personne et qui ne suffira pas, cette fois, à tromper les gens et à enterrer les problèmes. Macron ne répond pas, il botte en touche et cela serait étonnant que ça marche; il est en très mauvaise posture et n’a absolument pas repris la main.

    Réponse
    La plaisanterie sera amère quand les impôts seront augmentés pour ceux qui ne sont pas gilets jaunes. Votre haine de Macron devrait vous inciter à occuper un rond-point;
    R.L.

  6. Patrice Martin dit :

    Après le discours du chef de l’Etat, les gilets jaunes savent que leur compte en banque va plonger dans le rouge fin janvier 2019, afin que la planète soit sauvée en 2035. Peut-être ne devront-ils payer les agios à la banque que jusqu’à cette date ? On balance entre la stupeur et l’indignation. On manque de mots pour qualifier les propos du président de la République : hors sujet, indigne, indécent paraissent très insuffisants. Ils présentent néanmoins un avantage : les gilets jaunes savent désormais ce que sont la transition écologique et le réchauffement climatique. Pour eux, ce seront au mieux des gadgets à l’usage exclusif des riches et des socialos-parigos-écolos-cocos-gogos-bobos. Au pire une vaste supercherie, une fumisterie, une escroquerie intellectuelle dont le but est de détourner les pauvres de leurs véritables problèmes et le résultat principal d’aggraver la misère humaine.
    Mais essayons de rester positifs : le discours présidentiel mentionnait d’autres mesures essentielles, comme la fermeture des centrales thermiques et nucléaires. Ça tombe bien pour les gilets jaunes qui seront devenus tellement pauvres qu’aucune aide d’Etat ne leur permettra jamais d’acheter une voiture électrique. Heureusement pour eux : il n’y aura plus assez d’électricité pour leur permettre de les faire rouler. Ou s’il y en a assez, elle sera devenue tellement chère qu’ils ne pourront pas en acheter. Pas grave : après la taxe «carbone» qui pénalise un secteur automobile responsable de seulement 10 % de la production de CO2, on leur fera payer une nouvelle taxe « électricité » pour faire face à l’aggravation du déficit de la balance commerciale d’une nation qui sera passée du statut de principal exportateur d’électricité en Europe, à celui de principal importateur. Auprès principalement de l’Allemagne qui elle, a pu fermer ses centrales nucléaires car 60 % de son électricité provient des centrales thermiques les plus meurtrières et les plus polluantes pour la planète, celles à charbon dont regorge son sous-sol …
    Comment un tel cauchemar peut-il se produire ? Aux sourds, je conseille vivement le visionnage de l’épisode « L’apprenti sorcier » du film « Fantasia » de Walt Disney. Aux aveugles l’audition du poème symphonique éponyme de Paul Dukas.

    Réponse
    Un tapage excessif entraîne la surdité.
    R.L.

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